2007 était l’année des tributes (ouais je sais, je retarde), faut croire, après ceux de Sick Of It All, Integrity, Eyehategod et j’en oublie sûrement, voici celui de Warzone. Celui-ci est particulier puisqu’il marque l’anniversaire des 10 ans de la mort de Raybeez, l’emblématique et regretté leader du groupe. C’est aussi une initiative du particulièrement prolifique label français Eternalis qui réunit des groupes majoritairement européens, ce qui est suffisamment rare pour être souligné. Je vais p’tet devoir présenter Warzone, j’imagine que beaucoup de ‘jeunes’ n’ont jamais entendu causer de ce pourtant légendaire combo new-yorkais.

Warzone, c’est donc principalement Ray ‘Raybeez’ Barbieri, qui tînt les fûts d’Agnostic Front à leurs tout débuts après avoir été leur roadie. Soucieux de mener son projet, il monte définitivement son groupe en 1987 après maints essais infructueux, puis écume tous les rades de New-York et du New-Jersey pour répandre son punk-hardcore aux forts accents oï et devenir un des groupes majeurs de la scène NYHC au tournant des années 90. Warzone fut le premier groupe à vraiment parler de scène ‘old-school’ et de scène ‘new-school’, à anticiper l’évolution de la scène HC en intégrant déjà des riffs ‘métalliques’ empruntés aux groupes de thrash, le premier groupe à systématiser le singalong et le mic-grabbing, Raybeez chantant quasiment en permanence au milieu de la fosse en laissant souvent le micro aux fans, gimmick typique de la scène HC actuelle. Mais Warzone, c’est aussi malheureusement une image trouble, un groupe de skinheads radicaux (mais multi-ethnique !) aux messages patriotiques parfois maladroits et souvent mal interprétés (‘Skinhead Youth’, ‘Fighting For Your Country’) que le groupe a tenté de rattraper plus tard (‘Racism-World History’, ‘War Between Races’). Leurs concerts furent maintes fois interrompus pour cause de bagarres entre fans des différents bords (SHARP contre RAC, punks contre skins), ces événements entretenant le brouillard autour de la réputation du groupe. Il n’en demeure pas moins que Warzone reste une des vraies ‘légendes’ du Punk/Hardcore, un des groupes les plus intègres qui se soient produits à NY (lire les paroles de ‘Fuck Your Attitude’ ou ‘Don’t Forget The Struggle’, qui pourraient viser 90% des groupes actuels), refusant le statut de ‘stars de la scène’ au début des années 90 au point de se séparer. Raybeez décèdera d’une pneumonie juste après la reformation du groupe, en 1997, la polémique ayant toujours cours quant aux raisons de son décès, certains soupçonnant les traitements qu’il recevait d’être totalement inadaptés, d’autres évoquant une possible infection HIV… Mais bref, revenons à nos moutons, même parfaitement tondus.

Autant vous l’avouer de suite, si j’ai toujours énormément respecté Warzone pour ce qu’ils représentaient (malgré les polémiques), je n’ai jamais été un grand fan de leurs morceaux, même de leurs plus grands hymnes. La faute en revient principalement au chant de Raybeez que je trouve absolument horrible sur tous les albums. Ceci dit, à l’instar du tribute to SOIA, j’avais bon espoir d’apprécier les versions proposées par tous ces groupes sympathiques. Car sur les 24 groupes au programme, j’ai la chance d’en connaître les ¾ et surtout de les apprécier, ce qui fait encore plus saliver! Il faut dire qu’on dénombre pas moins de 15 groupes français, la plupart bien connus de ceux qui se bougent le fion aux concerts (Revive, FTX, Last Quiet Time, Backsight, Fat So, les regrettés No Time To Lose), les groupes restants étant loin de faire tache à côté, des Italiens de Values Intact et Strength Approach aux Malaisiens de Second Combat.

Comme on pouvait s’y attendre, on retrouve la fameuse version d’‘As One’ selon Saint Rick, apôtre du NYHC et contemporain de Warzone. 25 Ta Life joue cette reprise depuis plus de 10 ans, tous ceux qui ont pu voir le groupe sur scène doivent la connaître, surtout qu’elle claque vraiment, malgré la production brouillonne.

Les autres morceaux se classent comme sur chaque album-hommage en 3 catégories: ceux qui sonnent ‘mieux’ que les originaux (ça arrive souvent, surtout quand on aime pas forcément le morceau), les fidèles à l’original et les ‘massacrés’. On pourrait croiser ces catégories avec le jugement des morceaux originels selon qu’on les apprécie à la base ou pas, mieux vaux ne pas compliquer, je suis assez bavard comme cela.

