Après deux EP ("First" et "Second", que je vous conseille fortement) particulièrement réussis et bien accueillis par la critique, Baroness franchit enfin le cap du premier album avec "Red Album". Il fait également suite au split avec Unpersons sorti cet été qui nous donnait déjà une idée de ce à quoi s'attendre.
Inutile de dire que ce premier album était attendu par beaucoup et autant le dire de suite, il confirme les espoirs placés en eux. Le groupe originaire de Savannah, poursuit son évolution en rejoignant les rangs du prestigieux label américain, Relapse Records, qui a flairé le bon coup.

Ce "Red Album" démarre en beauté par deux pépites parfaitement ciselées par les mains d'orfèvre des deux guitaristes, que sont John Baizley et Brian Blickle, la teneur de l'album est résumé en 7min35 sur "Rays On Pinion". Une longue intro où l'on se délecte de notes de guitares paisibles avant une puissante éruption de riffs incisifs très heavy et l'apparition du chant qui se fait ragueur et écorché, le tout étant accompagné par une batterie énorme. Puis vient "The Birthing" avec l'apparition de riffs très rock, catchy et accrocheur et d'une voix claire du plus bel effet qui nous prouve le talent du Baizley aussi bien à la guitare qu'au chant. Morceau dynamique agrémenté d'un excellent break où les guitaristes se font plaisir avec des parties en lead surplombées par une basse rondelette pendant deux minutes, à la manière d'un Mastodon sur "Blood Mountain". Il y a pire comme comparaison, non?

Le reste de l'album suit généralement ce schéma avec soit une intro et un déroulement très progressif, pour les titres les plus apaisants ou soit une entrée plus énergique et un long développement où viennent se greffer de nombreux breaks pour aérer le tout (Wanderlust, ou bien encore O'Appalachia). A noter que la batterie donne le tempo dès les premières secondes pour la plupart des titres.
L'album est très varié grâce aux nombreuses influences digérés et incorporés intelligemment. Un savant mélange de style avec pour commencer une base Métal avec des racines Rock (plutôt 70's), le tout étant agrémenté d'une louche de Stoner Rock à la Kyuss (pour les délires psychédéliques et l'évasion vers un nouvel univers) voire Clutch, quelques explosions bien senties et des passages planants du plus bel effet typés Post-Hardcore et une légère touche de Sludge sur quelques passages.
On peut noter également que la musique se fait plus progressive.
Proche de leur voisin de Kylesa ou bien encore Torche mais en moins virulant et expérimental et avec un gros feeling Rock'N'Roll. Oui, vous avez bien lu, plus Rock du fait que ce soit quand même moins lourd que par le passé, c'est plus lisse (la prod y est pour quelque chose) et il y a pas mal de chant clair.
Je voudrais revenir sur cet élément, car John Baizley (en plus d'être un excellent guitariste) délivre une performance de premier choix au chant (surtout pour la voix claire toujours bien placée). Il est certes moins rugueux que sur les EP mais il faut avouer que la progression est phénoménale, John maîtrise et varie à merveille ses deux chants ce qui me fait regretter qu'il n'y en est pas plus, car la musique de Baroness est la plupart du temps instrumentale.

Tout ça pour un rendu très riche, intéressant et passionnant, peut-être déroutant pour certains, mais cela étant si cohérent que l'on s'y fait sans mal. Surtout que l'album ne s'essouffle à aucun moment (pas un seul titre faible qui pourrait casser l'ambiance), mieux même, il se bonifie au fil des écoutes.

Je parlais de diversité, j'en veux pour preuve le titre "Cockroach En Fleur" , petit interlude instrumental à la guitare qui sonne très sudiste avant de partir vers quelque chose de captivant où l'on a l'impression que les cordes s’entremêlent, ça ne dure que 1min50 et c'est trop court. A écouter.
L'album s'achève sur "Grad", un titre porté par la délicieuse montée en puissance des guitares, pour un résultat tout en douceur et assez planant pour le dernier appel à l'évasion qui n'est pas s'en rappeler le fabuleux "Pendelous Skin" de Mastodon.

L'atout numéro un de Baroness, réside dans le fait d'avoir deux guitaristes talentueux et parfaitement complémentaires (un autre point commun avec Mastodon). Aussi bien à l'aise avec les grosses rythmiques que pour les longs développement où les guitares fusionnent, ils nous gratifient aussi de solos (et riffs bien entendu) inspirés.
Un petit mot sur le batteur, qui délivre une prestation monstrueuse et qui ne passe pas inaperçu, en particulier quand il accompagne les deux guitaristes dans leurs longues harmonies et/ou solos. Il occupe l'espace avec talent et notamment un très bon toucher sur les cymbales.
Un mot également sur l'exceptionnelle production de Philip Cope (chant/guitares chez Kyles, on reste entre ami), pour un son énorme qui sonne très naturel et embellit les compos du groupe. Mention spéciale pour le rendu des guitares, avec un son lisse et un grain très approprié. Et le mixage n'oublie personne, même la basse est présente.

Si affiliation avec Mastodon ne fait pas de doute, en aucun cas il n'y a plagiat, la musique de Baroness étant suffisamment originale et personnelle.
Alors même si l'ensemble est moins fou et est devenu plus accessible (rien de péjoratif là-dedans), cela reste quand même de bout en bout un magnifique voyage aux saveurs colorées (comme ce fabuleux artwork, aux couleurs vives, issu de la main de John Baizley, quel talent le bonhomme, il sait tout faire) et à l'ambiance feutré.
Je pense sincèrement que ce "Red Album" est susceptible de plaire au plus grand nombre et pas seulement aux personnes qui écoutent du Métal, du fait de la légèreté ambiante.
Un groupe talentueux avec qui il va falloir compter après la sortie de ce premier album raffiné et au combien rafraîchissant.


Rédigé par : Arnaud | 17,5/20 | Nb de lectures : 11866