Le nouveau souffle du HardCore nous revient avec son 1er véritable album, même si je trouve difficile de ne considérer 'Not Now Not Ever' que comme un simple EP tellement celui-ci fut intense et riche. Car il en avait calmé plus d'un par le cocktail incroyable de puissance, d'énergie et de mélodies au service d'un HC SxE orienté old-school de très haute lignée. En général, quand on frappe si fort d'entrée avec une telle oeuvre, on se ramasse pas mal dès que les choses sérieuses commencent. Le groupe de Fulton a cependant gardé le même line-up ce qui est déjà rare en soi, ça valse effectivement sévère dans cette impitoyable scène. On peut donc espérer une oeuvre au moins aussi aboutie que la précédente, Rivalry ayant pris la très agréable habitude de proposer bombe sur bombe depuis quelques années déjà.

Que vaut donc ce 'Mill City', vaut-il l'attente qui lui était réservée dans le cercle fermé des fans de ce revival old-school ? La première écoute fut une sincère déception pour ma part. Je n'ai pas retrouvé la frénésie continue de 'Racing A Fading Image' ni l'impression de rouleau compresseur de 'Passing The Torch'. Les guitares m'ont semblé moins mélodieuses, le chant de Ted m'a paru plus en-dedans, me sautant moins à la tronche que sur l'EP.
Et puis la magie a fini par agir à force d'appuyer frénétiquement sur le bouton repeat de l'autoradio ou de la platine, particulièrement après 'Orange', 'Coming Home' et surtout 'Off With Your Head'. Ce sort que le groupe vous jette s'appelle 'Manjssa Danstassefa' et vous ôte toute capacité à zapper la plupart des morceaux (initiative -50), tout en vous répétant à vous-même 'Putain' toutes les minutes (charme +50). Wow ! Ah les enfoirés, ils prennent bien en traitres. Le tour de force du groupe est de ne pas proposer un 'NNNE' bis, tout en gardant les qualités de ce dernier: explosivité, urgence, intelligence. La production encore une fois signée Kurt Balou est irréprochable, les musiciens ont tous un bon niveau et jouent leur parties avec plus d'enthousiasme les uns que les autres, et les vocaux de Ted se font finalement moins prépondérants, renforçant la cohésion finale de l'oeuvre.
Certains titres sont tout de même dispensables, malheureusement. Par exemple 'Anchors' vient briser l'enchaînement de cinglés formé par les 3 titres suscités, avant que 'Walls Without Windows' ne revienne nous coller une grosse claque. C'est le principal reproche que je ferais à cet album: en élaguant un peu, genre en dégageant 3 ou 4 titres clairement moins bons et inspirés, l'intensité permanente en aurait été préservée et nous aurions tenu là une pièce maîtresse dans le style, un nouvel étalon pour les années à venir.

Les paroles tournent un peu moins autour des thèmes SxE récurrents et rébarbatifs (tant mieux!), et sont particulièrement bien tournées: le jeunisme et ses à-côtés ('Walls Without Windows'), le refus de la société de consommation ('Marla', 'Diesel and Gunpowders'), la lutte contre les moralisateurs et réactionnaires de tous poils ('I'm pro-shutting-the-fuck-up'), la nécessité d'agir en êtres responsables ('Coming Home') capables d'assumer leurs choix ('Off With Your Head')...Bref une maturité incroyable se dégage de tout l'album de ce point de vue-là. Je tiens à le souligner car il arrive souvent que l'aspect écriture passe à la trappe dans le HC (je ne parle même pas du metal) et je trouve ça particulièrement dommage.

Another Breath nous crédite donc d'un sacré album, moins rentre-dedans et dévastateur que leur 1er sous certains aspects, mais largement aussi riche et intelligent sous d'autres. Ne vous laissez pas avoir lors des premières écoutes et persévérez si jamais il vous résiste: sa magie intrinsèque finira bien par vous emporter. Je me réjouis d'avance des nouvelles tournées du groupe dans notre vieille Europe, car ils défoncent vraiment sur scène. Pourvu que ça dure !



Rédigé par : Candira-Thon | 15/20 | Nb de lectures : 12842