Sorti l’été dernier dans le brouhaha pré-festivalier et le sprint final avant les grandes vacances, ANATA nous offrait là son quatrième album studio d’une carrière allant crescendo se rapprochant inexorablement d’une consécration qui aurait dû être la sienne voilà déjà quelques années.

Cette chronique arrive tardivement pour mettre la lumière sur un disque qui fera sans doute date dans la carrière des Suédois de Varberg. Mais devant les prouesses développées sur « The Conductor’s departure » il aurait été insensé de ne pas rendre justice à un disque qui s’apparente, sans contestation possible, aux sorties majeures de cette année 2006.

Une fois encore ANATA surprend son petit monde en remodelant son style pour déboucher sur un résultat radicalement différent de ces précédents albums. C’est un peu comme si ANATA prenait un malin plaisir à faire table rase sur son passé pour nous composer encore et encore un premier album plein de fraîcheur et de surprise. Alors qu’ « Under a stone with no inscription » faisait la part belle à un death metal technique et particulièrement vivace voir même brutal, « The Conductor’s Departure » mise tout sur la finesse et la subtilité.
A tel point qu’on a réellement l’impression d’entendre des groupes différents lorsqu’on enchaîne l’écoute de leurs deux derniers albums.

En fait le seul point commun entre les différentes galettes d’ANATA réside dans l’infinie minutie avec laquelle les Scandinaves composent leur musique pour inévitablement nous surprendre. Articulé autour de deux guitares majestueuses et propulsé par un batteur toujours plus stupéfiant, « The Conductor’s Departure » est tout simplement prodigieux. En l’espace des 53 minutes de cette galette ANATA nous brode une toile d’une complexité infinie qui fait la part belle aux harmonies les plus délicates. Travaillant à la manière des musiciens de jazz, les membres d’ANATA nous orchestrent des lignes instrumentales qui sont la plupart du temps totalement autonomes. Chaque instrument suivant un cheminement différent, c’est un peu comme s’ils s’interpellaient dans une savante conversation pleine d’émotion ou tout simplement de beauté. Et lorsque ces trames se rejoignent autour des mêmes tempos, des mêmes thèmes, c’est pour déboucher invariablement sur un passage hyper accrocheur ou brutal, voir les deux à la fois.
Pour peu qu’on soit amateur de death metal fouillé, difficile de rester insensible devant des titres comme « Better Grieved than fooled », « Cold heart forged in hell » ou encore le splendide « Children’s laughter » un instrumental à l’ambiance très aérienne.

Du côté de la production, c’est également le méga-panard avec un son d’une limpidité permettant d’apprécier ce disque dans sa plénitude comme dans son détail le plus insignifiant. Chaque accord, chaque note, chaque martelage de peau, chaque froissement de cymbale se détache avec une clarté qui met en avant la précision chirurgicale de l’exécution.

A l’aise dans les spirales mélodiques les plus délicates comme dans les accélérations les plus stupéfiantes, ANATA nous a engendré un disque exemplaire auquel une demi-page de superlatifs ne pourrait pas rendre justice. « The Conductor’s departure » est ni plus ni moins qu’un tour de force hallucinant qui laisse à des années-lumière derrière lui, la plèbe métallique commune qui pollue les bacs de nos disquaires. Délicatement stupéfiant et harmonieusement brutal, ce disque est un véritable joyaux dont on parlera encore dans les années à venir comme d’un modèle.


Rédigé par : Tonton | 18/20 | Nb de lectures : 16694