Bluffant, c’est l’unique mot qui vient à l’esprit lorsqu’on s’est envoyé par les oreilles le premier album d’ANSUR ; une formation jusqu’alors parfaitement underground qui nous vient de Drammen, Norvège.
Un premier album qui aura nécessité près de six mois de travail en studio avant de déboucher sur « Axiom », une œuvre pour le moins énigmatique et originale.

Alors que l’album démarre sur les bases rythmiques relativement simplistes d’un black metal plutôt quelconque, ANSUR dévie rapidement de sa trajectoire pour nous imposer sa propre vision du métal noir. Dès le second morceau, des trames lancinantes de plus en plus fouillées prennent possession du sillon d’ « Axiom ». Les thèmes s’étirent langoureusement dans des joutes progressives d’une maturité troublante au point de rendre indémêlable l’écheveau musical qu’ANSUR construit tout au long des 45 minutes de sa première œuvre.

La facilité déconcertante avec laquelle ANSUR nous concocte des compositions à tiroirs ouvrant sur d’improbables volutes musicales n’est pas sans rappeler un OPETH au meilleur de sa forme. De même un certain côté rétro et planant pourrait très bien être comparé à celui développé sur le « Isa » d’ENSLAVED. Pourtant il serait vraiment réducteur de reléguer ANSUR à un rôle de suiveur, tout simplement parce que leur vision du progressif s’étoffe d’influences assez diverses qui frôle des caractéristiques très seventies ou des brides acoustiques de flamenco sans jamais s'y vautrer. Plus manifeste, ANSUR ne cherche pas à cacher l’importance que certains guitaristes ont pu avoir sur sa musique. Ce qui nous permet de nous délecter de délicats solos comme celui de « The Axiom Depicted ».
Histoire de varier les plaisirs au maximum, ANSUR se plaît à nous rappeler son bagage black metal par quelques passages typique du genre.
Conjuguant, avec un même détachement, l’art des dissonances subtiles de même que celui des patterns mathématiquement chiadés, ANSUR pourrait en imposer à des formations autrement plus réputées. Quand on sait que certains des membres de cette formation n’ont guère plus de 18 ans, il y a de quoi rester songeur.

Du côté des voix, ANSUR a choisi de jouer la carte du contraste en optant pour des vocaux saturés bien que sous-mixés. Un genre de chant qu’on retrouve principalement dans les formations les plus nihilistes pour ne pas dire les plus « true ». Ce mélange quelque peu improbable fonctionne parfaitement et même si les parties chantées ne dominent pas « Axiom », elles contribuent néanmoins à la mise en scène de son ambiance. Et son ambiance parlons en. C’est avec ce perpétuel souci du détail que le quatuor norvégien a disséminé, au second plan de sa toile progressive, des bruitages divers, quelques nappes de synthés qui apportent un petit plus dans l’atmosphère glaciale d’ « Axiom ». Si certains passages laissent planer des humeurs purement haineuses ou simplement tristes, le caractère général de l’album est plutôt dénué d’émotions et surtout de chaleur. L’infinie méticulosité qui a permis à ANSUR de venir à bout d’un projet aussi ambitieux que ce disque débouche sur le climat. « Axiom » possède la beauté froide, farouche et sauvage des fjords millénaires qui bordent le pays de ses protagonistes.

Ceux qui hier, pensaient encore que la Norvège n’excellait, métalliquement parlant, que dans le black ou le viking metal en seront pour leurs frais. Après SHE SAID DESTROY plus tôt cette année, ANSUR nous fait prendre conscience que le métal norvégien est loin d’avoir livré tous ses secrets. Bluffant disais-je…




Rédigé par : Tonton | 17,5/20 | Nb de lectures : 14216