Avec un blaze aussi franchouillard et un titre d’album aussi débile mais qui continue de me faire poiler (mais j’ai honte hein…) vous êtes en droit de vous demander ce qui vous attend au détour du premier album de ces Lillois qui, au prime abord, ne se prennent absolument pas au sérieux. Quelle est donc cette nouvelle tartuferie qui vient polluer notre jolie belle scène française par son humour populacier ?

Les amateurs de myspace auront peut-être déjà une réponse à cette question puisque cela fait déjà quelques mois que COSTA GRAVOS avait posé ses marques au travers d’un unique titre, ma foi, fort prometteur. Contre toute attente, les GRAVOS ne sont pas les fils cachés d’amours coupables entre Bézu et les Vamps (vous saluerez au passage mes références quant à l’humour hexagonal). Toutefois il semble évident que notre quintet souffre de pathologies plutôt avancées qui relèvent d’avantage de la maison de repos que d’un besoin de greffe de cerveau. En effet COSTA GRAVOS vient ajouter son nom à la liste des groupes joyeusement fêlés qui continue de s’allonger par le biais de formations repoussant régulièrement les limites de la bienséance musicale.

Pas facile de rentrer dans le vif du sujet d’un album totalement délirant qui part un peu dans tous les sens sans jamais tomber réellement dans le chaotique. Si le fil conducteur, le leitmotiv musical de cette galette, s’apparente définitivement à la NWOAHM et à l’inévitable ronflement de guitares accordées dans les chaussettes qui en découle, les GRAVOS brodent tout autour un véritable patchwork qui visite bien des genres pas franchement métalliques. Du reggae au disco, de la country au jazz rock, de l’easy listening à l’électro ambiant, du classique à la musique contemporaine (entendez par-là ces cacophonies d’instruments normalement classiques) COSTA GRAVOS se complaît à brouiller les pistes pour accoucher avec « Sick my Duck » (Mouarf –excusez) d’un véritable ovni totalement déjanté.

Outre la multitude de styles abordés, les GRAVOS ont poussé le vice jusqu’à inclure à leur orchestration des instruments peu familiers dans le métal comme dans le hardcore. Si le saxophone ou le piano ne surprendront pas plus que ça les auditeurs potentiels, que dire des délicats carillons, du banjo dixieland ou encore du pan (ou steeldrum -un instrument à percussions des caraïbes) et de ses rythmiques exotiques? Le plus surprenant dans tout ce joyeux bazar, c’est qu’une certaine alchimie se crée au fil des écoutes et que cette débauche sonore, qui semblait manquer cruellement de cohésion dans les premiers temps, finit par dompter l’ouie pour déboucher sur de purs moments de jubilation. Même si le découpage des titres reste résolument abstrait avec ses 22 pistes pour neuf morceaux, les COSTA GRAVOS abordent chacun des genres avec une certaine réussite, un certain feeling et un humour qui évitent à « Sick my Duck » de sombrer dans l’abstrait.

Outre une brochette de musiciens visiblement chevronnés, COSTA GRAVOS peut également s’enorgueillir des capacités vocales de son chanteur. Dans un registre à situer entre Mike Patton et Jonathan Davis, ce brave garçon domine son sujet d’un bout à l’autre de l’album. Il va sans dire qu’un disque comme celui-ci trouvera un auditoire de choix chez les fans de formations atypiques telles Mr BUNGLE, FANTOMAS, ESTRADASPHERE et autres. Certains ne manqueront pas de trouver stérile la surenchère que COSTA GRAVOS déploie sur les quelques 50 minutes mais sachez tout de même que « Sick my duck » n’est pas de ces albums dont on peut faire le tour rapidement. Les surprises, les richesses musicales de cet ovni méritent d’avantage qu’une écoute distraite pour mieux mesurer l’envergure du propos.

Un disque définitivement atypique à ne pas mettre entre toutes les oreilles.


Rédigé par : Tonton | 16,5/20 | Nb de lectures : 13262