Premier album pour Aequinoctium Sanguinis, groupe originaire de Bordeaux, L’Arbre aux Esprits s’inscrit dans un pagan black metal solide et bien foutu, qui ne renonce ni à l’agressivité propre au black, ni aux mélodies enlevées propre au pagan.

"Rite", le titre d’ouverture, pose parfaitement l’ambiance. Ce mélange subtil et équilibré entre guitares acérées et ambiances pagan se retrouve dès "The revenge of Pagan Priestless", où les claviers, paradoxalement aussi discrets qu’essentiels dans la musique du groupe ("Forgotten Gods"), apportent une dynamique intéressante, sans que les guitares ne soient reléguées au second plan. L’orchestration est riche ("Masters of Red Sunset"), la rythmique est enlevée et les arrangements sont nombreux (l’écoute répétée de "The Revenge" montre un titre aux structures chargées en informations, les petits arrangements sur la batterie sur "Les Runes de Sang"). Car l’une des forces du groupe, à l’instar du dernier Cruachan par exemple, est de parvenir à maintenir un certain degré de violence/agression crédible en dépit d’une musique globalement portée sur les ambiances « celtes ».

S’il est possible de regretter certaines envolées de voix claires de la chanteuse claviériste ("Stone Warriors", "Masters of Red Sunset") – question de goût, pas de justesse du chant, aucun problème de ce point de vue – qui brisent un peu la dynamique, il faut cependant avouer que ce même chant apporte son lot de respirations dans une musique généralement axée sur des tempis plutôt élevés.

Cependant, la domination globale du chant féminin au détriment, parfois, des vocaux plus death, est également un point qui me paraît regrettable. La recherche d’un plus grand équilibre entre les deux chants apporterait, à mon sens, plus de force à l’ensemble quand la situation actuelle tend à amoindrir la portée de certains titres. De même, certains aspects de cette voix (pourtant très juste, j’insiste) sont également de trop pour ma part, comme les petits chuchotements traînants en fin de morceaux ("Masters of Red Sunset" par exemple, ou les chœurs banals sur la fin de "Epona’s Wrath", inutiles à mon sens). Dommage.

Certaines trouvailles ou travaux sur les structures apportent leur lot d’idées qui renouvellent le propos du groupe, comme ces rythmiques plus saccadées sur "Epona’s Wrath", qui confèrent une coloration particulière au morceau, très guerrière, comme le départ de "La légende de Bloodmoon", très heavy. Ou encore, sur le titre suivant, l’intro mêlée de piano et de guitares saccadées ("Rebirth of Pagan Time"), morceau qui progresse lentement mais de façon quasi théâtrale. Quant au titre "Le Chaudron de Daghdha", chanté en français, le risque de basculer vers un pagan pouet pouet de bas étage est évité là encore en raison de structures bien travaillées et d’un son, il faut le souligner, suffisamment organique pour bien mettre en valeur les morceaux (il en va de même sur "Les Runes de Sang").

Aequinoctium Sanguinis débute sa carrière sous de bons auspices, en proposant une musique variée, honnête et très soignée. A la différence de beaucoup d’autres, ils font aussi l’effort (qui ne devrait pas en être un…) d’adresser leur CD (oui, oui) accompagné d’un press book très soigné également. Une façon comme une autre de respecter ceux qui vont les chroniquer en somme.

Un premier essai de belle qualité, sur lequel les amateurs de pagan jetteront leurs oreilles en toute quiétude.




Rédigé par : Raziel | 14/20 | Nb de lectures : 9440