Un soir, je discutais tranquillement musique avec une amie quand au détour de la conversation je lui annonce que je dois faire la chro du EP d’ADMIRALS ARMS pour VS, là elle me regarde et me dit «Ah ben c’est facile, tu dis que c’est du Norma Jean.» Alors certes les liens qui unissent les deux groupes sont connus, ADMIRAL ARMS est managé par l’ex batteur de Norma Jean, certes la musique des Essonniens emprunte pas mal d’éléments à Norma Jean mais les réduire à un clone du combo ricain serait un brin réducteur. Le groupe s’est fait connaître en étant la première formation française à participer au fameux Vans Warped Tour, embarqué dans les bagages de The Chariot. Auréolé de cette toute nouvelle gloire le groupe revient avec un nouvel EP 5 titres et un line up remanié en profondeur, trois musiciens sur cinq ont changé par rapport à leur précédente sortie. Si le roster a changé, qu'en est-il de la musique ? Eh bien elle a pas mal évolué elle aussi au contact des pointures ricaines auxquelles le groupe s’est frotté.

Ce qui surprend au premier abord c’est la production beaucoup moins lisse et nette que sur « Cords&Colts ». Cette fois, il y a de l’épaisseur et de la saleté dans le son d’ADMIRALS ARMS. Une profondeur qui apporte pas mal de matière aux titres du groupe, qui rend la musique plus vivante et habitée. Les guitares notamment, dont les cordes semblent avoir rouillé, gagnent une lourdeur bienvenue contrastant avec une batterie sèche et légèrement en retrait qui sonne « vrai ». Ajoutez à ça une basse qui file toutes voiles dehors et ça vous donne un son presque crust. Le « presque » est important car on sent que tout cela est voulu et extrêmement travaillé. Deuxième chose qui accroche l’oreille c’est la voix. Selon les affinités de chacun, elle constituera un des points forts ou un des points faibles du groupe tant elle est sur la corde raide, en équilibre instable entre justesse et fausseté. Hendrick paraît constamment être au bord de la rupture. Des cordes vocales et d’anévrisme. Le chant typé screamo est véritablement arraché des entrailles d’un chanteur investi à 100% dans sa tâche. Lui aussi fait vivre ses lyrics et ses mélodies vocales. Certains trouveront ça insupportable, d’autres, c’est mon cas, apprécieront ces cordes vocales éraillées qui finalement s’accordent parfaitement aux ambiances distillées tout au long de ce EP d’autant plus que, pour la première fois, le groupe s’ouvre au chant clair.

La musique proposée par les Franciliens oscille sans cesse, comme située sur deux plaques tectoniques en perpétuelle opposition, entre mélodie et violence, calme et tempête sans qu’aucune des deux parties ne remporte de victoire définitive. Les différentes influences du groupe se mêlant pour composer une musique, qui, à défaut d’être super originale, se révèle fort bien troussée et merveilleusement exécutée. Le plus ricain des groupes français a bien appris sa leçon et parvient à l’appliquer d’une façon plus que correcte. Les morceaux sont vivants, variés et accrocheurs. Je pense à « Ideal Means Nothing », le titre d’ouverture au refrain implacable et à « The Thirteen Out Of Tune Trumpets », le meilleur morceau composé par le groupe à ce jour, représentant parfaitement la tension contenue dont regorge ce EP. On notera aussi un featuring parfaitement dispensable de Oli Sykes ainsi que la version démo d’un titre du futur premier album du groupe et des bonus vidéo. J’ai qu’à dire que « C’est comme du Norma Jean ! ». Oui, c’est vrai, ça sonne un peu comme du Norma Jean mais pas que.


Rédigé par : Seb On Fire | 07/10 | Nb de lectures : 12191