Il est assez étonnant de voir un jeune groupe français signé sur le label hollandais Karmageddon Media. Cette formation est d'ailleurs la preuve vivante qu'il ne faut jamais précipiter les choses dans le music-business. Ces parisiens existent depuis maintenant 5 ans et ils ont eu l'intelligence de laisser murir leur projet assez longtemps et ne pas chercher à sortir une réalisation à la va-vite au risque d'être signés chez n'importe qui (non, pas de noms !). Si Karmageddon n'est bien sûr pas une major, c'est un label sympathique qui compte dans ses rangs pas mal de bons groupes et qui semble faire un travail promotionnel intéressant. C'est donc tout benef pour les AVA.
Ce premier disque est donc une pièce de metal dark et gothique fortement influencé par les prémices de cette scène à l'époque où Theatre of Tragedy et quelques autres avaient lancé l'énorme engouement pour les chants féminins dans le metal. TOT est d'ailleurs l'influence la plus marquante de AVA et ce n'est pas une insulte de faire ce rapprochement. De cette scène, AVA possède le côté légèrement symphonique, renforcé par le chant soprano de Céline mais qui ne s'envole jamais dans des sphères trop grandiloquentes. On retrouve aussi l'utilisation assez redondante du piano. Pourtant, le groupe fait de la musique encore assez sombre pour intéresser la plupart des métalleux purs et durs. Des morceaux chargés de metal sont bien présents ("In the throes of apocalypse" qui rappelle le Tristania des débuts, "Dementia" très rampant). Si l'apport des growls pourrait paraître caricatural à beaucoup, leur présence est intéressante car la dualité des vocaux permet de conserver l'aspect un peu théatral nécessaire à cette musique. Certains titres sont plus intimistes et leur structure est plutôt basée sur les claviers et le chant ("Phoney icons", "Les méandres de l'âme"). Dans tous les cas, l'exploitation de l'organe de la chanteuse a clairement été la priorité du processus de composition. Un morceau comme "Abstract senses", mon préféré (même s'il n'est pas au saumon...), est un bon révélateur du potentiel de AVA car il détaille presque toutes les facettes du groupe au travers d'une trame classique mais véritablement accrocheuse. Certes, l'originalité n'est pas transcendante mais le style est étudié avec dévotion et on sent un vrai travail de fond pour ce qui est de la conception du disque. La production est d'un très bon niveau, même si je regrette un peu le manque de peps de la batterie et certains passages de claviers un peu trop directs. A quelques rares instants, je me suis senti irrité par des synthés trop présents, qui semblent prendre le pas sur un travail guitaristique qui devient du coup un peu timide. Je ne ferai pas l'affront de vous parler de la laideur terrifiante de la pochette et les amateurs de groupes au chant féminin seront dans tous les cas aux anges. D'aucuns trouveront que AVA n'apporte rien de bien neuf et je partage un peu leur avis. "Abstract senses" m'a agréablement distrait mais ne m'a jamais transcendé. Peut-être que tout a déjà été dit dans ce style ? C'est bien possible mais les qualités de AVA font qu'ils peuvent largement se permettre d'apporter leur petite pierre à l'édifice. Le leur reprocher serait de toute façon déplacé. Bien.


Rédigé par : Loufi | 14,5/20 | Nb de lectures : 9184