Rien n’a vraiment changé depuis l’ancien temps. Oh bien sûr la Nature change au regard des hommes, mais en fait elle ne fait guère que renvoyer avec malice l’écho pathétique de leur passage. La Nature, elle, aura tout loisir de recomposer son visage à la mort des hommes, mais entre temps certains hommes seront parvenus par la compréhension et le respect à s’approprier un peu de son essence permanente. Peu importe que vous le ressortiez dans six mois, deux ans ou dix ans d’ici, un CD de Belenos ne vieillit pas ; comme la pierre, sculptée par les âges vers sa forme mature, il porte les stigmates du temps comme les germes vivaces du souvenir – tout comme son cycle de vie n’est aucunement influencé par le son, les mœurs ou les idiomes stylistiques propres à une période délimitée. On ne peut pas en dire autant de n’importe quel ensemble musical. « L’Ancien Temps » compile sur deux CD les démos préalables à l’album 2001 « Errances Oniriques ». Il s’agit de « Notre Amour Eternel » (1996) et « Triste Pensée » (1997). La plume de Nathalie Leblanc leur offrait des textes volontaires à la balance lyrique très personnelle, la guitare et l’instinct de composition brut de Loïc Cellier une âme vibrante qui s’épanchait dans un black metal cousin de Burzum : atmosphérique, cinglant, orageux et farouche comme l’ermite aux confins de sa forêt. Bien sûr Belenos a pris de la hauteur depuis, enrichi son vocabulaire et suivi d’autres chemins, assignant à ses riffs des responsabilités mélodiques plus pointues, élargissant le terrain d’expression de l’acoustique et célébrant plus ouvertement les valeurs de l’héritage celtique – effaçant du même coup le plus gros des traits d’influence scandinave. Mais au fond des choses, le cœur de ce qui fait la griffe Belenos est resté inchangé, c’est toujours ce même manteau d’écorce qui recouvre les guitares, c’est toujours cette même sueur révoltée qui ruisselle à la surface de l’édifice. Ecouter « L’Ancien Temps » est bien plus qu’une session de rattrapage, car objectivement, ces morceaux tiennent toujours la dragée haute à une grande majorité des productions actuelles se réclamant d’un esprit similaire, que ce soit en terme de crédibilité, d’intensité ou de musicalité. En attendant de pouvoir enfin goûter à de nouvelles compositions, il est important de posséder ces maillons pour compléter, si besoin est, la chaîne d’une carrière qui occupe une place de choix dans l’histoire du metal français.


Rédigé par : Uriel | Pas de note/ | Nb de lectures : 10580