Alors comme ça ANONYMUS copule avec ses compatriotes barges MON ONC’ SERGE et se met à vendre des albums par wagons ? 15000 exemplaires auraient ainsi trouvé preneur, un score pour le moins honorable compte tenu de la ligne de conduite résolument traditionnelle des Canadiens ! Si cette performance était réjouissante il y a trois ans, elle pouvait également laisser craindre un changement de direction musicale du groupe, pour qui il aurait été tentant de s’éloigner du thrash au profit d’un style plus porteur d’un point de vue pécuniaire.

En guise de réponse à ces interrogations, Carlos Araya et ses amis nous balancent pas moins que leur album le plus bourrin à ce jour, une charge sanguinaire menée par Jean-François Dagenais (KATAKLYSM, MISERY INDEX), pour qui les frappes chirurgicales n’ont plus aucun secret et il le prouve encore une fois. « Chapter Chaos Begins » déclenche les hostilités par un blast rageur, le ton est donné, ANONYMUS n’a rien perdu de sa rage et encore moins de son inspiration ! Comme si le départ du guitariste Marco Calliari, loin de sonner le glas du groupe, n’avait fait que renforcer sa cohésion et son envie d’en découdre. « I Am Addicted » déboule à la suite de « Chapter » sur un tempo plus lent privilégiant les passages mélodiques, dévoilant toute l’étendue des nouveaux pouvoirs des thrasheurs anonymes. N’allez cependant pas croire qu’ils n’étaient auparavant qu’une bande de bûcherons rustres tout juste bons à tronçonner de la corde ; les mélodies ne sont pas une nouveauté en soi, c’est leur finesse et leur pertinence, tout autant que leur parcimonie, qui les rend sur ce nouvel album si efficaces. La tonalité générale est d’ailleurs carrément à l’agression : « Fonce Ou Crève » et « This Is War », qui méritent parfaitement leur nom, en sont de parfaits exemples, et renvoient directement aux plus belles speederies de l’Âge d’Or du thrash.

Faut-il pour autant cantonner « Chapter Chaos Begins » au rang des albums pour nostalgiques ? Bien entendu, non : l’inspiration voire l’essence même du disque sont à rechercher dans ce qui a pu se faire entre 1985 et 1995, mais l’exécution est si énergique et l’intensité si palpable qu’il a parfaitement sa place aux côtés de la multitude de nouveautés hardcore métal ou thrashcore mélodique en vogue en ce moment. Les blasts qui apparaissent sur quelques titres et les quelques riffs death disséminés ici et là aideront également les plus hermétiques à se faire à ces morceaux ressurgis du passé, sur lesquels il n’était pas encore indécent de mettre quelques solos.

ANONYMUS reste sur cet excellent cinquième album studio fidèle à lui-même et à ses origines, portant haut les couleurs d’un thrash à l’ancienne qu’on espèrerait voir revenir sur le devant de la scène, tant des réussites comme « Chapter Chaos Begins » prouvent que même s’il n’y a plus rien à inventer dans le style, il y a encore de belles pages à écrire.


Rédigé par : Dungorpat | 17,5/20 | Nb de lectures : 11989