On ne va pas tourner autour du pot bien longtemps, nous avons en ABIOTIC un nouvel avatar du Brutal Death technique moderne qui pullule aux states. Enfin, ça ne sera pas aussi simple que ça, car aujourd’hui pour apporter quelque chose de significatif au genre, il faut montrer qu’on en a dans le calbute. ABIOTIC est un quintette floridien (terre de Death-Metal s’il en est) existant depuis 2010 qui a mis toutes les chances de son côté en signant chez Metal Blade pour son premier album, qui fait suite à un EP autoproduit sorti en 2011 (A Universal Plague). Un parcours sans surprise, qui va donner naissance à un vrai-faux premier album full-length, Symbiosis, qui comporte les 7 morceaux de l’EP plus 3 nouveautés. Les fans de la première heure vont donc être un peu frustrés, mais les autres vont ici découvrir ce Death technique qui va leur arriver en pleine tronche sans prévenir. Parce que ABIOTIC est du genre à ne pas faire les choses à moitié…

Alors ABIOTIC, c’est quoi précisément ? Un gros condensé de gros Death moderne qui tache, de technique furieuse et de Deathcore bien puissant. Prenez un gros récipient, et mettez dedans de grosses louches de THE FACELESS, CRYPTOPSY, ARCHSPIRE, BENEATH THE MASSACRE, ANOMALOUS, SPAWN OF POSSESSION ou autres ingrédients du même acabit qu’il y a dans votre cuisine, ajoutez une pincée de MESHUGGAH et de SUICIDE SILENCE et mélangez le tout vigoureusement pendant 43 minutes. Ça fera de gros grumeaux, ça collera un peu et le résultat sera un peu indigeste à la première bouchée, mais vous aurez un plat du genre gastronomique et bourratif. Ma métaphore alimentaire étant un peu vague, je vais développer un peu : l’espace de 10 morceaux, ABIOTIC va donc aligner jusqu’à l’indigestion plans alambiqués qui décapent, envolées de sweepings, solos hallucinés, gros breakdowns coup-de-poing et parties de batterie apocalyptiques, avec quelques ambiances pour aérer un peu la marchandise. Le tout a plutôt un fumet Deathcore, ce qui est confirmé par l’alternance de growls bien profonds et de screams à la THE BLACK DAHLIA MURDER partant dans tous les sens, et par le fait que les breakdowns et autres assauts syncopés se taillent quand même la plus grosse part du gâteau.

Autant dire qu’ABIOTIC n’est pas à mettre entre toutes les oreilles. On s’approche donc très nettement de l’aspect étouffe-chrétien d’un ANOMALOUS ou d’un ARCHSPIRE (les groupes en A poutrent sévère, on dirait) sans tomber dans l’excès d’un BRAIN DRILL par exemple. Les breakdowns en masse rendent le tout assez efficace mais dans l’ensemble, Symbiosis est quand même particulièrement chaotique et il ne va pas être facile d’accrocher à ce disque sans renfort de paracétamol (voire d’ibuprofène). Ça envoie des rythmiques et des sweeps dans tous les coins et quel que soit l’endroit où tu regardes, tu as le chanteur qui vient te crier dessus à 2 centimètres de ton nez (sauf si tu ouvres les yeux pendant un solo ou pendant les morceaux instrumentaux). Prenons notre respiration, enfilons une paire de gants et regardons ce qu’il y a à tirer de ce bouzin : l’intro "Metamorphilia" est sympa grâce à ses mélodies futuristes. Les divers breakdowns de "Vermosapien" arrachent. "A Universal Plague" introduit quelques ambiances cybernétiques réussies. "Hegira" nous abreuve de belles mélodies Thordendaliennes. "The Singe" est un morceau plutôt solide. L’interlude bien sombre "Exitus" est excellent. Les solos de "Facades" sont magnifiques.

Le reste est, avouons-le, à l’image d’un "Conquest of Gliese", un gloubiboulga Brutal-technico-deathcore un minimum contrôlé, très bien composé mais quand même un petit peu foutraque, voire même bordélique et insupportable par moments. Notamment pour un défaut : le chant Black, présent en légère majorité, qui est particulièrement casse-bonbons. ABIOTIC en fait des caisses et Symbiosis finit par être fatiguant, éprouvant et lassant à l’écoute, surtout que 43 minutes c’est limite beaucoup pour un style si dense et 3 morceaux dépassent quand même 6 minutes ! Alors oui, ça décape sans vaseline, les breakdowns sont percutants à souhait surtout avec une pareille prod, les zicos savent manier le manche et les baguettes, c’est souvent jouissif voire impressionnant, mais ABIOTIC érige ici en maître les termes « démonstratif », « stérile » et autres adjectifs souvent utilisés pour des groupes de ce genre par leurs détracteurs. Détracteurs qui ne manqueront pas d’ajouter ABIOTIC à leur black-list, qui cumule pas mal d’exagérations propres au style. De leur côté, les amateurs du genre qui ont encore quelques cellules auditives en fonctionnement optimal apprécieront Symbiosis à sa juste valeur. Quant à moi, tout ceci est un peu… too much pour mes conduits auditifs, même si ça peut faire office de défouloir à l’occasion.


Rédigé par : ZeSnake | 13/20 | Nb de lectures : 12562