Cela fait quelques temps déjà que je vous ressasse dans les colonnes de VS mon amour pour PRIMORDIAL, mais il existe pour moi un autre groupe avec une démarche tout aussi sincère et quelque part similaire, à savoir les Américains d'AGALLOCH. Si pour beaucoup le groupe nous a livré une discographie parfaite jusqu'au sublimissime "The Mantle", le précédent opus semblait avoir légèrement déconcerté certains fans de la première heure. Aujourd'hui encore je m'interroge sur ces critiques, "Ashes Against the Grain" était certes plus accessible, plus accrocheur, plus mélodique, mais la magie s'opérait toujours! Comment ne pas succomber à la froideur et à la mélancolie suscitée par les fabuleux "Limbs", "Fire Above, Ice Below" ou autre "Falling Snow" ? Je l'avoue, j'ai érigé "Ashes Against the Grain" sur un piédestal et je dois être l'un des rares fans d'AGALLOCH à le trouver supérieur à "The Mantle".

Autant le dire de suite, j'attendais "Marrow of the Spirit" comme le messie, un album que j'imaginais reprendre les grandes lignes de son aîné, tout en les sublimant de somptueux passages en chant clair ponctués de breaks encore plus glacials.

Dérouté, voilà l'étrange impression laissée par "Into the Painted Grey" qui a la lourde charge d'ouvrir les hostilités sur "Marrow of the Spirit", car oui, ce titre possède une entrée en matière des plus virulentes. Qui aurait pu imaginer un album d'AGALLOCH s'ouvrir par une longue minute de blasts ? Et qui plus est, avec un son véritablement brut de décoffrage. Tout cela est évidemment ponctuel, le dark/folk légendaire d'AGALLOCH reprenant ses droits sur le reste de l'album, néanmoins, on se rend vite compte qu'il faudra plusieurs écoutes pour assimiler "Marrow of the Spirit" dans son intégralité. Enfin ça, vous devez déjà le savoir, les titres longs, riches et variés sont la marque de fabrique d'AGALLOCH, mais le groupe a tout de même repoussé ses limites avec ce nouvel album.

L'intro mise à part, on se retrouve avec seulement cinq compositions pour plus d'une heure de musique, la palme revenant à "Black Lake Nidstång", second plus long titre jamais composé par AGALLOCH après "Scars of the Shattered Sky" qui figurait sur l'édition vinyle de "Ashes Against the Grain". Malgré cela, le groupe réussit une fois de plus l'exploit à ne pas sombrer dans la redite ou le redondant. On se laisse ainsi facilement happé dans l'univers de "Marrow of the Spirit", un univers bien plus sombre qu'à l'accoutumer. Je pense d'ailleurs qu'il s'agit du premier AGALLOCH où l'obscurité l'emporte sur la mélancolie. Mais que les maniaco-dépressifs se rassurent, vous aurez votre dose de spleen grâce à "Marrow of the Spirit", un shoot direct en intraveineuse encore plus efficace qu'un CDD chez France Télécom.

Voilà pour le fond. Dans sa forme "Marrow of the Spirit" se veut plus dur, plus raw, que tout ce que le groupe a pu faire dans le passé. Les accroches se font ici sur les leads, les soli ou les passages acoustiques qui nimbent des rythmiques électriques souvent effrénées. Le chant clair est plus discret, peut-être moins envoûtant que ce que l'on pouvait par exemple entendre sur un "Not Unlike the Waves", mais son utilisation contribue toujours autant à magnifier les atmosphères à l'image des vocaux plaintifs de "Black Lake Nidstång", chargés d'émotions mais surtout de désespoir.

Je pourrai disserter encore longtemps sur "Marrow of the Spirit", mais pour être honnête, jamais je n'arriverai à vous retranscrire correctement les sentiments qu'il éveille chez l'auditeur. Cet album est fascinant, grisant, captivant et surtout, totalement indispensable.




Rédigé par : wasted | 18/20 | Nb de lectures : 14233