Alors qu’on nous annonçait des débuts chez Relapse sous la forme d’un split EP avec BURNT BY THE SUN, c’est finalement l’album de CAR BOMB qui inaugure cette collaboration par un premier album plus que percutant.

On avait déjà une vague idée de ce qui nous attendait avec le premier mini trois titres concocté courant 2005 qui avait vu s’éparpiller plus d’une cervelle sur son passage. Schizophrénie math-core émaillée de noise-core et de free jazz sous acide, influences partagées entre les rythmiques écrasantes d’un MESHUGGAH, les spectaculaires délires d’un DILLINGER et la furie brute d’un CONVERGE, CAR BOMB avait déjà tous les éléments en main pour créer la surprise et allonger la liste de ses émules.

La seule interrogation qui subsistait était celle de savoir si la recette tiendrait le cap d’un album sans s’essouffler au bout du quart d’heure ou si le groupe aurait suffisamment de moelle pour nous pondre d’autres titres déjantés du même calibre que ceux du mini. Et franchement, ce n’était pas forcément gagné d’avance même si l’annonce de « Centralia » et la mise en ligne d’un nouveau titre purement jouissif sur leur page MySpace exhaussaient nos espoirs les plus fous. C’est donc sans réelle surprise que CAR BOMB déboule avec un premier album aux allures de future référence pour ce qui se fera de plus barré dans les quelques années à venir.

Thèmes arc-boutés sur des tempos étranges, contorsions rythmiques riches de puissance, juxtaposition de purs chaos pourtant méthodiques, collision des riffs déstructurés et des spirales faussement irraisonnées. Les idées déployées par CAR BOMB sur ce disque s’entrechoquent comme les sentiments que suscite leur musique à la première écoute. Amputant tous repères rythmiques, annihilant les lignes mélodiques, « Centralia » nous plonge dans la tourmente d’une dimension ignorant les fondements binaires de la musique.

Si l’on retrouve avec délice les trois morceaux du premier mini, familiers malgré de nettes modifications, il faut bien se rendre à l’évidence que pour les titres plus récents, CAR BOMB s’est quelque peu éloigné de ses inspirateurs pour nous entraîner dans les replis les plus sombres et inavouables de l’esprit. Et nous immerge dans l’atmosphère lugubre d’une musique qui force la réflexion. Difficile de savoir à la première écoute si l’on doit crier au génie ou tout simplement se sentir révulsé devant l’aspect abscons et abstrait d’un concept poussé dans ses derniers retranchements.

On restera coi devant l’assaut monstrueux des rythmiques, devant les déchirements sonores ou les arpèges arrachés par un jeu de guitares absolument bluffant et novateur, devant les distorsions exercées sur les instruments ou sur le chant. On a forcément le sentiment que ça part dans tous les sens, que les intentions du groupe sont décidément bien obscures ou totalement élitistes. Pourtant, ce carambolage sonore est miraculeusement consolidé par des vocaux variés et purement prodigieux. On imagine sans peine le travail imposant qui a été déployé pour associer aussi étroitement une musique plus que perturbée et des lignes de chants déployant tout ce qui peut se trouver entre les chuchotements et les braillements à la limite de la syncope.

Du côté de la production, c’est également un carton plein. Le mixage écorche littéralement par le côté particulièrement cru des voix. Pour les instruments, c’est plutôt l’inverse avec un son clair et terriblement massif accentuant aussi bien les basses que le vrillement des guitares.

« Centralia » s’impose donc comme l’un des albums qui marquera cette année 2007 et il est fort à parier que ces p’tits gars de Long Island nous réservent encore bien des surprises pour les mois et années à venir. Je suis désormais bien content de constater que mon vieux pif dispose encore, par moment, d’un peu de flaire.

Une véritable tuerie ce truc…


Rédigé par : Tonton | 18/20 | Nb de lectures : 13158