AMENRA - Mass V (Neurot/SRD) - 05/04/2013 @ 07h59
Pour appréhender totalement un album d’AMENRA il faut s’en imprégner, se jeter dedans corps et âme, en fermant les yeux et sans respirer. Se laisser enfermer dans le noir et espérer que la chute ne sera pas trop longue ni trop brutale. Lancer ce « Mass V » c’est entrer avec pour seul équipement sa bite et son couteau dans la caverne qui illustre la pochette. Ce n’est pas un voyage dans l’inconnu, on sait de quoi le groupe est capable mais on a beau savoir que ce ne sera pas agréable, on flippe quand même. Car il n’y à rien de plus flippant que l’absolue noirceur. Fondamentalement les Belges ne changent pas la donne et restent dans leur posthardcore teint de sludge et de doom marécageux mais avec malgré tout de-ci de-là des petites choses qui montrent que le groupe ne se tourne pas les pouces et se nourrit sans cesse des projets parallèles ou solos de ses membres rassemblés sous l’étiquette Church Of Ra dont le groupe reste la figure tutélaire. On sent qu’entre le précédent album et celui-ci les projets Sembler Deah, Kingdom, Syndrome, Chve et l’EP « Afterlife » ont pris de l’importance et imprègnent maintenant la musique d’AMENRA. Par petite touches certes, mais ce sont ces petites touches qui font toute la différence.

Avec « Mass III » et « Mass IIII », AMENRA était allé au bout du noir, persister dans cette même direction eût été peine perdue du coup les Belges ont quelque peu modifié leur manière de composer et de concevoir leur musique en troquant le noir total contre le gris et toutes ses nuances. Entre gris clair et gris foncé (Jean-Jacques Goldman si tu me lis, celle-là elle est pour toi). Mais surtout gris foncé car on ne se refait pas. Pourtant au premier abord tout semble comme avant : gros riffs lancinants, son massif et ultra chiadé (quelques écoutes au casque sont indispensables afin de s’imprégner des atmosphères et des détails sonores) et ambiance de fin du monde. Sauf que cette fois la Fin du Monde a eu lieu et les mecs du groupe se trouvent être les cinq seuls survivants, tout seuls comme des cons. Et cette situation est encore plus insupportable alors Collin va le crier. Très fort. Mais aussi le chanter, le dire, le chuchoter. On sent dans ce nouvel album une forme de résignation, de lente descente dans les tréfonds de la dépression. « A Mon Âme » du long de ses treize minutes exprime cet état de conscience mieux que n’importe quel titre composé par le groupe jusqu’alors. Si la musique n’a pas fondamentalement changé, c’est l’esprit et l’atmosphère qui est un peu différent. Moins massif, moins compacte, moins opaque aussi, « Mass V » n’est plus guidé par la colère mais par l’abandon. AMENRA varie plus ses effets, enchaîne les passages plus calmes presque ambiants avec les explosions sonores qui ont toujours fait sa force. Les parties plus « claires » renforcent la puissance des riffs qui tournent en boucle. Ces riffs sont plus fouillés aussi, possèdent plus de corps, plus de matières. Le travail sur les deux guitares est plus pertinent, plus réfléchi, plus travaillé. La basse aussi ne sert plus seulement à soutenir le tout, elle joue un plus grand rôle. « Nowena 9.10 » en est la parfaite démonstration. Colin lui aussi varie ses effets de voix. Ses cris sont plus désespérés que jamais, il crache ses tripes et vomit ses boyaux mieux que personne mais l’expérience de Chve, son projet solo, lui a donné de la confiance et de la maîtrise dans les parties les moins hurlées. Il n’a jamais été aussi important au groupe que sur cet album.

On sent encore l’attirance de groupe pour le Cult Of Luna des débuts et Neurosis dans leur son et leur manière de composer mais on voit plus la touche AMENRA. Comme pour symboliquement boucler la boucle, le groupe a invité Scott Kelly à poser ses cordes vocales sur le disque. Le son de « Mass V » développe une certaine force tellurique, difficile à expliquer offrant aux Belges l’opportunité de composer une musique presque minérale. Presque vivante. Une musique qui évoque des images, des sensations, des impressions parfaitement retranscrites via l’artwork et l’univers graphique général du groupe. « Mass V » est un travail global d’un très haut niveau et témoigne d’un groupe qui n’a jamais été aussi à l’aise avec lui-même et qui s’est trouvé définitivement. Alors non, fondamentalement la musique ne change pas, oui au premier abord AMENRA fait toujours la même chose. Mais quand on creuse, quand on entend la musique plus qu’on ne l’écoute, on sent la différence. Comme toujours, le Diable est dans les détails.


Rédigé par : Seb On Fire | 16/20 | Nb de lectures : 13143




Auteur
Commentaire
Alain Frost
Membre enregistré
Posté le: 05/04/2013 à 12h22 - (106819)
J'ai plutôt tendance à le trouver encore plus noir que les précédents en ce qui me concerne.

En tout cas c'est le premier album du groupe qui me choppe par les tripes directement, alors que j'ai eu un peu de mal à rentrer dans les précédents au départ.

Plus le temps passe plus j'apprécie Amen Ra: groupe hyper intègre, sans compromis et qui va vraiment au bout de son concept quitte à y laisser des plumes (la sensation de désespoir qui transpire dans cet album donne froid dans le dos à certains moments).

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