A dire vrai je ne sais pas trop si je suis qualifié pour vous parler du dernier album d'Antaeus, dans la mesure où je n'ai jamais écouté son très discuté prédécesseur " Cut Your Flesh and Worship Satan ". Enfin, comme il y a un début à tout, je me lance en espérant ne froisser personne. La première chose à souligner est que " De Principii Evangelikum " est très court, pas même 28 minutes. Certains pourront trouver ce temps de jeu léger, très léger, et spéculer sur son fondement - manque de matériel ou despotisme autorisé par un statut établi, peu importe, mieux vaut une petite demi-heure de tuerie qu'une heure de marasme artistique. Et le fait est que l'album défile comme une attaque au napalm qui ne laisse que des pelures de tympan derrière elle. Dès l'intro qui n'en est pas franchement une - puisque plus longue que la plupart des morceaux réguliers - Antaeus pose sa griffe harassante, un black metal personnel et anti-stéréotypes, pourtant tellement plus " true " que la plupart des sorties standardisées qui se prévalent de cette étiquette. Revêtu d'une carapace venimeuse et occulte dans les ambiances (bruitages d'outre-tombe, cris de sorcières ou simulacres de psalmodies religieuses), le jeu d'Antaeus s'articule avant tout autour d'un batteur plutôt technique et qui, surtout, ne fait rien pour le cacher. Ce dernier assène sans retenue des enchaînements presque incessants blasts-breaks-roulements qui donnent à la musique son allure syncopée et, donc, éloignée des clichés du black monorythmique. Au bout de quelques morceaux on pourra toujours arguer que blaster par intermittence est dans le fond tout aussi borné que tabouler en permanence, il n'en reste pas moins que la méthode possède l'avantage de garder l'auditeur sur le qui-vive, tout comme de garantir à ses cervicales un sain travail d'explosivité plutôt que de banale endurance. Ajouté au côté " hélicoptère " de la double-pédale lorsqu'elle entre en jeu, cet usage millimétré et protubérant de la batterie comble favorablement le fossé laissé dans l'espace sonore par un mur de guitares certes percutant, mais quelque part trop informe pour laisser une empreinte marquante ou pour qu'on puisse détailler leur apport substantiel au sein du chaos ambiant. Peut-être un petit bémol à chercher dans cette direction, donc, mais étant donné que je n'ai aucune référence sur laquelle me baser concernant le groupe, il est aussi parfaitement plausible que cette configuration sonore ravisse les maniaques d'Antaeus au-delà de toute espérance. Le chant mérite son petit paragraphe, tant son timbre malade et sec à la fois sous-tend bien l'indiscutable climat putride et malsain qui enrobe la musique. Je suis très curieux de voir si je vais me faire lyncher dans les commentaires en osant une petite fusion Abbath-Maniac pour tenter de situer ces vocaux. Bref, pour en terminer avec cet article dans le mouvement (bref) de l'album, je dois qualifier ce premier contact avec Antaeus de sensiblement positif. J'ai la conviction que le groupe pourrait améliorer assez amplement son impact en gardant l'essentiel de son écriture pour proposer des morceaux pas forcément plus longs, mais plus élargis au niveau des variations d'enchaînements, ou des pics d'intensité, ou que sais-je encore... Ceci dit, il est trop rare de découvrir un groupe réellement noir et répugnant jusqu'au bout des orteils pour se permettre de faire la fine bouche. " De Principii Evangelikum " devrait, j'ai confiance, pénétrer votre chair comme un onguent de blasphèmes irrécusables appliqué par des mains gantées de fer chauffé au rouge.


Rédigé par : Uriel | 13.5/20 | Nb de lectures : 9160