J’ai de plus en plus l’impression d’être à côté de la plaque et de devenir peu à peu un vieux hardos rétrograde enfermé dans d’obsolètes carcans stylistiques quand je découvre les biographies des groupes actuels. Il est en effet presque impossible de ne pas tomber sur une référence au death ou au hardcore dès qu’il s’agit de décrire un jeune groupe d’orientation quelque peu brutale. Ce n’est pas une tare de jouer du métal classique, pas plus que c’en est une de faire du néo, et quand je lis qu’AYGGHON fait du néo-death, le caca nerveux est instinctif. Rien à voir avec la qualité intrinsèque de la musique, encore moins avec un élitisme bas du front qui voudrait que seuls quelques élus soient dignes de pouvoir jouer du death, c’est juste qu’en mettant certains styles à toutes les sauces par soucis de crédibilité, on trompe sur la marchandise. Le death a évolué et évoluera encore, mais il n’y a rien sur « Demi-Deuil » qui justifie qu’on le classe dans cette catégorie, en ce qui me concerne c’est du néo assez brutal influencé par GOJIRA et DAGOBA, mais bien moins massif… voilà pour le caca nerveux.

Pourtant, GOJIRA et DAGOBA sont on ne peut plus métal, voire death pour GOJIRA me direz-vous ! Effectivement, cependant AYGGHON a un jeu néo, porté sur le groove mais peu agressif et l’attaque des cordes est molle, ce qui différencie selon moi les groupes de métal des groupes de néo (hormis les riffs et structures inhérentes à chaque style), l’accordage très bas des guitares étant presque devenu la norme. Ceci étant dit, qu’en est-il de « Demi-Deuil » ? Et bien aussi étonnant que cela puisse paraître, ce sont les chansons les plus mélodiques qui passent le mieux (« Système H2O », « L’Homme Cancer »), les autres étant trop proches de ce que font les deux groupes précités pour qu’on ne fasse pas immédiatement la comparaison (« Angiospermes », en téléchargement sur leur site, est d’ailleurs bien représentatif de l’album)… On jurerait même que c’est le chanteur d’AqME qui vient prêter main forte à Maxx sur « Système H2O » et je vous mets au défi de ne pas fredonner « L’insouciance n’est pa-ah une excuse en soâ, une excuse en soâ-âh » dès la première écoute !

Enregistré et mixé au « Studio Des Milans » de GOJIRA, l’album bénéficie d’une bonne production qui manque toutefois de puissance, comme si AYGGHON avait voulu conserver une touche personnelle en se refusant à sonner comme les grosses pointures actuelles. Pas de mur de guitares donc, mais un son cru et organique qui convient plutôt bien à leur style, et une double grosse caisse triggée qui semble être la marque de fabrique du studio (cf. « Lunatic » de PITBULLS IN THE NURSERY). Personnellement je n’adhère pas du tout, le résultat est trop synthétique et minimise l’impact des parties de double alors qu’elles ont justement une place prépondérante dans l’architecture des morceaux.

Vous l’aurez compris, je ne suis pas fan de « Demi-Deuil » en raison de ce côté néo trop prononcé, du chant en français qui n’est pas mauvais en soi mais qui passe mal (en ce qui me concerne) dès que les paroles sont un peu engagées et c’est le cas pour AYGGHON. Tout cela me semble bien linéaire et trop concentré sur la reproduction de ce que font les aînés, d’où le sentiment d’avoir affaire à une vitrine du métal moderne plus qu’à une véritable création… Reste à voir ce que le groupe donne sur scène, où je pense qu’il peut donner une image beaucoup plus crédible.


Rédigé par : Dungorpat | 10,5/20 | Nb de lectures : 12873