CEREMONY - Rohnert Park (Bridge9/Season Of Mist) - 15/11/2010 @ 08h18
Vous vous en souvenez peut-être (ou pas) mais, perso, je m’étais bien mis la race sur le précédent album de CEREMONY, le définitif « Still Nothing Moves You ». V’là que le petit nouveau débarque et que je me le cale dans les oreilles avec l’excitation de la pucelle devant la mèche de l’amibe Justin Bieber. Je lance la galette dans ma stéréo et là, trente minutes plus tard, la putain de douche froide. Je m’attendais à un « Still Nothing Moves You » bis et j’espérais la lune mais CEREMONY est un groupe unique, insaisissable, qui cultive l’art de ne jamais être là où on l’attend et une fois encore le contre-pied est parfait. Cette fois, le petit dernier tombe à point nommé tellement il pue la rancœur, la colère rentrée et la frustration. Idéal comme bande son pour rythmer les traditionnelles manifs de rentrée. Putain, au lieu de se passer Cali en boucle, Besancenot et Thibault devraient plutôt se défoncer à Rohnert Park, m’est d’avis que les choses bougeraient un peu plus.

Musicalement, CEREMONY délaisse l’animalité reptilienne de son précédent album pour balancer un « Rohnert Park » incroyablement humain. Humain, trop humain même. Fini le fastcore au break pachydermique de « Eraser Making Its Way Its Only Job », le bruitiste « Vagrant », le doom instrumental d’« Overcast », que l’on pouvait trouver sur « Still Nothing Moves You ». Cette fois, on a droit à du pur punk hardcore old school comme on en fait plus aujourd’hui. Un des morceaux phare de l’album s’intitule « Back In '84» et c’est exactement ça. CEREMONY est monté dans sa DeLorean et est reparti 25 ans dans la passé. Tout semble issu du milieu des années 80, les compos, la production, le son, les riffs, absolument tout. Le groupe s’est mis martel en tête de faire revivre la glorieuse époque des balbutiements hardcore et sa cohorte de groupe hargneux, énervés et sacrément rebelles. On pense immédiatement à Black Flag, Negative Approach et Minor Threat pour l’immédiateté et l’urgence présente dans chaque note jouée par le groupe. Ça va droit au but et ça flingue grave. Bim ! Bam ! Boum ! On passe au morceau suivant. Avant d’exposer les entrailles de la bête attardons-nous un peu sur la triplette « Into The Wayside » qui fait office de colonne vertébrale à l’ensemble de l’album. La « part I » nous plonge la tête la première dans la folie de Farrar, hurleur et parolier du combo, qui crache son dégoût à la face du monde « Sick ! I’m Sick ! » braille-t-il dans les oreilles de qui veut bien l’entendre. La « part II » innove avec son solo tout en wah-wah presque heavy metal et ses rythmiques rock amenant un peu de variété tandis que la « part III » clôture « Rohnert Park » sur une touche folk déglinguée, désespérée et sombre. Ces trois titres illustrent à merveille l’ambiance de folie et de déliquescence feutrée dégagée par la musique du groupe influencée, comme le montre la pochette, par la face cachée des suburbs américaines. Ces familles qui, derrière façades proprettes et jardins bien taillés, planquent secrets honteux et autres pensées inavouables. Ces pères en costumes trois pièces qui abusent de leurs gosses et bastonnent leur femme, ces gamins qui sniffent de la colle et jouent à touche pipi avec leur petite voisine.

« Rohnert Park » évoque, outre le hardcore ricain des eighties, le cinéma de Gus Van Sant et Larry Clark. Un cinéma montrant des personnages perdus et en pleine rébellion contre la société mais avant tout contre eux-mêmes. Le combo a parfaitement réussi à saisir cette vibe particulière mêlant rage, colère, insouciance et spleen. La rage illustrée par « Sick », la colère par « M.C.D.F », l’insouciance par « Open Hand » avec son chorus et ses chœurs répétés en boucle alors que le spleen trouve en « The Dolldrums » sa parfaite illustration. Ce titre est d’ailleurs un peu à part et montre toute la versatilité du groupe qui délaisse durant trois minutes le hardcore incendiaire pour la pop torturée et la cold wave de Joy Division. CEREMONY a donc évolué, je l’ai dit, mais la patte du groupe est toujours là et imprègne chaque note et chaque cri de « Rohnert Park ». Ne serait-ce que pour la voix hallucinée et hallucinante de Farrar, son frontman fou, ou la façon très personnelle de mixer la basse et la guitare, comme si elles ne formaient qu’un seul et même instrument, ou encore cette envie de faire ressurgir les fantômes du passé en convoquant les grande figures du genre.

Le précédent album avec son ambiance poisseuse et lourde évoquait les monstres surnaturels et dans une certaines mesure les Grands Anciens, cette fois « Rohnert Park » ouvre les placards et en extrait les cadavres. Les secrets bien cachés, la mouche morte dans l’assiette de soupe. En un sens, cet album est proprement déprimant et triste. Pas bêtement suicidaire comme peuvent l’être certains groupes bien connus, CEREMONY fait plus insidieux, plus fin que ça. Ici l’ambiance pue la résignation, le découragement et l’aliénation quotidienne, comme dans le "Ken Park" de Larry Clarke par exemple. Une forme de déprime bien pire encore, de celle qui pousse les ados à bousiller leurs potes en transformant leur salle de classe en carte de FPS grandeur nature. Une musique double face donc qui, tout à la fois, incite à la révolte et à tout casser tout en imposant une ambiance de folle et déprimante résignation. C'est là, qu'on se rend compte que ce groupe est putain de fortiche.

http://www.ceremonyhc.com/ - 400 visite(s)

Myspace Park - 152 téléchargements


Rédigé par : Seb On Fire | 15/20 | Nb de lectures : 12745




Auteur
Commentaire
AnusFraicheur
Membre enregistré
Posté le: 15/11/2010 à 11h23 - (88895)
ça redonne le sourire!



AnusFraicheur
Membre enregistré
Posté le: 15/11/2010 à 11h23 - (88896)
ça redonne le sourire!



pprcool
Membre enregistré
Posté le: 15/11/2010 à 14h47 - (88909)
où peut-on écouter quelques titres de cet album?

juj
Membre enregistré
Posté le: 15/11/2010 à 18h02 - (88915)
le genre de disques que je vais devoir réécouter de loin en loin avant de rentrer dedans ; perso j'ai surtout pensé à Slapshot, mais c'est pasque mes références en old school sont plus que rachitiques

chavroux
Membre enregistré
Posté le: 24/12/2010 à 01h09 - (90167)
Dommage que j'aime pas les vocals :-( en tant que membre de l'écurie Bridge9 (Have Heart, Champion), je m'étais dis pourquoi pas mais en fait... ça sera un non pour moi. Passe ma route.



Ajouter un commentaire

Pseudo :
Enregistrement Connexion






Niveau de modération : Commentaires non modérés par l'administration du site

Ce commentaire est soumis à la lecture et à l'approbation des modérateurs. S'il ne suit pas les règles suivantes : Pas de pub, pas de lien web, pas d'annonces de concerts, il ne sera pas retenu. Plus d'infos

Proposez News | VS Story | F.A.Q. | Contact | Signaler un Bug | VS Recrute | Mentions Légales | VS-webzine.com

eXTReMe Tracker