Le 1er avril 2014 - Le Divan du Monde - Paris.

Quand on pense concert de black metal, le Divan avec sa jolie scène, son rideau rouge à l'ancienne, son balcon et son beau plancher, n'est pas le premier endroit qui nous vient à l'esprit. On pense plutôt Nouveau Casino ou Glaz'art et pourtant c'est bien sur la cossue salle parisienne que les hordes sataniques venues des Enfers ont décidés de s'abattre en cette journée mondiale du troll et de la blague. Si les ricains de Vital Remains se sont montrés plutôt festifs, les norvégiens n'avaient, eux, pas du tout le cœur à rire. Hoest qui assure le chant dans Gorgoroth, ne correspond visiblement pas à la définition d'un gay luron. Mais nous y reviendrons, d'abord il faut se pencher sur la prestation du groupe d'ouverture, les locaux de MOONREICH, tout auréolés d'un dernier album plutôt convaincant, avaient la lourde charge de chauffer le public. Jamais évident quand on sait que les fans de black metal ne sont pas les plus expansifs ni les plus aptes à retourner une salle. Black Metal is serious business.

MOONREICH s'échine don à faire bouger le public parisien qui se contentera, au final, de quelques hochements de têtes et devil horns envoyés en direction de la scène. Si sur disque MOONREICH convainc parfaitement, sur scène c'est plus compliqué. Le quatuor se montre assez timoré, occupant difficilement l'espace malgré un leader impliqué dans son rôle. Les morceaux sont pourtant bons, bien exécutés, spécialement ceux tirés du dernier album (j'avoue humblement ne pas connaître les travaux précédents), mais le groupe manque de bouteille sur scène, ça se voit clairement. Bénéficiant pourtant d'un bon son, pour un groupe de première partie, et d'un public déjà conséquent alors qu'il est à peine 19h quand ils commencent leur set, ils ne parviennent pas à transcender leur art et à lui apporter cette petite touche d'authenticité et de violence qu'on retrouve en live. Maintenant, MOONREICH à livré une bonne prestation, un peu trop appliquée, sans folie et sans génie. Un concert de bon élève, sérieux dans ses affaires, carré et professionnel mais sans parvenir à dépasser cet état de fait. On ne va pas comparer les deux groupes, ce serait totalement idiot, mais les norvégiens de GORGOROTH ont, en trois secondes, plus captivé le public que les français en trente minutes. Une date correcte et sérieuse qui confirme la qualité des compositions du groupe qui doit encore travailler sa présence scénique. Et c'est peut-être ce genre de tournée qui va la leur apporter.

Bref changement de plateau, on vérifie tranquillement les dernier réglage et hop voila VITAL REMAINS qui monte sur scène pour célébrer ses « 25 Years of Blasphemy ». Alors certes des débuts du groupe il ne reste que gros Tony et Glen Benton n'est pas là mais tout de même, Vital Remains reste un grand nom de la scène death ricaine qui se fait assez rare en France, on ne va donc pas bouder son plaisir même si le concert du soir laisse en bouche une impression de trop peu malgré une setlist qui égrainera des titres tirés de toutes les époques du groupe. Le son est un peu brouillon, pas assez compact pour la musique de VITAL REMAINS et le chanteur, qui ne cessera de répéter qu'il a loupé l'enterrement de son frère pour assurer cette date, bien trop démonstratif et content d'être là. Alors oui c'est sympa cette bonne ambiance mais on est là pour enculer le Christ pas pour faire la chenille dans le pit une bière à la main. Les fans ont eu l'air d'apprécier le show mais perso j'avoue avoir trouvé tout ça trop gentil, trop bon enfant, j'en attendais plus de la part d'un groupe comme VITAL REMAINS qui fait le boulot, les mecs savent jouer c'est clair mais en mode pilotage automatique. Si j'étais mauvaise langue je dirais « à l'américaine ». Mais je ne suis pas mauvaise langue. Les titres sont bons, le setlist est de qualité mais il manque quelque chose. La violence, la peur, l'atmosphère satanique. Tout ça sent trop la bonne humeur et le spectacle un peu cheap quand Brian Werner envoie des doigts d'honneur et des « fuck you » vers le ciel sur le final de « Dechristianize. » Mais dans le public, les fans ont l'air d'apprécier tant ça pogotte et ca cricle pit à tout va. Un concert bonne ambiance et en roue libre mais que je ne peux pas m'empêcher de trouver décevant sans trop savoir vraiment expliquer pourquoi.

Maintenant c'est au tour de GORGOROTH qui débarque enfin après un très long changement de plateau. Pourtant la scène est dépouillée, seul un fond de scène à l'effigie du groupe est installé. De toute façon on ne le verra pas, la scène étant continuellement plongée dans une brume épaisse à couper à la tronçonneuse. Le groupe laisse tombé les chichis, exit les têtes de moutons, le barbelés, les flammes et les gens nus crucifiés sur scène, menés par Infernus et Hoest au chant, les norvégiens sont simplement venu faire la guerre au public parisien. « The Audience is the Target. » Après une arrivés sur fond de marche funèbre déglinguée et creepy, le batteur va s'installer dans la brume, on ne le verra pas de tout le set et les première notes de « Bergtrollets Hevn » retentissent. Et on comprend tout de suite que GORGOROTH n'est pas venu faire des câlins. Le son n'est pas parfait, les guitares sonnent un peu faiblardes, mais sied tellement bien au son du groupe. Sans temps mort on enchaine sur « Aneuthanasia » qui crache les flammes de l'Enfer. L'ambiance est délétère et comporte cette petite part de danger qui fait le sel des concerts black metal.

Hoest occupe la scène telle une goule hurlante, son charisme et sa présence quasiment démoniaque apporte beaucoup au groupe. Sa voix colle très bien à la musique et il semble très à son affaire dans GORGOROTH. L'atmosphère hérétique et guerrière est renforcée par les fumigènes qui englobe toute la salle et plonge la scène dans un contre jour rouge vif comme les flammes de l'Enfer. Tout est là pour construire une vraie ambiance black metal brutale et malsaine. Cet impudent spectateur qui aura tenté de rejoindre la scène en slammant pourra en témoigné. Quelques coups de micro dans la gueule (dont j'entends encore les poc poc poc du micro frappant son corps) lui auront passé l'envie d'aller faire coucou à Hoest. Le concert est tendu comme un string de pornstar californienne, ça ne rigole pas, les norvégiens jouent dur et serré, les titres de « Under The Signs Of Hell » s'enchainent, ce sera l'album le plus visité ce soir avec « Krig », « Revelation Of Doom », « Blood Stains The Circle », « The Rites Of Infernal Evocation » et « Profeten Apenbaring ». Rapide, efficace, direct comme une droite dans la gueule, GORGOROTH impose sa loi et ne fait pas de quartier ni de prisonniers.

Le set s'achève comme il a commencé. Dans une atmosphère tendue et violente. GORGOROTH livre un exemple parfait de concert Back Metal brutal. Pas de chichis, du corpsepaint, des musiciens et un leader hyper charismatique. Rien de plus que la puissance de la musique et de la prestation. Les norvégiens s'imposent haut la main par k.o. Le black metal comme il devrait toujours être joué en somme.