Inconnu au bataillon avant que je n’aille faire un tour sur le site de Empire, ce groupe polonais m’a mis la plus grosse baffe que j’aie prise de l’année. L’effet de surprise lié à la très grande qualité de l’œuvre je suppose.
Mais reprenons l’histoire au commencement : créé dans la première moitié des années 90, Atrophia Red Sun (ARS) pratique à ses débuts un doom metal lyrique. Une première réalisation, « Painful Love », voit le jour en 1995 chez Croon Records. Le deuxième effort du groupe, « Fears » (1997) se fait plus pessimiste, et la musique se radicalise déjà un peu, incluant quelques samples et lorgnant du côté de Paradise Lost, Anathema, The Gathering. Un changement des 3/4 du line-up au cours des années 98-99 provoque une embardée vers un thrash-death rehaussé de nombreux claviers et samples. Et en 2003 sort « Twisted Logic » en bonus du numéro de juillet de Trash’em All magazine, album qui sera élu par de nombreux médias polonais comme album de l’année.
Le décor est planté, passons maintenant à la revue de détail. L’album s’ouvre sur un bruit d’alarme et de suite un gros riff bien prongien nous met dans le bain : le son est énorme, l’un des plus massif qu’il m’ait été donné d’entendre. Un mur sonore ultra puissant, un son de batterie extrêmement précis, compressé juste ce qu’il faut (le son de caisse claire me fait penser à celui du « Meantime » de Helmet) et des samples et loops qui n’écrasent pas le reste. Celui qui a enregistré cette pépite a fait du bon boulot !
Musicalement, la trame guitare/basse/batterie oscille entre power metal à la Nevermore et death à la Nocturnus, voire parfois melodeath. Des gros riffs hachés, ou mélodiques, s’entrecroisent et s’enchainent de manière très naturelle. Il n’y a pas un seul temps mort tout du long de l’album. Aux accélérations succèdent les ralentissements surpuissants et autre accalmies venues de nulle part. L’intensité varie sans cesse et l’utilisation de rythmiques ternaires voire impaires montrent que les gaillards savent comment garder l’intérêt de l’auditeur à son paroxysme. Quelques solos de guitare très propres et autres mélodies dérangées (« Abstract », l’intro très pattonienne de « Inspiration ») viennent agrémenter la base de la musique de ARS. Le travail de composition est ultra léché, rien n’a été laissé au hasard pour que se posent de la meilleure façon possible sur ce substrat ce qui fait l’originalité indéniable de « Twisted Logic » : les samples et autres synthétiseurs déjantés. Soit par nappes soit par loops, l’électronique est instrument à part entière dans ARS, injectant une folie bienfaitrice (les arabesques de « Abstract », un peu comme le titre « Two Sides » de Clawfinger, les loops technoides sur « Sins of Nation »… On pourrait citer tous les titres de toutes façons). La voix n’a plus qu’à se poser. Celle-ci est hurlée dans les aigus, parlée, chantée. Elle offre plusieurs facettes intéressantes pour diversifier les ambiances. Décidément, sacrée surprise que ce groupe polonais, qui nous offre un album d’excellente tenue tout du long, avec des titres qui s’enchainent superbement. Beau travail !
Pour magnifier le tout, le livret et l’artwork en général autour du groupe (voir le site) sont superbes.
Dommage toutefois que ces petits comiques aient écrit les paroles en polonais sur le livret alors qu’ils chantent en anglais, parce qu’il y a comme un concept parait-il…
Si la maison de disque travaille ce groupe correctement, il y a là un énorme potentiel : audacieux, novateur, mélodique, déjanté, puissant mais pas extrême, bon nombre de points positifs se retrouvent dans ce groupe. Je place « Twisted Logic » en très bonne place dans mon panthéon personnel, aux côtés du « Elvenefris » de Lykathea Aflame (ce qui veut tout dire pour ceux qui me connaissent). Probablement l’album de l’année pour moi, si l’on considère qu’il n’est sorti en France qu’en 2004.


Rédigé par : Ocean? | 18/20 | Nb de lectures : 9501