Les apparences sont parfois trompeuses. Un logo cradingue sur une pochette au dessin orthodoxe et un vague souvenir d'une précédente chronique m'ont fait penser que j'allais me faire déboîter salement les mandibules par ce nouveau forfait d'Azaghal. Ca serait mettre à mal la réputation de la scène finlandaise, qui ne fait jamais rien comme on l'attend (sauf Alexi Laiho, mais c'est pas de sa faute, c'est l'alcool). Loin de la productivité des débuts, Azaghal fait désormais mariner ses riffs. Notre wastiti de la rédac l'avait déjà signalé dans sa prose du Omega sorti en 2008. Prendre son temps est louable et d'autant plus surprenant à l'écoute du résultat paru chez Moribund en septembre dernier.

Si Azaghal montrait précédemment toutes les bonnes dispositions pour maintenir le mât de la tradition dans la tempête la plus violente, Teraphim entraîne le groupe sur des pentes bien différentes. Les amateurs retrouveront toujours un black blasté avec amour, mêlant une énergie thrash à des mélodies parfois enlevées. Des compos comme "Elilum – Surri Tyhjyys", le Behemothien "XI Omega" ou le Dissectionnesque "Uhrattu" sont un vrai bonheur à s'envoyer dans les feuilles et leurs thèmes collent une bonne patate pour le reste de la journée.

Il est d'autant plus étrange d'entendre Azaghal combler le milieu de son album avec des morceaux plus mid-tempo. Avec sa voix claire à la Ajattara sous Vallium et un riffing proche du néo-Satyricon, "Filosofi" est un vrai cheveu dans la bonne soupe de mémé, et ce n'est que le premier coup de canif dans le contrat qu'Azaghal a passé avec le Malin. Le lénifiant "Hänen Musta Liekkinsä" sonne comme un mélange entre Ancient et Angst Skvadron, avant d'enchaîner sur un "Helvetin Ikuisessa Loistossa" bancal avec sa partie centrale mollassonne. Et ça repart ensuite pour envoyer la purée, jusqu'au titre final "Kyy" dont le solo est une apogée du mauvais goût (y'a bien que Papy pour encore avoir un soupçon d'érection sur ce genre de riff. Et à son âge un soupçon, c'est déjà beaucoup). Je ne comprends pas bien l'intérêt à proposer ce genre d'explorations, alors que le groupe envoie des mélodies accrocheuses bourrinées avec amour comme pas deux par ailleurs.

La production du groupe reste toujours très personnelle, avec une caisse claire quasi inexistante dans les parties rapides (et c'est parfois tant mieux, tant le bretteur semble parfois à la peine sur les blasts les plus rapides). Si on peut apprécier à sa juste valeur cette prise de son à l'ancienne, il est aussi légitime de se demander pourquoi les cymbales ont été manifestement retouchées, au point des faire des pschii d'une régularité pénible. Heureusement que le groupe pousse en avant la voix et les guitares, sans quoi cet opus serait très indigeste.

Si j'avais apprécié l'enracinement musical de Luciferin Valo plus que mes illustres collègues auront aimé le reste de la disco d'Azaghal, le mélange présenté sur ce nouvel album m'incite à revoir l'ensemble vers le bas. Il faudra brasser large dans ses goûts pour apprécier un Teraphim où Azaghal s'est manifestement fait plaisir tout en partant trop dans tous les sens. Etant donné que l'album sort chez Moribund, bien moins en vogue désormais que des pets de lapin de Profound Lore ou Nuclear War Now, il y a fort à parier que cet album va globalement vous en toucher une sans bouger l'autre. Et toujours prolifique, le groupe prépare déjà la suite, alors que son chanteur vient d'être mis à la porte.


Rédigé par : Prince de Lu | 10/20 | Nb de lectures : 12329