L'Angleterre nous a prouvé maintes fois qu'elle était la terre natale de groupes déjantés. Le duo qui compose Artisian s'inscrit dans cette volonté de se démarquer du plus grand nombre. Adeptes des vraies valeurs du black et du Do It Yourself, les Anglais se sont réunis dans le studio du batteur/bassiste Steve Banks pour enregistrer leur premier album. A noter que le vocaliste/guitariste est également le hurleur du groupe de heavy britannique Meggido. Une première et unique démo sobrement intitulée "Demo" avait précédé l'opus en 2005, démo dont sont issus trois titres de l'objet qui nous intéresse.

Loin des hallucinations que provoquent Akercocke ou Anaal Nathrakh, les Londoniens de Artisian pratiquent un black que je qualifierai de merdique. Les qualificatifs les plus pointus ne peuvent rendre justice à cette suite ininterrompue de riffs pourris couverts par la voix d'un canard anémique. Le groupe se drape désormais du style "Extreme metal", probablement pour ne pas avouer qu'il ne rend justice à aucun genre et surtout pas aux vieilles locomotives. L'album de ces artisans de la nullité est particulièrement pénible à s'enfiler (je parle ici d'écoute et non de pénétrer la rondelle dans un quelconque orifice) (et quand je parle de rondelle, c'est bien du CD qu'il s'agit). Il suffit des premières mesures du lead de "Pagan's Sorrow" pour retourner Alex dans "Orange Mécanique" plus rapidement qu'avec une symphonie de Beethoven. L'auditeur est happé dans un trip hypnotique où les rythmiques complètement pourraves de tous les titres se ressemblent. "Satan's Pope", "The Religion that Breeds Hate", "Eyes to the Hills" commencent tous pareil, comme si le guitariste ne disposait que de quatre cases pour s'exprimer. Et le seul moment de plaisir que procure cet album est la satisfaction de le balancer par la fenêtre sans espoir de retour.

Il y a toujours des soirées fatigantes, où après une journée de travail harassante on ne rêve que d'une bonne couette et une bonne pipe avant de dormir. Mais difficile de dire à ses amis de quitter les lieux sans les vexer. Difficile de virer Tonton encore en train de nous ressortir la même anecdote sur le premier concert de Napalm Death à Provins ou à Cobra en pleine blagounette (qu'il a encore piquée à Télé Z. Il est aussi abonné à Télé Poche, c'est un vrai calvaire). Jusqu'à présent j'utilisais une arme assez absolue pour pousser mes convives vers la porte: un album de musique mandchoue, bande-son digne d'un restau chinois des plus ringards. Cet opus de Artisian va me permettre de renouveler ma dégageothèque sans que mes amis ne découvrent le subtil subterfuge. L'Angleterre est vraiment la terre natale de groupes surprenants.


Rédigé par : Prince de Lu | 04/20 | Nb de lectures : 12562