Alors, voyons ma liste. Chinese Democracy, c'est fait. L'album de Kalisia, c'est fait aussi. Il me reste quoi dans les arlésiennes du metal? Ah ben voilà, le Memoria Vetusta II de Blut Aus Nord. Ouh p'tain, il est sorti aussi. Je ne sais pas si c'est l'effet de la crise ou un alignement des étoiles qui seraient propices à faire pousser les cheveux, mais voilà que des albums que les fans n'espéraient même plus voient le jour avant leur mort. Dingue.

Et il y aura eu du fantasme et de l'attente sur le second volet de Memoria Vetusta, annoncé presque juste après la sortie du premier. Un temps annoncé comme un concept barré très jazz, le bidule a disparu dans l'espace-temps, pendant une décennie. Au fil des rumeurs, on entendait reparler du zinbrec, à ricanement couvert. On en trouvait même une annonce fantôme sur un site de vente (Price pour ne pas le nommer). Mais, en réalité, Blut Aus Nord était trop occupé à explorer d'autres univers musicaux et cette suite ne semblait vraiment plus d'actualité. Et puis, Vindsval a commencé à lâcher le morceau dans des interviews dès 2006, annonce confirmée par Candlelight. Une horde de fans hystériques s'est masturbée simultanément provoquant un battement d'ailes de papillon au Japon. On n'osait rêver plus avant. Mais début 2008, BAN annonçait le début de l'écriture et, un an plus tard, le voilà dans les échoppes. Douze ans après le premier volet. Très paradoxalement, que le temps passe vite et que l'attente fut longue.

Avant même l'écoute, il faut se demander ce qu'on attend de Memoria Vetusta II. Trop d'espoirs ne peuvent qu'entrainer la déception, tellement le premier volet représente un choc tellurique conséquent (au moins, dans mon univers personnel). Pour une fois, le petit jeune a de la chance. Lui qui vient de découvrir BAN il y a deux mois et de s'enfiler tous les albums dans son igode, il n'en attend rien de cet album. Au pire, il s'en foutra ou dira que c'est de la merde, mais il n'encourra pas une grosse déception frustrée, l'enfoiré (oui, jeune, tu es un enfoiré). Allez, on respire et on ouvre grand ses Shaka... heu ses shakras.

Vindsval ne s'en cache pas: MoRT a été un album difficile pour BAN, qui y a consumé toute son énergie. Le brûlot noir et opaque verra peut-être une suite un jour. Mais après avoir y atteint ses plus sombres rivages, Vindsval préfère marquer une pause sur les expérimentations morbides. Et, depuis sa sortie, il se consacre à des titres plus mélodiques. Après Odinist qui commençait à baliser le terrain, le moment était venu pour Vindsval de s'attaquer à la suite de Memoria Vetusta. Il était prêt et a assumé l'intégralité de la composition dans un retour à un black simple et sans artifices, mais néanmoins épique et incitant au voyage.

Dès l'intro de claviers, les plus anciens ne pourront que faire un bond de douze ans en arrière. Les premières minutes de l'album sont révélatrices d'un retour aux sources, avec un black gorgé de mélodies qui se déroulent sur de longues mesures. Comme dans le temps. Si l'aspect glacial et haineux du premier opus n'est plus de mise avec une production beaucoup plus claire, les huit titres (hors intro) sont atmosphériques et incitent instamment à l'évasion, comme le faisaient ceux du glorieux aïeul. Clairement, les deux Memoria Vetusta sont différents. Même si la manière de composer de longs riffs reste la même, même si l'univers sonore du groupe n'est pas bouleversé, les émotions qu'appellent ce second volume ne sont pas celles du premier. Là où le premier volet nous transportait dans des steppes glacées, Memoria Vetusta II nous emmène plus certainement dans des forêts enneigées, mais voyage vers le Nord il y a.

Complétés par des voix claires (trop discrètes à mon goût) et de sobres nappes de synthé, les thèmes mélodiques s'enchainent sans retour possible. Les titres ne font qu'un bloc et emportent l'auditeur loin, très loin. Et personnellement, je n'en demandais pas plus. Je voulais retrouver la magie du premier opus, qui ne s'embarrassait pas de circonvolutions musicales et restait dans un esprit proche de Bathory. Le pari est réussi, même si une production plus âpre n'aurait pu que m'enchanter davantage, même si une moindre redondance des riffs et des patterns aurait vraiment rendu l'album plus intense. Les minutes s'écoulent à une vitesse folle, pour peu qu'on parvienne à se laisser porter par les thèmes développés et estampillés BAN pur jus.

La haine froide a cédé la place à la douce mélancolie de temps révolus, voire de temps fantastiques qui n'ont jamais vraiment existé. Le seul défaut de ce Memoria Vetusta II est de se frotter frontalement au premier volume, ce qui rend toute critique "objective" délicate.




Rédigé par : Prince de Lu | 16,5/20 | Nb de lectures : 14699