Une chose est certaine la sortie du premier album d’ANSUR, « Axiom », n’était pas totalement passée inaperçue vu que les Norvégiens avaient divisé leur auditoire potentiel en deux clans bien distincts. D’un côté les sceptiques qui ne comprenaient pas pourquoi autant de personnes, d’habitude saines de corps et d’esprit, se tripotaient activement la nouille à l’écoute d’un disque en s’obstinant à y trouver des influences black metal imaginaires ; de l’autres quelques amateurs séduits par l’alternative intéressante déclinée par ANSUR sur un premier disque aux allures de bon filon à suivre de près.

Une autre chose est certaine avec la sortie de ce deuxième album, ANSUR ne va pas vraiment fédérer les deux parties avec ce disque ; son public jadis conquis risque même de changer quelque peu car « Warring Factions » n’est pas exactement la suite logique de son prédécesseur.

Il faut savoir que les Norvégiens s’étaient déjà attelés à la composition de leur deuxième opus depuis un moment lorsqu’« Axiom » était finalement sorti. Ceci expliquait un certain décalage, un certain recul que le leader du groupe avait déjà vis-à-vis d’un premier album pourtant accueilli favorablement. Les aspirations musicales d’ANSUR étaient déjà très éloignées du death/black à tendance prog et la sortie de « Warring Factions » après deux années de travail acharné est là pour attester de l’évolution du groupe.

Avec ce deuxième chapitre, le masque tombe enfin. Terminé les relents black où planait l’ombre du dernier EMPEROR, ANSUR est désormais un groupe de métal progressif à part entière et nous délivre ici une véritable pièce d’orfèvrerie d’une infinie délicatesse, d’une infinie musicalité méditée, peaufinée, ressassée pour en extraire la moelle substantielle sur les quelques soixante minutes de « Warring Factions ».

Pour ce retour en force, ANSUR a repris son ancienne recette et l’a poussée bien plus en avant. Assumant pleinement ses influences prog seventies, techniques et atmosphériques les Norvégiens devenus un trio entretemps nous brodent un disque principalement axé sur les guitares servies par une ambiance très aérienne lorsqu’elle ne se radicalise pas sensiblement. Il semblerait bien le métal extrême fasse partie d’une ère révolue pour ANSUR qui puise allégrement dans le vivier progressif pour façonner sa musique assez peu métallique en définitive. Ainsi les volutes aux airs d’improvisations d’un orgue Hammond, d’un sobre piano solennel ou d’un saxophone très discret viennent enrichir certains passages délicieusement concoctés. On retrouve encore ces compos à tiroirs délivrant une palanquée de plans tous plus subtilement amenés les uns que les autres.

Bien évidemment, au souvenir d’« Axiom », on est un peu décontenancé lorsque les premières mesures de l’album se font entendre et puis, bien vite, on se laisse glisser avec jubilation dans cette orgie d’accords. On s’immerge pour une heure de plénitude qui s’écoule sans même qu’on s’en rende compte. Tout simplement parce que ce disque est aussi passionnant, lyrique que chiadé même s’il renoue avec un courant bien connu et que ses fondations sont moins exotiques que ne l’étaient celles d’« Axiom ». On songe à plein de grands groupes, OPETH sans ses parties plus death, quelques plans à la Gilmour de PINK FLOYD, CYNIC, le fameux MAHAVISHNU ORCHESTRA de McLaughlin et d’autres encore. ANSUR se paye même le luxe d’agrémenter son album de quelques passages plus dissonants, d’une paire d’arythmies, d’un intro un peu funky, de plans jazzy, d’un petit délire country, quelques plans presque épiques sans jamais tomber dans la faute de goût.

Quand on songe que ces zicos ne dépassent pas les 20 ans, on ne peut que s’incliner devant les facilités musicales dont disposent ces types. Irréprochables techniquement, ANSUR évite miraculeusement de tomber dans l’exercice de style, dans le démonstratif appliqué mais éternellement décérébré de simples plagiaires.

S’il fallait chercher une quelconque faiblesse sur ce disque, c’est peut-être du côté du chant qu’il faudrait creuser. Non pas que celui-ci soit réellement mauvais mais c’est sans doute là le point restant perfectible du groupe. D’un autre côté les parties de chant ne couvrant qu’une petite partie de l’album, ce très léger bémol ne tire pas vraiment « Warring Factions » vers le bas.

Artwork sublime, production parfaite cette fois-ci, il y avait bien longtemps que je n’étais pas sorti de l’écoute d’un disque aussi serein, imprégné d’un sentiment de bien-être, de plénitude béate… Aaaaaagggh………. !!!!!!!!
Désolé, j’ai joui…




Rédigé par : Tonton | 18/20 | Nb de lectures : 13345