Si l’innocence et la fougue de la jeunesse devaient être résumées en musique, ce premier album d’ALPHA TIGER (anciennement SATIN BLACK) serait tout indiqué. Marquant les débuts discographiques de ce nouveau venu sur la scène metal germanique, "Man Or Machine" se démarque habilement d’un genre devenu par trop sclérosé et standardisé. L’urgence du propos, cette envie débordante de bien faire et de bouffer le monde, matérialisées ici dans un savant mélange de speed mélodique et de NWOBHM, susciteront chez l’auditeur un brin de nostalgie, mais surtout une bonne dose d’espoir pour les années à venir.

Tout comme HELLOWEEN en son temps, nos jeunes loups ont été signés par Karl Walterbach, pour le compte du nouveau label Sonic Attack, fraîchement lancé outre-Rhin. Pour les étourdis du fond, on rappellera que ce monsieur a été pendant de nombreuses années le boss de la mythique maison de disques Noise Records (CELTIC FROST, KREATOR, RUNNING WILD, entre autres grands noms). Dans l’esprit comme dans la musique, ALPHA TIGER figure parmi les descendants directs des citrouilles teutonnes. Pour autant, se limiter à cette comparaison facile et évidente serait aller un peu vite en besogne.

Derrière cette pochette d’album très manichéenne (la nature, la modernité, le bien, le mal, tout ça quoi …), se cache un goût prononcé pour le heavy à l’ancienne, celui que l’on pratiquait communément au milieu des années 1980. « Fight Against The Time » se plaisent d’ailleurs à scander nos petits gars… Outre l’influence d’HELLOWEEN (pour le côté « power metal à l’allemande » de la chose), on sent également que le quintette a passé de longues heures à disséquer la discographie d’IRON MAIDEN afin d’en tirer la substantifique moelle. Référence incontournable dont l’ombre plane sur la totalité de "Man Or Machine", la Vierge de Fer n’en finit plus de créer des vocations. Le vocaliste Stephan Dietrich ne nous contredira pas sur ce point, lui qui évolue dans un registre à mi-chemin entre Bruce Dickinson, Michael Kiske et Geoff Tate. Pour le reste, des parties de twin guitars aux rythmiques galopantes, en passant par nombre de cavalcades effrénées, toute la panoplie des gimmicks « à la Maiden » est ici restituée à la quasi-perfection.

La marge de progression des Teutons n’est pourtant pas dérisoire. Entre une production qui laisse encore à désirer (trop de reverb’ tue la reverb’), un ensemble manquant parfois de variation et de refrains killers, et ce chant suraigu qui pourra en rebuter certains, des améliorations devront nécessairement être apportées dans un futur proche. Mais dans le cas présent, l’authenticité et l’honnêteté priment sur les imprécisions dues à l’inexpérience. Et puis, avec des morceaux de bravoure comme « Men Or Machines » (sur lequel sont prononcés des extraits du 1984 d’Orwell) ou « Martyr’s Paradise », on sent bien que les Allemands possèdent déjà ce petit quelque chose en plus qui fait la marque des grands. A eux maintenant de l’exploiter et de passer à l’étape supérieure.

Aux côtés de ses compagnons de la nouvelle garde du heavy (les ENFORCER, STEELWING et autres WHITE WIZZARD en tête), ALPHA TIGER s’inscrit pleinement dans le cadre du revival que connaît le style depuis quelques années. "Man Or Machine" ne devrait à ce titre pas manquer de ravir tous ceux qui suivent d’un œil attentif l’émergence de ces nombreux groupes aux velléités passéistes clairement assumées.


Rédigé par : up the irons | 14.5/20 | Nb de lectures : 12327