AS WE DRAW est une chasse d'eau.
Il est de ces groupes, laborieux, poussifs, transparents au possible. Qui se sont formés histoire de meubler des dimanches après-midi pluvieux, de tenter de chopper de la greluche à la fête de la Musique de Jouy-aux-Arches, ou d'avoir l'occasion de se coller des races à la bière tiède. Sans ambition. Sans musicalité. Inutiles. Et un beau jour, ils entendent parler d'un groupe de gamins à peine sortis de leurs années Warhammer, de dix piges de moins qu'eux, et qui les enculent dix fois à tous les niveaux. Stupeur. Dégoût. Split. Ce jour d'épuration de la médiocrité est arrivée. La chasse d'eau s'appelle AS WE DRAW.

On avait déjà eu l'occasion de tâter l'affolante précocité des gaziers avec le "Landscapes In Composition" d'HARD OFF HEARING, paru voilà de ça deux ans. Des cinq membres n'a subsisté que l'essentiel, un noyau guitare/basse/batterie, la vingtaine toute fraîche. Par rapport à leur ancien combo, le trio a dé-metallisé sa musique, jarté les influs Meshuggah, Textures et cie, pour mettre l'accent sur l'aspect post-hardcore déjà existant et truffé l'ensemble de breaks qui lattent. On pense aux vertes années d'un CULT OF LUNA couplées à la froideur sèche d'un BREACH, et d'une fougue à la REFUSED, pour rester suédois. Influences pas nouvelles, certes, mais l'exécution 5 étoiles, couplée à un sens de la déstructuration et une irréprochabilité totale, façon BOTCH, délivre une véritable fraîcheur Fisherman's Friend et laisse sur le cul. Se dégage de ce premier double EP une énergie fluide, massive, rageuse mais lumineuse; et sachez que scéniquement c'est la même, bonjour grosse présence et intensité, toujours sans un poil qui dépasse.

Pour être nous aussi irréprochables, on notera donc des influences trop présentes au détour d'un riff, ou un accent angliche pas totally perfect. Le reste de ce double-EP, sacrément impressionnant. Partant du principe que l'on est jamais aussi bien servi que par soi-même, les Lavallois, hormis le mastering chez Sylvain Biguet, ont tout géré tous seuls. De l'enregistrement, limpide mais écrasant, à l'artwork travaillé jusqu'aux pochettes découpées à la main. Bref, si l'on devait établir un indice basé sur le rapport âge/maturité de composition/émotion/exécution, nul doute qu'AS WE DRAW fume l'écrasante majorité des groupes français. Prochaine vague de splits à prévoir avec la sortie de leur premier album; c'est que si au lieu de deux frères ils étaient trois, on aurait eu affaire aux Hanson du post-hardcore.

Et le pire, c'est que c'est même pas des connards.


Rédigé par : Crown_Me | 16/20 | Nb de lectures : 12293