Pour ceux qui espéraient retrouver quelques maigres réminiscences de Mihai Edrisch avec "Misanthrope(s)", le mot d'ordre ne laissera aucune ambiguïté: CUT YOUR MÈCHE AND WORSHIP SATAN. Les germes de black metal déjà décelés dans leur postchaoticblahblahsludgecore grouillent désormais. A peine un peu plus d'un an s'est écoulé depuis l'hallucinant pavé "Nihiliste(s)", le profond arrière-goût d'amertume commençait à peine à s'estomper, et voilà que les Lyonnais remettent le couvert, en montant au passage d'un bon cran niveau noirceur et extrémisme sonore.

Pourtant, la première écoute complète ne rend pas aussi autiste qu'escompté, le chemin ayant déjà été violemment déblayé avec la pelleteuse "Nihiliste(s)". Les riffs jouant sur les mêmes ficelles (cordes, oui...) qu'auparavant, on y retrouve des plans fleurant un peu trop la consanguinité, et un titre comme "Comme pour leurrer les regards et cette odeur de cadavre" s'enlise sévèrement faute de variations. Ah oui, vous venez peut-être de le constater, les noms des chansons claquent moins au vent qu'avant, trop... théâtraux? Bref, ces griefs mis de côté, reconnaissons que la rouste est EXTRÊMEMENT sévère.

Puisque "Misanthrope(s)" sonne comme une version 2.0 de "Nihiliste(s)". Plus peaufinés, les titres perdent en violence sourde et aveugle ce qu'ils gagnent en relief, servis par un son plus ample et profond que jamais. Un monstrueux maëlstrom de guitares qui résonnent à l'infini, couplé à un océan de cymbales et un son de batterie enregistré dans le Koursk. La nébuleuse Celeste se renouvelle un minimum en attirant dans son champ magnétique quelques nouveaux éléments, de l'arrangement limite sympho pour densifier encore plus l'ensemble façon In/Humanity, des ralentissements post- plus développés, et une touche schwarze metal evilisante plus présente que jamais.

En résulte des décélérations de tempos majestueuses, et des accélérations aliénantes qui viendront vriller sournoisement les tympans, toujours dans la veine de ce que proposait le early Shora, avec cette âpreté extrême héritée de l'école brêmoise (Rubbish Heap, Acme...); le tout transposé dans un contexte über metôl. Les hurlements à bout de souffle, plus intelligibles qu'avant, se jettent sur ta carotide, et les écoutes répétées à très haut volume garantissent un essorage de cerveau d'une efficacité rare. En particulier dans ces ruades punitives proprement dantesques ("Toucher ce vide béant attise ma fascination", "A défaut de te jeter sur ta progéniture"), véhiculant un sentiment de panique à t'en faire clamser le palpitant.

Et, la forme étant encore une fois du niveau du fond, saluons bien bas à la fois textes (QUILATTENTTOUJOURSAUTANT), artwork et démarche (album en libre D/L sur leur site). Celeste est un groupe rare, de ceux qui possèdent un son et une personnalité immédiatement reconnaissable, apportant une véritable bouffée d'air au sein de scènes sclérosées. La classe internationale quoi. Pas plus aéré, parce qu'il faut pas déconner, mais plus anguleux qu'auparavant, "Misanthrope(s)" vient confirmer leur statut de combo déjà incontournable, et les voit s'imposer en force grâce au credo "ça passe ou ça casse". Impitoyable(s).


Rédigé par : Crown_Me | 15,5/20 | Nb de lectures : 12821