Ça y est, les Français se mettent sérieusement au Metal Avant-gardiste. Mais le vrai de vrai, celui qui trouve ses racines à la fois dans l’art norvégien d’ARCTURUS, SOLEFALD et consorts, ainsi que des formations plus barrées mais tout aussi artistiques comme SLEEPYTIME GORILLA MUSEUM. Ce sont d’ailleurs ces 3 formations que cite, parmi d’autres, le groupe ABSTRUSA UNDE. Groupe formé en 2007 autour de Thibault Schwarz (ex-AVE TENEBRAE) qui se pose plus comme un collectif, avec dans ses rangs des membres présents et passés de WORMFOOD, BORGIA et TALIESIN, ainsi que des membres de session préposées aux instruments classiques (violoncelle, clarinette). En tout, ABSTRUSA UNDE regroupe donc 10 musiciens qui ont donné naissance à Introspection, le premier album de ce projet ambitieux, qui succède à la démo 3 titres de 2008.

Sorti en autoproduction fin 2010, Introspection connaît ici une deuxième naissance, avec cette réédition signée Apathia Records. Et à l’instar d’ÖXXÖ XÖÖX signé chez le même label, ABSTRUSA UNDE a aussi choisi de conter certaines vocalises dans une langue inventée. Musicalement, le groupe se pose comme une formation avant-gardiste inventive, qui n’en fait pourtant pas des tonnes. Le Black se résume surtout aux riffs parfois acérés, à la batterie et aux vocaux « harsh », mais pour le reste une musique baroque et progressive prédomine, appuyée par les instruments classiques, le chant féminin lyrique et les divers claviers. ABSTRUSA UNDE trouve donc un certain équilibre entre Black progressif/avant-gardiste à la ARCTURUS, SOLEFALD et BORKNAGAR ; et le Metal artistique à la SLEEPYTIME GORILLA MUSEUM, STOLEN BABIES ou DIABLO SWING ORCHESTRA, en moins barré cependant. Et en plus digeste du coup, car malgré son apparat « expérimental » Introspection passe comme une lettre à la poste (hors périodes de fêtes).

Dès "Hamsa Lonri", le chant féminin pose l’atmosphère particulière de ABSTRUSA UNDE, ainsi que les claviers un peu vintage, qui se marient parfaitement avec l’ensemble et notamment le côté purement « Metal » et ses vocalises Black et riffs accrocheurs. L’effort est prolongé avec l’excellent "Al Aklorodan" qui regorge de passages très prenants, notamment grâce au travail sur les arrangements en tout genre, pareil pour "Carrousel" qui nous balance les meilleurs riffs et mélodies du disque. Introspection reste tout de même un album globalement contrôlé qui ne part jamais dans des tempos hystériques ou autres plans alambiqués, du coup le groupe n’ose pas tant que ça et reste bloqué sur le schéma chant féminin + Black Metal + artifices baroques. Une légère routine s’installe alors dès l’interlude "The Gutter", malgré le début très atmosphérique et le break électronique de "Hastra Nä", ou le plus rentre-dedans "Lost for Life". Et après le « classique » "Suune Kvalta", ABSTRUSA UNDE s’offre un sursaut final avec "4.12.12.12.1", un instrumental électronique et orchestral tout à fait jubilatoire.

En 51 minutes, ABSTRUSA UNDE montre de belles choses, dans un style qui n’a rien d’exceptionnel au fond mais qui sonne déjà très personnel. Introspection, qui ne part pas dans des délires frappadingues, peut séduire ceux qui sont hermétiques au style avant-gardiste, de par la relative accessibilité de l’ensemble. Dommage que cela se fasse au détriment de la créativité, et l’amateur de Metal avant-gardiste comme moi en attend un peu plus. Le groupe doit encore améliorer quelques petites choses, comme la production des éléments « Metal » un peu juste parfois, mais Introspection est un très bon début avec de très bonnes idées et quelques passages réussis et bien sentis. Prometteur à défaut d’être révolutionnaire, Introspection est un album à tester pour tout amateur de Metal qui sort des sentiers battus.


Rédigé par : ZeSnake | 14.5/20 | Nb de lectures : 12141