Et moi qui pensais avoir deux ou trois albums de retard ! C’est avec surprise que j’ai en effet constaté qu’en dix ans, les Suédois n’ont sorti que trois albums, celui-ci y compris. Ce n’est déjà pas si mal me direz-vous, mais il s’est passé six ans entre le deuxième et « Newcomers Of Sin », largement assez pour que ce groupe qui pourtant était l’un des pionniers du renouveau thrash à la suédoise passe totalement inaperçu aujourd’hui. Histoire de se compliquer encore un peu la vie, CORPORATION 187 a choisi pour artwork une image très sombre faisant penser à une combinaison des planches du Rorschach, pas le meilleur moyen de se démarquer sur les facings des disquaires.

Si à l’époque de « Subliminal Fear », en 2000, CORPORATION 187 pratiquait un thrash bien sympathique quoi que conventionnel, en 2008 on jurerait écouter un autre groupe ! La mutation amorcée sur « Perfection In Pain » est encore plus avancée, le thrash old school ayant laissé place à un métal plus personnel, moins rapide, basé sur des mélodies dissonantes et un chant écorché qui peuvent rappeler DISBELIEF en moins massif. N’ayant que survolé le précédent opus, la choc fut assez violent pour moi à l’écoute de « Newcomers Of Sin », et ce ne fut pas sans mal que je résistais à l’envie de virer le CD de ma platine pour mettre le dernier DISMEMBER, histoire d’en finir avec toutes ces tergiversations.

Pourtant, petit à petit « Newcomers… » a fait son chemin dans mon esprit obtus, et ce qui me rebutait dans l’album devint ce qui me plaisait le plus : ces dissonances, à la fois dans les riffs et dans les solos, créent une ambiance hostile et sombre soutenue par un jeu de batterie très vivant à défaut d’être aussi rapide qu’avant. Du coup, là où on aurait pu avoir un album glacial et hermétique, on a quelque chose de très émotionnel. Le chant ne perdrait rien à être plus varié, mais il ne pose pas de problème majeur tel qu’il est, avec son côté Shuldiner de la dernière époque (« The Sound Of Perseverance »). On notera quand même quelques lenteurs en milieu de disque, après une première triplette très réussie (« Provoking The Prophet », « Newcomers Of Sin » et « My Sickness »), ce qui ne lui porte pas préjudice pour autant puisque c’est un album qui se ressent plus qu’il ne s’écoute ou s’analyse.

CORPORATION 187 ne signe pas l’album de l’année, mais reconnaissons au groupe la volonté de faire une musique personnelle et de ne pas céder aux sirènes du chant clair ou de tout autre artifice en vogue, qui lui assureraient certainement quelques ventes supplémentaires.


Rédigé par : Dungorpat | 13,5/20 | Nb de lectures : 11358