Etonnamment, peu de reprises souffrent vraiment de la comparaison avec les premières moutures warzoniennes, ce qui témoigne du grand respect et de la sincère motivation de tous à honorer les légendes du NYHC. N’étant pas tellement amateur de street-punk basique, j’ai trouvé la version de ‘Sound Of Revolution’ par Crash Sur Vos Tombes plutôt moyenne et ‘trop’ fidèle à l’originale. Les Espagnols de Versus nous délivrent la reprise la plus brutale et la plus personnelle, celle de ‘It’s Your Choice’, mais curieusement, les vocaux Gros Bras et la production beatdown ne collent pas du tout au titre. Les Londoniens de Diction n’ont pas choisi la facilité en reprenant l’assez mauvais ‘Dance Hard Or Die’ et arrivent à le rendre encore plus répétitif. Enfin, malgré une interprétation très personnelle de ‘Don’t Forget The Struggle’, les Limougeauds de Purgatory s’en sortent moins bien que leurs comparses, la faute à une production très légère.

Tous les autres groupes s’en sortent magnifiquement, que le titre joué soit au départ bon ou quelconque! Il est difficile de dégager une reprise ‘meilleure’ que les autres, mais d’un point de vue général, les Frenchies font un très joli tir groupé: Fat So’ donne à ‘Hopeless Nation’ une énergie et un groove impressionnants, Revive réussit la prouesse d’égaler la reprise de ‘We Won’t Forget’ des géniaux Shutdown (et eux, ils se réuniraient pas, des fois ?), Up Rights que je ne connaissais pas délivre une prestation incroyable sur ‘Bullshit Authority’ avec plusieurs chanteurs et beaucoup d’énergie, Backsight sort un peu de son registre mélodique pour nous mettre un gros uppercut avec sa version de ‘Count Down’, on ne reconnaît plus le chanteur! A un degré moindre, FTX déçoit quelque peu avec ‘Locked Out’ à cause d’une production un peu confuse, Value Driven s’attaque au très moyen ‘Ground Zero’ et s’en sort correctement, Hard Times honore ‘Skinhead Youth’ de fort belle manière malgré un son médiocre, notamment au niveau de la batterie, Last Quiet Times hérite d’‘United Worldwide’ et ne le trahit aucunement, No Time To Lose délivre un solide ‘Brotherhood and Sisterhood’ qui n’a rien à envier à l’original, les obscurs NIQ ne dépareillent pas avec ‘Wound Up’ et enfin Come Across surprend en reproduisant parfaitement l’énergie de ‘Murder In First Degree’. Ouf! Je n’oublie aucun groupe francophone ? Encore bravo à eux en tout cas, le trait commun étant vraiment la passion qui se dégage de toutes leurs interprétations variées.

Vu la hauteur à laquelle les Froggies ont placé la barre, comment s’en sortent les ressortissants du reste de la Planète Bleue ? Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’Eternalis a brassé large: de l’Australie à la Hollande en passant par la Malaisie, l’Italie ou l’Angleterre, ce tribute aurait vraiment pu s’appeler ‘United Worldwide’! Second Combat était récemment venu de l’autre bout de la Terre sur invitation des Backsight et mérite clairement de l’attention sur ‘War Between Races’ tant sa sauce personnelle est épicée! ‘In The Mirror’ par les Hollandais de I-Reject colle tellement à l’originale qu’on en oublie que c’est une reprise et comme c’est un des titres de Warzone que je préfère, ça tombe parfaitement! Les Ricains de Make Or Break propose carrément la meilleure reprise de tout le disque avec un ‘Going Psycho’ incroyable qui porte du coup bien son titre! Hop, ma découverte de l’album, va falloir vérifier ce que valent leurs propres galettes. Je n’avais jamais entendu parler des Australiens de Weapons and Tactics, et je les ai trouvés intéressants sur ‘Fuck Your Attitude’, old-school mais modernes, très sympathiques. Les excellents Italiens de Strength Approach démontrent aussi leur talent d’interprétation sur ‘Under 18’ mais leurs compatriotes de Values Intact ne sont pas mal non plus sur leur ‘Throw Me A Line’ à la fois personnel et fidèle. Les Teutons Still Screaming défendent fièrement leurs couleurs avec l’énergie débordante qu’ils insufflent à ‘Free At Last’, autre très bon titre de Warzone, et pour finir les Bataves de For The Fame enfoncent définitivement le clou avec une version enragée de ‘Lion And The Snake’, je les soupçonne de compter d’anciens Maypole dans leurs rangs tant les vocaux et les riffs me rappellent ce fantastique groupe.

Vous l’aurez compris, si les Français s’en sont bien sortis, le Reste du Monde remporte quand même la palme des meilleures reprises de Warzone. Mais comme ils comptent aussi les reprises les plus ratées, nous pouvons donc dire que c’est une égalité parfaite. Ceci étant, le plus important reste que tous les groupes s’en sont donnés à cœur joie et réussissent à revigorer les ‘vieux’ titres des papys, ce qui devrait permettre aux ptits jeunots habitués aux productions clinquantes de découvrir Warzone sous un très beau jour. Les autres comme moi se surprendront du coup à ressortir leurs vieilles cassettes pour se replonger dans ce groupe mythique, ce qui est quand même énorme ! Pour résumer (Warzone méritait bien une longue chronique, non ?), voici une excellente initiative d’Eternalis, qui fait vraiment honneur au groupe et à Raybeez. Et pour faire comme Victory Records sur tous leurs disques pendant des années après sa mort: RIP Raybeez !


Rédigé par : Candiria-Thon | Album-Hommage/ | Nb de lectures : 10523