Après un EP posant les bases d’un style à la gloire de l’annihilation musicale, et un premier album sans compromis et violemment « jusqu’au-boutiste », les Québécois n’ont pas mis d’eau dans leur vin, pas plus qu’ils n’ont cédé aux modes DeathCore-iennes actuelles.
Évoluant dans un style que l’on pourrait qualifier de Brutal Death (très) Technique, Beneath The Massacre se paye le luxe, en cette fin d’année 2008, de creuser encore un peu plus l’abcès qu’ils avaient déjà bien foré en 2007.

D’emblée, dans un élan altruiste, je préfère autant éviter à certains lecteurs de perdre leur temps : ceux qui n’accrochent absolument pas au Brutal Death Technique et violent, et pour qui les déferlantes de blasts, de riffs alambiqués et de growls, entraînent au mieux un baillement, peuvent d’ores et déjà retourner vaquer à leurs occupations : ils n’accrocheront pas à cette deuxième offrande de Beneath The Massacre... Car ces virtuoses québécois officient dans un style ultra technique et ultra bourrin, et la formule de la potion magique n’a pas changée en 1 an et demi !

En revanche, à toutes celles et ceux qui affectionnent tout particulièrement ce style musical, mais qui n’ont pas appréciés le premier album des Québécois, car le trouvaient (en vrac, choisir le terme adéquate) trop bourrin, trop technique, sans feeling, trop linéaire :
--> Lisez tout de même ce qui suit, car si les Beneath The Massacre ont conservés leur style bien reconnaissable, ils ont tout de même réussi le prodige de faire évoluer leurs mélopées, tout en conservant rapidité d’exécution et brutalité.

S’apparentant à une copulation musicale entre la technicité d’un Necrophagist, le bourrinage intensif d’un Origin et la puissance de frappe d’un Despised Icon (auquel on pourrait aussi ajouter un soupçon de Cryptopsy, époque « None... / Whisper ... »), Beneath The Massacre fait honneur au Metal Extrême et à sa ramification BrutalDeath-ienne.
Si vous aimez les blasts supersoniques, les riffs bien techniques et les tempos excessivement élevés (et avec quelques ralentissements bien sentis pour relever l’ensemble), nul doute que « Mechanics of Dysfunction » a certainement déjà effleuré (ou explosé, cela dépend du degré d’affinité) vos conduits auditifs.
Pas d’inquiétudes, « Dystopia » ne vous prendra pas en traitre, puisqu’il perpétue le style façonné depuis le EP « Evidence of Inequity », et nous offre une nouvelle décharge de blast, de furie ultra-technique et de violence.

Mais, et c’est là que survient le petit plus du chef, ce « Dystopia » est indéniablement plus travaillé et abouti que son prédécesseur.

Car, là où le premier opus avait un peu de mal à passer et pouvait provoquer quelques problèmes de digestion, ce petit frère est quant à lui bien plus « fluide » et bien moins linéaire.
Peut-être est-ce l’expérience (tournées avec Behemoth, Decapitated, Necrophagist entre autre, déjà un EP et un album au compteur), ou peut-être tout simplement la maturité ; mais en tout cas, les riffs, squelette des compos du groupe, sont bien plus mélodiques et mélodieux, tout en restant acérés et parfaitement adaptés aux tempos relevés et à la violence dévastatrice (comme par exemple sur les titres « Bitter » et « No Future », avec leurs soli mélodiquement brutaux et efficaces).
Les passages plus calmes, types « Mosh-parts » améliorées, sont bien plus percutants et efficaces, et parallèlement mieux construits et moins écœurants ; le titre « Reign Of Terror » en étant l’un des meilleurs exemples.

« Dystopia » est toujours extrêmement technique et violent, mais tout en étant plus accrocheur, plus efficace ; on ressort de l’écoute de cet album sans mal au crâne (contrairement à certains effets secondaires de « Mechanics of Dysfunction »), mais avec un peu plus de bave aux commissures des lèvres.
Le chanteur lyrique du groupe, Eliot Desgagnés, éructe inlassablement ses growls ultra gutturaux dans un registre uniforme, mais qui collent toujours aussi bien à la furie de « Dystopia ».

De nombreux soli (et quelques solos) inspirés et bien évidemment très techniques et travaillés parsèment les 11 titres (dont un interlude de 10 secondes) de cet album ; et, alliés aux différentes variations de tempo, ils apportent un surplus d’âme tout en renforçant l’agressivité des compos.
Et l’appréciation globale s’en ressent, puisqu’on se trouve désormais face à des compos plus accrocheuses, où la folie technique des membres est au service de la brutalité ET de l’efficacité, et non juste là pour bastonner non-stop.

Toujours chez Prosthetic, les Beneath The Massacre ont à nouveau eu droit, pour façonner leur son, à une équipe de connaisseurs : Yannick St-Amand (Despised Icon, Neuraxis,...) derrière la console, Jason Suecof (The Black Dahlia Murder, Chimaira, All That Remains,...) aux commandes du mixage, et Alan Douches (Mastodon, Hatebreed, The Dillinger Escape Plan, Converge,...) au mastering.
De ce fait, « Dystopia » nous assomme avec un véritable mur de son pachydermique qui s’abat sur nos petites têtes. La prod’ est claire et puissante à la fois, certes bien calibré (et formatée), mais parfaitement adaptée aux tournures techniques et brutales de cet opus.

Concernant la thématique de cet album, une Dystopie étant, notamment d’un point de vue littéraire, l’opposé d’une Utopie, il va de soit que les textes sont relativement orientés vers cette vision du monde « future » assez pessimiste (et réaliste ?). Ils abordent entre autres les thèmes du capitalisme, de l’avancée technologique, de la politique, mais tout en intégrant ces sujets dans l’évolution et l’avenir de l’humanité, rendant cette dystopie bien proche de notre société actuelle.

Pour résumer, sur « Mechanics of Dysfunction », ça lattait sévère, mais au fond, c’était assez linéaire, il n’y avait pas vraiment d’âme ; sur « Dystopia », ça latte toujours, mais le ressenti est bien différent, et on ressent un vrai feeling, tant dans les riffs que dans les compos.
Sur « Mechanics of Dysfunction », les riffs étaient juste là pour participer à l’orgie de brutalité ; sur « Dystopia », les riffs sont bien plus travaillés et expressifs, et rendent l’ensemble bien plus accrocheur.
« Mechanics of Dysfunction » était une intense ode à la brutalité mécanique et à la démonstration technique ; « Dystopia » ... aussi ... mais en plus réussi !


Si je devais prendre comme référentiel la note attribuée par Tonton sur « Mechanics of Dysfunction » (16/20), et étant donné que « Dystopia » dénote une vraie évolution, je devrais mettre un 18/20 ; mais étant donné que pour moi, « Mechanics of Dysfunction » était « juste » bon, ce « Dystopia » récolte un bon 16/20.
Mais, ne vous fiez pas à cette note, prenez plutôt le temps d’écouter et de vous forger votre propre avis, qui vaudra toujours plus qu’une somme ou une moyenne de notes...

À noter la présence sur cet album d’un titre du EP « Evidence of Inequity » : « Never more », qui a été entièrement réenregistré pour « Dystopia ».


Rédigé par : ..::Ju::.. | 16/20 | Nb de lectures : 12114