Formé en 2001 sur les cendres du combo Solipsis, Ars Moriendi est le projet solo du Clermontois Arsonist. Seul, Arsonist n'en a pas moins mis du cœur à l'ouvrage, proposant pas moins de six autoproductions entre 2002 et 2006. Et le contrat pour ce premier album labellisé a été remporté par l'Ukrainien Griffin Music (label du très bon projet black slave Knell).

Pas facile de décrire Ars Moriendi. Le projet cultive la différence et le droit de ne pas s'enfermer dans une étiquette. Si vous parcourez plusieurs chroniques des sorties du groupe, vous serez surpris de voir des descriptifs et des références à des groupes très différents. Pour ses précédentes réalisations, Ars Moriendi empruntait à l'univers du black, plus précisément du black/doom, ce qui à mon oreille a globalement disparu sur ce nouvel album. L'Oppression du Rien est avant tout un album onirique, blindé de nombreuses mélodies et de fréquents arpèges invitant à la rêverie, frisant le cauchemar au travers d'une voix hurlée à pleins poumons. Ces six nouveaux titres nous entraînent donc au gré des songes de leur compositeur au sein d'un metal atmosphérique. Et l'auditeur volète entre des thèmes que ne renieraient pas le mélancolique Anathema et une violence tranquille à la distorsion diffuse qui évoque celle du doom/death du siècle dernier. Mais il faut reconnaître que le charme (et probablement le défaut) d'Ars Moriendi est de brouiller les pistes pendant 52 minutes. Hormis une fin d'opus plus marqué par le black, le projet volète allègrement des notes égrenées par un synthé ambient à un solo heavy, d'une rythmique furibarde de black mélodique à la lourdeur grésillante d'accords plaqués, ou à des arpèges plus jazzy et à une basse sautillante plus proche d'un Atheist. Bref, rien ne vaut une écoute pour vraiment se faire une idée.

Niveau conception, l'album a été enregistré en 2007 intégralement par Arsonist. Il reste quelques erreurs de production que je mettrai sur le compte du premier album (le son s'écroule à la cinquième piste). Pour le reste, Arsonist peut être pleinement satisfait de son projet. Un projet qui exprime sa personnalité propre sans tenir compte des modes. Il ne reste probablement qu'à trouver un public pour un metal atmosphérique si particulier, qui brasse de multiples influences. Et c'est à cet instant que je glisse mon avis perso. A mon goût, celui d'un gusse qui cherche une énergie noire ou toute autre pulsation haineuse dans son verre de metal, Ars Moriendi souffre d'un gros déficit de dynamique. Cela n'a rien d'illogique, mais c'est un fait: Ars Moriendi mise avant tout sur ses élans mélodiques pour provoquer l'évasion, au détriment assumé de la patate. Ce projet n'est donc pas là pour plaire aux amateurs de riffs percutants, que cela soit clair. "Be aware", comme dirait JCVD.

L'Oppression du Rien est un album à conseiller aux amateurs de l'évasion musicale, ceux qui attendent d'un album qu'il les surprenne et qu'il ne s'échine pas à retourner le même sillon musical. Quant aux paresseux qui se contentent de lire les trois dernières lignes d'une chronique et la note, ils risquent cette fois d'être déçus.


Rédigé par : Prince de Lu | -/ | Nb de lectures : 10972