Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’elle s’est faite attendre cette nouvelle livraison des français, en effet nous n’avions plus de nouvelles d’Anorexia Nervosa depuis le tonitruant « New Obscurantis Order » sorti en 2001. La pression devait être terrible pour donner suite à ce disque hautement inspiré. Aujourd’hui, trois ans après, arrive donc son digne successeur sur un nouveau, mais toujours français, label.
Musicalement les membres du groupe se sont depuis un moment affranchis de leurs influences, tant est si bien qu’Anorexia Nervosa joue du Anorexia Nervosa point à la ligne. Comme à son habitude le groupe s’est offert d’une production en béton armé dans son antre du Drudenhaus Studio. Outre la qualité intrinsèque des compositions cela lui confère une force de frappe encore plus grande en évitant de tomber dans la bouillie sonore qu’affectionne nombre de formations. Le combo avait poussé l’association éléments orchestraux / black métal à son paroxysme lors de sa précédente réalisation ; il aurait été vain de tenter la surenchère avec ce disque. Anorexia Nervosa l’a bien compris et loin de faire machine arrière le groupe continue de faire évoluer son black métal symphonique. Certes le changement n’est pas radical mais suffisant pour ne pas faire de ce Redemption Process un New Obscurantis Order n°2. Les compos sont toujours extrêmement denses et sont le théâtre d’accouplements frénétiques entre la furie des guitares et les arrangements symphoniques. Ces derniers, axés sur les cuivres et les violons, sont peut être moins « envahissants » que par le passé et mieux maîtrisés pour une efficacité encore plus grande, comme si le superflu avait laissé place à l’essentiel. Evitant le piège caractéristique du style consistant à tomber dans le pompeux à chaque nappe utilisée, les atmosphères créées ont cette touche épique qui transcende le morceau . Conscient du fait que trop de violence nuit à la violence, le groupe a inclus de nombreux passages plus lents, parfois mid tempo « whorship manifesto », dans ces compos. A l’image d’une oasis en plein désert, ces plages plus atmosphériques permettent de se ressourcer avant de (re)subir les foudres de la tempête. Un exemple parmi d’autre, « codex veritas » qui en plein milieu laisse les synthés créer une ambiance onirique avant un final cataclysmique ou les cuivres résonnent comme pour signifier la fin du monde. L’impact des déflagrations black se retrouve donc bonifié par la juxtaposition de passages plus lents sur lesquels groupe n’hésite pas à coller une mélodie pernicieuse. En effet, le très épique « sister september » faussement calme sur le début développe une mélodie qui aura tôt fait de pénétrer dans votre cervelle déjà bien malaxée par la violence maîtrisée des deux premiers titres. Le chant de Hreidmarr pour sa part est toujours aussi efficace, tour à tour furieusement écorché ou plaintif. A ce titre la passage en français déclamé de façon mélancolique sur « Worship Manifesto » apporte la touche émotionnelle adéquate au milieu de ce tourbillon de riffs. Même remarque pour le chant clair altier à la fin du titre « An Amen » qui se détache au dessus d’une batterie frénétique. Il est d’ailleurs amusant de constater que ce titre se termine comme il a commencé, sur quelques arrangements de synthés d’une incroyable légèreté, à se demander si la débauche de violence qu’ils encadrent est bien réelle.
Bref, ce Redemption Process regroupe tous les éléments qui ont forgé le son d’Anorexia Nervosa et qui disons le, forge le son de ce que doit être le black sympho aujourd’hui. Nous sommes en présence une fois de plus d’un album très dense qui ne s’apprivoise pas en une seule écoute. En comparaison de l’album précédent je dirais simplement : moins de brutalité constante pour un résultat tout aussi percutant. La preuve, bien qu’abasourdi par l’écoute je ne peux résister au plaisir masochiste d’appuyer sur la touche repeat.




Rédigé par : dark tranquilou | 18/20 | Nb de lectures : 13603