Au fil du temps, Agalloch s'extrait peu à peu de la confidentialité dans laquelle certains rêveraient de les préserver. Le temps s'est même longuement écoulé pour les mordus du résineux entre les derniers EP de 2004 et ce nouvel album, le troisième seulement en dix ans d'existence. Quatre très longues années entre "The Mantle" et ce "Ashes Against the Grain". Et pour récompenser les fans de leur fidélité, le groupe présente ce nouvel opus dans une édition deluxe en bois, limitée à 500 pièces, contenant autocollant, cartes postales, string et objet collector. Ah, on me signale à l'oreillette que le string n'y est pas. Je vous laisse aborder la description de l'objet précieux dans les commentaires, n'en disposant pas moi-même...

Comme pour ces précédents opus, Agalloch propose près d'une heure en compagnie de la mélancolie incarnée. Hormis la longue outro bruitiste de sept minutes, les sept titres restants sont de longs errements nostalgiques où l'omniprésence des groupes-phares suédois de la seconde moitié des 90's est plus que perceptible. Ces longs mid-tempos de doom/death sont mélodiquement plus qu'influencés par un Katatonia époque "Brave Murder Day" et consorts. Là où "The Mantle" ou "Pale Folklore" proposaient des cassures rythmiques plus progressistes, rappelant ponctuellement les idées du "Morningrise" d'Opeth, "Ashes..." se recentrent sur des thèmes à faire pleurer un caillou servis par une composition rythmique assez sommaire. Ne voyez rien de péjoratif dans ma prose, les compos sont bien montées et évoluent lascivement mais toujours efficacement. Néanmoins, la moisson de styles accolés au groupe (notamment les mentions "black" ou "neo-folk") me paraît largement exagérée, à l'écoute d'un résultat finalement étiquetable et pas si original que ça.

Agalloch applique avec brio les règles du genre, dans des titres d'une grande homogénéité. L'espace sonore est parfaitement maîtrisé et la production très propre, propice à la quiétude. La magie opère bien, emportant l'auditeur dans des élans de mélancolie, notamment dans le superbe "Bloodbirds". Efficace émotionnellement, mais bien peu aventureux. Agalloch reste sur ses acquis, dans un album plus accessible que les précédents. Je reste également perplexe devant un chant dark/black, si j'ose l'appeler ainsi, digne d'un cancéreux du poumon en phase terminale. John Haughm ne propose qu'un murmure, un souffle rauque, que je trouve peu convaincant par rapport aux influences pré-citées. C'est d'autant plus gênant que les chants clairs sont plus absents que dans les précédentes fournées. Cette voix légèrement nasillarde si caractéristique manque un peu.

Le noyau dur des fans du groupe ne démordra pas des intenses qualités de ce "Ashes against the Grain". Agalloch y laisse pourtant une part de sa personnalité. Un bon album bien mélodique qui ravira les nostalgiques du roulage de la galloche devant un bon feu de cheminée. Une pièce essentielle? Non, pas à mon sens. Quitte à faire hurler, je n'y vois qu'un bon remake américain de ce qui a déjà été dit en Suède. Néanmoins, "Ashes against the Grain" a de bonnes qualités mélodiques qui rendent son écoute agréable et qui peuvent faire grandement apprécier l'album. Cela laisse présager de prestations live efficaces. Mais cela s'arrête là...


Rédigé par : Prince de Lu | 14,5/20 | Nb de lectures : 15160