Parce que je l’aime ce gratteux je vais d’abord balancer sur lui. A celui qui m’a fait vibrer quand j’étais ados sur des albums comme « No rest for the wicked » et « No more tears » je reprochais essentiellement de composer et d’enregistrer ses albums trop vite sans laisser mûrir ses compos ; je lui reprochais également d’avoir une production parfois limite, de boire trop de bière et de cracher partout sur scène (cf Live à Budokan d’Ozzy, c’est vrai quoi, c’est dégueulasse) ! Je ne sais pas ce qu’il en est des deux derniers points mais que de progrès sur les deux premiers ! Le tournant avait déjà été amorcé sur le disque « The blessed hellride », ce coup ci la machine B.L.S. est lancée sur les routes tel un monster truck américain, et il va être difficile de l’arrêter.

Déjà, comme la tradition Ozzyenne l’exige l’album débute par un morceau qui botte les fesses avec un sens du groove indéniable « Fire it up ». En trois secondes on se rend compte que le père Zakk est inspiré, qu’il a enfin la production qu’il mérite et que cet album sera une déclaration d’amour au riff bien grassouillet et au solo limpide : quelle classe sur « Suicide Messiah ». Le tour de force est de proposer des solos d’une fluidité exemplaire et d’un haut niveau technique sans que cela paraisse démonstratif, le talent en somme. Le gratteux qui jadis avait un physique de jeune premier s’est au fil du temps transformé en Bûcheron mais a gardé au niveau musical un feeling et une approche instrumentale qui le rendent facilement identifiable. Tout comme cette voix, légèrement nasillarde au ton chaud et profond qui s’enrage le temps de quelques refrains bien accrocheurs. Cédant à ses amours de toujours ce « Mafia » fleure bon le Hard Rock des bars enfumés, celui d’inspiration hard rock des seventies, « Been a long time » aurait pu figurer sur un disque du Sab’. Le tout sonne pourtant de façon actuelle, sévèrement burnés les riffs ont de forts relents de bière et de testostérone qui les rendent jouissifs lorsque l’ampli est au maximum : « Forever down » par exemple. On le sait, Zakk enregistre les albums pour avoir une bonne raison de partir sur les routes, dans le but avoué de « botter des culs ». En tout cas, les culs dont il est question n’auront aucun mal à se remuer sur des titres comme « you must be blind» ; l’inquiétant « Death march » ; « Say that you will » et j’en passe. Les grosses rythmiques sont taillées pour le déboîtement des cervicales et pour faire chauffer les murs d’amplis Marshall. Mais au milieu de cette avalanche de riffs et de solos Zakk se rappelle qu’il avait quitté Ozzy pour composer le quasi acoustique « Book of shadows » et plus récemment « Hangover music vol. VI ». Malgré les apparences le bûcheron est aussi un homme sensible, du coup on retrouve en cinquième position une petite ballade avec une intro au piano et une Gibson qui pleure en arrière plan ; et oui, il y a aussi des femmes dans les bars, ne serait ce pas là l’occasion d’aller les enlacer tendrement ? Faut se dépêcher parce que c’est pas sur « you must be blind » que l’enlacement pourra se faire a moins d’aimer les slows violents. Si vous loupez le coche vous pourrez toutefois vous rattraper à la fin de l’album puisque Zakk nous prouve une dernière fois, histoire de conclure, qu’il maîtrise aussi bien l’électrique que l’acoustique.

L’homme se révèle être un artiste complet, aussi parfait dans le rôle de fidèle bras droit au côté d’Ozzy (aux fraises depuis longtemps) que dans le rôle de leader au sein de Black Label Society. Guitar Heroe au sens noble, loin des gammes néo classique de Yngwie, loin de l’innovation d’un Steve Vai, loin du style Satriani il mérite pourtant pleinement ce qualificatif. Alors OK, B.L.S. n’a rien inventé niveau style et c’est la le seul reproche qu’on pourrait formuler (ainsi que le choix des covers même si ici il y a un léger mieux, mais vraiment léger alors). Du bon gros Hard Rock qui tache, ni plus ni moins, mais quel pied quand on écoute ça à fond les ballons ! Zakk s’affirme en tant que compositeur et chanteur d’albums en albums et se trace à coup de riffs une autoroute sur laquelle il ira loin, on l’espère.


Rédigé par : Dark Tranquilou | 17/20 | Nb de lectures : 12835