Petite leçon d'histoire/géo pour débuter: BOKOR est un lieu fantomatique situé au Cambodge, érigé dans les années 20 par des colons français, lesquels avaient bati un casino, un hôtel, une église, et où venaient se reposer les Khmers rouges haut placés ou autres hommes d'affaires chinois de passage. Le lieu, aujourd'hui abandonné, est d'une beauté post-apocalyptique surprenante.
Ceci étant dit, parlons plutôt de ce qui nous intéresse vraiment ici, à savoir la musique. Et c'est qu'il serait dommage de passer ce combo sous silence, en effet, sur ce "Anomia1", les Suédois s'évertuent à aller à la rencontre d'horizons musicaux diversifiés, et on ne peut être qu'en accord avec la biographie du groupe qui nous annonce que BOKOR est destiné aux fans de formations aussi diverses et talentueuses que MASTODON, OPETH, TOOL, PORCUPINE TREE et ANATHEMA. Autant ma petite expérience m'a montré que les bios fournies par les labels sont généralement de l'encensement gratuit et/ou un ramassis d'arguments bassement vendeurs, autant ici on ne peut que se sentir en parfaite adéquation avec ce descriptif. En effet, dès le titre d'ouverture, nous voilà plongés dans une ambiance rappelant autant MASTODON que SOUNDGARDEN; lourdeur, lyrisme sombre et voix écorchée à tous les étages font de ce premier morceau une excellente entrée en matière à l'univers de BOKOR.
Mais attention, lorsqu'on parle ici d'influences, soulignons quand même qu'elles sont parfaitement digérées, bercées par des structures atypiques et limite progressives, où on s'extasie devant un passage doucereux, pour être ensuite assommés par de la rage pure, écrasés par la lourdeur des riffs... L'exemple le plus flagrant est encore ce "best trip" de bravoure, hybride de metal abrasif, dévoilant un refrain tout en nuances et très accrocheur.
BOKOR doit aussi beaucoup à TOOL pour ce son de basse énorme, ses mélodies vocales prenantes et tortueuses, comme sur les brûlants "The island of St:Menée" ou "Avert your eyes".
Ne se limitant à aucun style, les Suédois empruntent quelques sonorités orientalisantes qui rendent un titre comme "Covert into" et ses vocaux poignants encore plus profond et passionnant.
Mais LA grosse pièce de cet album est sans aucun doute ce "Migrating" rampant, flirtant avec le quart d'heure, où riffs tordus rappelant les dernières oeuvres de PORUPINE TREE côtoient des passages aériens magnifiques et où la lassitude ne se fait pas ressentir une seule seconde.
En résumé, voilà ici la première surprise de l'année de la part d'un groupe encore méconnu, mais qui ne devrait pas le rester très longtemps, dont le seul défaut de sa première offrande discographique, son homogénéité, pourrait presque passer pour une qualité.
Vous aimez les groupes cités plus haut, sans pour autant crier au plagiat? Vous appréciez les combos originaux et dont les albums nécessitent plus d'une écoute attentive pour être intégrés et compris? Vous ne jurez que par les riffs sombres et plombés sans pour autant dénigrer les ambiances? Alors jetez-vous sur ce "Anomia1" d'excellente facture qui fait déjà de BOKOR un sérieux prétendant à la première division.


Rédigé par : Thortyr | 15.5/20 | Nb de lectures : 12304