On nous rabâche souvent que le travail et l’abnégation payent et qu’on n’a rien sans rien. Parfois cela se vérifie, parfois non. ARCANIA doit être de ceux qui pensent que oui, l’abnégation paye. Parce qu’il lui en fallu au duo fondateur Cyril Peglion / Guillaume Rossard pour surmonter la mort du troisième membre du groupe, Gabriel, il y a sept ans et trouver de nouveaux musiciens pour concrétiser le rêve qu’ils avaient en commun : faire de la musique ensemble et laisser une trace. En 2004, un premier pas est franchi avec la commercialisation d’un maxi, « ArcAniA ». Ce n’est pourtant qu’en 2009 que débutera l’enregistrement du premier album chez David Potvin (LYZANXIA, ONE WAY MIRROR, PHAZE 1), le mastering étant quant à lui confié à Peter in Betou (OPETH, ENSLAVED, DIMMU BORGIR). Le résultat, « Sweet Angel Dust », est en bac depuis quelques mois et ceux qui l’ont déjà entendu ou qui l’ont déjà acheté doivent donc se douter de la tournure que va prendre cette kro…

Il faut laisser le temps au temps, paraît-il, et à l’écoute du disque il paraît évident que les années passées dans l’ombre ont permis au metal d’ARCANIA de mûrir en douceur, d’éviter l’erreur qui aurait pu être de sortir un album plus tôt alors que sa musique, emprunte de douleur mais également de sagesse, demande beaucoup de maîtrise pour ne pas se perdre au milieu de tous les chemins qu’elle emprunte. Bien qu’il en soit éloigné sur un strict plan musical, ARCANIA se rapproche de NEVERMORE par cette balance fragile trouvée entre brutalité, noirceur des ambiances, complexité et mélodies. À la fois thrash, progressif et death metal, « Sweet Angel Dust » est avant tout un album complexe et ambitieux, un recueil d’histoires de trahisons, de deuils non faits, d’hypocrisie et d’introspection. Au fil des passages, quelques refrains finissent par devenir familiers, comme celui de « Memento », un morceau finit par exister par lui-même après avoir beaucoup fait penser du METALLICA ("As We Fall") et un autre se révèle très bon alors qu’il paraissait un peu bordélique (« My Funeral »). On n’assimile en effet pas les morceaux immédiatement, ils peuvent même sembler hermétiques alors qu’ils ne demandent qu’à ce qu’on les écoute sans a priori, qu’on les laisse exister tels qu’ils sont avec leurs forces et leurs faiblesses.

Leurs forces, ce sont des ambiances sombres donnant envie d’en savoir plus sur le contenu des textes, des ambiances qui semblent là pour une bonne raison et pas seulement pour les décors, créées par un assemblage d’éléments (voix, riffs, nappes de synthés) et non un artifice sonore ou visuel qui ferait basculer nos cerveaux conditionnés dans le mode désiré. Ce sont également des assemblages de plusieurs univers musicaux réussis, ce qui donne lieu à quelques passages purement Death Metal, certains même blastés, au milieu de plans Thrash plus mélodiques (« No End »).
Leurs faiblesses, ce sont peut-être des enchaînements manquant encore de finesse entre les différentes parties des morceaux, un chant masculin encore trop linéaire (bien qu’adéquat la plupart du temps) par rapport aux émotions qu’on le sent chercher à faire ressentir, et une production trop sèche, trop brutale pour ce type d’album aux multiples ambiances.

Si la rédaction de ces paragraphes vous a semblé laborieuse, vous avez vu juste. La raison en est toute simple : « Sweet Angel Dust » est un bon album que quelque chose m’empêche d’adorer mais me pousse à réécouter. Un album que je ne jurerai pas de ressortir régulièrement dans le futur, mais qui le mériterait. ARCANIA a indéniablement quelque chose à dire et à apporter et si ce premier album n’est pas parfait, il a une âme, ce qui le place d'emblée au dessus d’un bon paquet des productions actuelles, tous styles confondus.


Rédigé par : Dungorpat | 14/20 | Nb de lectures : 13569