Autant évacuer immédiatement la question, ARKAN évolue dans un créneau très spécifique où la suprématie d'ORPHANED LAND constitue un antécédent pour le moins délicat à assumer. Bien entendu, la filiation est totalement revendiquée par le plus méditerranéen des groupes parisiens qui possède à son actif une tournée avec les Israéliens et affiche un featuring de Kobi Farhi sur ce nouvel album (« Deus Vult ») . Il n'en reste pas moins que les similitudes sont à ce point frappantes qu'elles nuisent parfois à la lisibilité de leur travail. Les références en matière de death-metal à tentation orientaliste sont encore peu nombreuses, si bien que les premières écoutes de « Salam » posent un problème évident : où s'arrête l'hommage appuyé et où commence la véritable personnalité d'ARKAN?

On retrouve absolument tous les ingrédients qui ont fait la gloire de leurs aînés au cours des années 90, un death mélodique assez péchu, de magnifiques arrangements empruntés à la musique traditionnelle du Maghreb, des leads lumineux et la divine alliance de growls profonds/ chant clair féminin. Qui songerait à se plaindre d'un tel ancrage culturel? La formule a déjà fait ses preuves et ARKAN démontre avec brio que la leçon est bien apprise.
Chez ARKAN, les sources sont à chercher dans une coloration ethnique propre à nos voisins marocains et algériens, dommage que ma méconnaissance du sujet m'empêche de percevoir les singularités de ces influences. Les partitions jouées à l'oûd par Mus Elkamal jouissent forcément d'une identité qui n'entretient que des rapports lointains avec celle exprimée par Yossi Sassi Sa'aron. Gare à la tentation de l'ethnocentrisme. L'auditeur peu éclairé pourra néanmoins se laisser emporter par le charme évident de ces mélodies inhabituelles dans notre genre de prédilection si grognon.
Pour les avoir déjà vus sur scène en ouverture de SEPTICFLESH, ARKAN n'oublie pas de déployer un death metal aussi racé que puissant. Une saine énergie pour un groupe qui joue à fond la carte de l'humilité et de la différence. Il faut une certaine dose d'audace pour proposer au public metal une cover live de KHALED, perso j'adhère comme souvent quand la surprise se conjugue à la maîtrise du sujet.

Sur « Salam », les morceaux de bravoure succèdent aux pures invitations au voyage (voir la putain de ghost-track qui tue en fin d'album) sans qu'un nuage ne vienne altérer la qualité du périple. On peut malgré tout reconnaître un manque de maturation dans l'écriture que le temps devrait naturellement compenser. Enregistré au Studio Fredman, la production de l'album ne souffre évidemment d'aucune faiblesse, si ce n'est peut-être d'une propreté excessive. Je cherche encore le groupe de metal qui me donnera l'impression d'avoir enregistré ses morceaux dans le foisonnement d'une Médina. Dans l'immédiat, on peut simplement se réjouir de ce deuxième album d'ARKAN et encourager de nos vœux l'émergence d'une scène metal qui saura tirer profit de la pluralité de nos racines, s'y fondre avec élégance.




Rédigé par : #Guillaume# | 14/20 | Nb de lectures : 13823