Allez, rien que pour le fun, qui voudrait s’amuser à compter les points entre Mr Rogga Johansson et Lasse Pyykkö, tous les deux prétendants au même titre de ‘champion toute catégorie du stakhanovisme death-metal’ ? Depuis deux ans environ, ces deux lascars à peine voisins (le premier est en Suède, l’autre en Finlande) se tirent la bourre, histoire de savoir qui réussira à accoucher du plus de projets/groupes possibles. On note pourtant un avantage subtil mais net pour le second : car si comme vous le savez, chers fidèles lecteurs de ma fixette pour tout ce qui allie les mots ‘old-school’ et ‘death-metal’ dans la même phrase, Mr Johansson n’a jamais décroché des premiers albums de GRAVE, Pyykkö a pour lui non seulement l’expérience (il traînait déjà ses basques dans l’underground à la fin des années 80 avec PHLEGETHON) mais aussi un côté plus versatile qui lui fait tâter du doom, du thrash ou même du psyché un peu filou. Sauf que c’est bien dans le métal-de-la-mort sentant volontairement la naphtaline que ces deux autistes se retrouvent. Or histoire d’éviter un incident diplomatique, j’ai comme l’impression qu’ils ont eu leur conférence de Yalta à eux, aboutissant à une sorte d’accord secret, chacun acceptant de se charger de l’héritage de terre natale respective. A Pyykkö donc de ressusciter les fantômes d’ABHORRENCE (pré-AMORPHIS) ou DEMIGOD – décidément pas mal sollicités ces derniers temps avec ASCENDED ou LIE IN RUINS aussi agenouillés devant leurs autels – avec CLAWS.

Or pour être sincère, même si j'adore HOODED MENACE et ACID WITCH, je partais ici avec un chouia d’a priori sur ce disque sur lequel le Finlandais travaille depuis fin 2008. Tout simplement parce que SHROUDED, éphémère projet avec Elektrokutioner de DECREPITAPH qui vient de ressortir ses deux démos sur un CD limité à 100 (!) exemplaires, était déjà passé par-là et CLAWS semblait d’abord suivre un peu trop la même voie. Alors même si effectivement on ne change pas une équipe qui gagne, sans parler de la voix de mutant à trois globes de Pyykkö qui ne varie pas des masses, autant SHROUDED ne dépasse pas le cadre de l’anecdotique, autant ‘Absorbed in the Nethervoid’ écrase tout sur son passage, à condition d’être client de ce style des plus rétrogrades. Alors oui les influences (revendiquées) sont aussi visibles qu’un VRP en petite lingerie à la Mecque mais jamais cette échappée en solitaire ne tombe dans le simple hommage. Plus brutal, plus véloce aussi, non seulement on y patauge en pleine fange mais en plus, l’odeur y est si forte qu’elle picote rapidement les yeux. Et vu que Pyykkö est seul maître à bord et sûr de son but, chaque détail compte. Et que cela soit le son de caisse claire qui semble résonner du fin fond d’un caveau, la pochette morbide signée par l’artiste américain Nev ou les textes (réalisés à 80% par le patron de RAZORBACK records, écurie bien connue des afficionados) pleins de monstres gluants et de ténèbres insondables, tout est fait pour plonger l’auditeur dans une ambiance malsaine et spongieuse. Même les solos, simples et jamais démonstratifs, sont réussis et nous poussent à faire schplouf avec bonheur dans ce marais aux couleurs verdâtres. Et je ne vous parle même pas du 45 tours ‘The Funeral Barge’ sorti sur DOOMENTIA – deux inédits enregistrés un an avant l'album – ou de la version Picture LP (attention ultra-limitée !) de toute B-E-A-U-T-E de cet album qui en rajoutent dans la surenchère old-schoolienne avec classe.

Alors que son créneau RAZORBACK était déjà à la limite du sans-faute en général - comme dans sa collaboration avec Pyykkö qui a déjà donné lieu aux albums tout aussi énormes d’ACID WITCH, VACANT COFFIN ou HOODED MENACE – ‘Absorbed in the Nethervoid’ risque d’apparaître comme l’ultime joyau de sa couronne putride. En tous cas, je suis amoureux.


Rédigé par : Olivier 'Zoltar' Badin | 17/20 | Nb de lectures : 11584