Quatrième album pour les Slovaques d’ABORTION et le second seulement sous l’étendard extrême des « productions Obscènes » qui n’en finissent pas de nous dénicher des groupes tous plus bruitistes les uns que les autres. ABORTION n’échappe pas à cette règle avec un authentique album de grind-mince-core (qui n’est en aucun cas une musique de régime contrairement à ce que tout le monde pense).
Malgré tout le tintamarre que suggère une appellation aussi ronflante, ABORTION n’est pas aussi vacarmesque que l’on pourrait le croire. C’est vers une vision plutôt old school du grind qu’il nous renvoie, avec des titres brefs et très variés, influencés aussi bien par les groupes de speedcore de la fin des années 80 («Money is your God », « Keep it silent ») que par le punk (« No talk to communists », « I’m not permanently sick ») ou encore par le bon vieux grind des familles (« Pig power », « We all are snakes »).
On remarque également, en se penchant quelque peu sur le livret, un goût prononcé pour l’autodérision et les textes sarcastiques parfois engagés qui faisaient le charme des groupes d’antan (mode vieux con « off »).
Question chant, les voix se partagent entre deux styles bien distincts un peu à la façon d’AGATHOCLES : un growl caverneux très néandertalien et les borborygmes hideux du gargarisme matinal visant l’extraction de glaires à homologuer dans le livre des records.
Si le blast se fait, ici, rare, le feeling est présent et fait miraculeusement passer la pilule d’une mise en place parfois approximative. Les trentenaires d’ABORTION ne se prennent pas franchement au sérieux, comme le démontrent ces quelques extraits désopilants du MONTY PYTHON flying circus qu’on retrouve entre certains morceaux.
Plus exactement, ABORTION excelle dans l’exercice difficile qui consiste à jouer les funambules sur le fil délicat qui sépare le sérieux de la parodie, comme le démontre le choix des deux reprises proposées sur ce disque. Notre trio slovaque a décidé de rendre hommage à deux formations pour les moins antagonistes : à ma gauche MINISTRY avec une cover de « N.W.O. » dont je ne sais toujours pas quoi penser et à ma droite les, plus confidentiels, LAWNMOWER DETH dans une version très punk de « Icky ficky ».
Malgré ce côté caricatural, l’impression d’ensemble de « Gonna be worse » est tellement fraîche et spontanée qu’on se prend un peu au jeu de ce sympathique trio et à son enthousiasme décérébré communicatif. En revanche, ils n’étaient pas forcés de nous infliger ces cinq minutes de distorsions de guitares pour terminer l’album. On aurait pu faire sans, cela n’aurait pas été plus mal…


Rédigé par : Tonton | 14/20 | Nb de lectures : 9662