La Pologne est un musée à ciel ouvert. Son architecture et ses demoiselles –canons mais farouches- sont les premiers exemples de cette riche finesse. Question métal, c’est tout l’inverse. Cette nation est grosse productrice de blast bas du front, de satanisme du dimanche, de prod’ surgonflées, et de look de gros méchant… c’est-à-dire tout ce que tu ne trouveras pas chez Blindead. Pourtant, avec l’ancien guitariste de Behemoth et l’actuel chanteur de Yattering à la basse, ce n’était pas gagné d’avance.

L’EP “Impulse” sorti en 2009 montrait un sextet atypique dans son approche du rythme qu’une chanson doit avoir et de ses sonorités, rendant la musique quelque peu difficile à décrire. Peu de changements avec "Affliction XXIX II MXM", où l’on oscille toujours entre métal expérimental, alternatif, ambiant même, bourré de nappes de synthé ou d’autres instruments (l’utilisation de la trompette est bien sympa), mais avec une base propre au ‘sludge atmosphérique’. Et c’est justement là où le changement intervient. Le peu de sludge atmostpherique décelable sur l’EP s’est davantage réduit aujourd’hui. La prod’ quant à elle délivre un son où je me suis tout de suite cru en terre suisse, pas dans le style pratiqué, mais plutôt dans ces sonorités métal si particulières, ce grain qu’a chaque instrument et la finesse de leur métal racé et insidieux. Une belle voix chaude et plaintive parsème les 7 titres avec une certaine maîtrise du chant anglais où l’aczscent de Patryk Zwolinski passe vraiment bien. Des morceaux de 8min en moyenne travaillant sur plusieurs tableaux, avec la notion de couplet/refrain qui n’existe pas, on se retrouve un peu perdu, sans trop de point d’accroche, sans même savoir quel type de métal se développe. Beaucoup de sons arrivent à droite à gauche sans crier gare, majoritairement bien trouvé. Et l’album devient un voyage...
Ce troisième opus des Polonais est vraiment empreint de mélancolie et à du cachet. Parfait pour décrire un rêve: aérien, nébuleux avec quelques soubresauts. J’avoue aimer l’écouter allongé, la couverture sous le menton, et cette production planante remplie à merveille son rôle. Malheureusement, je n’ai jamais pu aller au bout du CD d’une traite dans ces circonstances. Et c’est une alternative appréciable si ta copine refuse Como Muertos pour s’endormir.

Franchement envoutant et personnel, je ne suis cependant pas à quatre pattes devant cette galette. Cette balade précieuse et délicate apporte son lot de belles émotions mais quelques défauts rageant me sautent aux oreilles. "Affliction XXIX II MXM" est trop en retenue, on a envie que ça pète un peu plus et l’album a du mal à décoller. Tu sens qu’ils en ont sous le pied, mais l’explosion tant attendu ne vient pas, jamais. On appelle ça la maturité, la paternité, ou je ne sais quoi, mais le groupe ne hausse que trop rarement le ton. J’ai aussi cette impression désagréable que plus les écoutes passent, moins je n’en retiens quelque chose, et ce sentiment me colle à la peau à chaque fois que je démarre son écoute. Ça a du cachet, mais pas de charisme. Ajoute à cela quelques longueurs, et la boucle est bouclée, j’ai détruit tes espérances.

Indispensable ou anecdotique, je ne sais toujours pas. Ce n’est pas du métal direct et mémorisable facilement, il te faudra donc être patient. Critiquer cet album est relativement injuste car il diffère des productions actuelles et apporte un plus dans ce paysage musical métal. Cependant, un arrière-goût reste en bouche m’empêchant de m’extasier.
BO parfaite cependant pour une balade dans Cracovie le soir tombant, les rues recouvertes de neige, quelques vodkas dans le nez, et la vision de blondes au charme déstabilisant qui t’accompagnent dans tes déambulations. Délicat, cotonneux et aérien vous dis-je.


Rédigé par : Bras Cassé | 14/20 | Nb de lectures : 13781