Il est quasiment impossible de nos jours d'être "culte" et de ne pas se retrouver à un moment où à un autre réédité et livré aux mains moites et cupides des collectionneurs de tout poil. Comment vouliez-vous sincèrement que le sold-out depuis le Déluge "Promethean Gift" ne retrouve pas un jour le chemin des étals alors que le groupe a compté dans ses rangs des membres de Beherit? Sans être aucunement un side-project de Beherith, Black Crucifixion en est un contemporain mené par le vocaliste Forn et le guitariste Blacksoul (et des gars de Beherit si vous avez bien suivi).

En 1992, le groupe sort "The Fallen One of Flames", tape limitée à 250 exemplaires (dont les 50 premiers exemplaires comptent un titre exclusif. Si c'est pas super UG collector of death ça, je sais pas ce qu'il vous faut). La bestiole a connu depuis deux rééditions en MCD en 2001 et 2005, cette dernière étant remasterisée. Après ses débuts black metal, BC, tout comme Beherit, considère dès 1993 que le BM est mort et que la scène est pleine de trends. Il est grand temps d'abandonner le rimmel et d'évoluer. Alors que Beherit s'égare dans l'électro, Black Crucifixion travaille sur son premier mini "Promethean Gift" qui voit le jour en 1993. Suite à ce premier méfait, dont je vais vous dévoiler les arcanes plus bas, BC met en chantier un premier album intitulé "Faustian Dream". Mais lassés de la scène autour d'eux (toujours ces vilains trends), les membres enterrent le groupe. "Faustian Dream" ne sortira finalement qu'en 2006 chez Soulseller Records, dans une indifférence polie pour cette vieille garde qui a encore changé de style (et j'espère ne pas le chroniquer un jour celui-ci).

Revenons-en à "Promethean Gift" qui tente désormais une percée hors du cercle des tape-traders de l'époque grâce aux yeux pétillants de gourmandise de Soulseller Records. Je pourrais vous demander l'intérêt de rééditer une sortie qui a été volontairement limitée par le groupe car elle n'était pas destinée aux masses. Mais, je ne le ferai pas pour ne pas entrer dans un débat stérile. Donc reprenons…

Alors que Beherit s'en allait vaquer dans l'électro, vous vous demandez probablement dans quelle orientation musicale absolument géniale et unique sont partis les grands maîtres de Black Crucifixion. Non? Hé bien, je vous le dis quand même. BC a opté pour une orientation dark metal. Hé oui, ces grands esthètes pompeux, dandys de l'extrême ô combien créatifs, se sont contentés de repomper sans vergogne ce que Tiamat proposait depuis déjà trois albums. Fichtre, ça c'est de l'audace! OK, je l'avoue: mon ton est aussi moqueur que peut être prétentieuse la biographie du groupe (bouh, ils ont un site officiel). C'est de bonne guerre.

Blague à part, j'ai été assez surpris et très déçu de la ressemblance frappante entre ce "Promethean Gift" et les albums de Tiamat de ma jeunesse. Au détail près que Tiamat avait lâché l'affaire de l'underground intégriste et avait signé depuis un moment chez Century Media pour se donner les moyens de ses ambitions, là où BC se contente d'un MCD enregistré sur le vif et limite sur le gaz. Attendez-vous donc à l'équivalent par moments d'un enregistrement de répétitions, les huit titres étant balancés live et conservés dans le formol avec tous les pains (et dieu sait que le batteur a un art infini de la baguette moulée dans la plus grande tradition Beherit).

Et puis Tiamat avait l'avantage d'explorer et de mettre en place un univers cohérent et décalé là où BC plaque des riffs métal faiblichons sans grande inspiration quand on compare à leur référence (avouée, qui plus est). Hormis l'éponyme "Promethean Gift" qui est déjà bien redondant, rien ne transpire des quatre premiers morceaux. Ces titres, tous issus du MCD d'origine, sont frappés de la monotonie ennuyeuse que BC se targue d'éviter. A cela, Soulseller ajoute cash un titre studio de 1996 qui tient plus de l'interlude qu'autre chose, deux titres démos de 1991 et 1993 (faites gaffe au volume dans le casque) et un titre live de 1993 (qui est le dernier du MCD). On apprécie la générosité et la dévotion du label hollandais de passer ses heures de bureau à fouiller ses fonds de tiroir pour nous dégoter ces archives.

A l'instar des rééditions des premiers Abruptum, ce "Promethean Gift" a un intérêt purement archéologique pour les die-hard fans des premières heures. Pour ma part, j'espère surtout avoir perdu le moins de monde possible au long de cette chronique. De là à dire qu'on s'excite depuis une demi-heure pour pas grand-chose, il n'y a qu'un pas…


Rédigé par : Prince de Lu | Réédition/ | Nb de lectures : 11172