GARDEN OF SHADOWS - Heart of the Corona (X-Rated) - 24/04/2016 @ 07h40
Courant 90s, l'underground européen a réussi l'impossible: briser l'hégémonie des productions US. Chez nous, 2 ingrédients ont alimenté ce souffle nouveau. En premier lieu, le développement de labels garantissant une large distribution et son lot d'albums mémorables (Adipocere, Osmose prods, Holy records puis Season of Mist et Listenable). Ensuite, l'arrivée de Metallian a eu un énorme impact sur notre presse écrite, incitant les autres mags à s'ouvrir un peu plus aux genres dits "extrêmes" et à adopter l'usage des CDs samplers. Une période faste durant laquelle j'en suis arrivé à me demander ce que l'underground US avait à offrir en dehors du death metal... A l'exception d'une poignée de références comme Absu (signé chez Osmose) ou Evoken (réédité par Adipocere), il me restait bien des choses à découvrir. Pour ma première tentative, j'ai misé sur la prise de risque et l'intuition. Mes cibles? Des nouveaux venus piochés dans la catégorie Demo de la VPC Holy records: Scholomance et donc Garden of Shadows.

Leur histoire débute en 1995 à Gaithersburg, Maryland avec la formation de Funeral Opera. Quelques changements de line-up plus tard (intégration d'une guitariste et changement de batteur), les Américains se renomment Garden of Shadows. Bien que dépourvu de bassiste à temps plein, le quintet planche sur une Demo, Heart of the Corona, qui parait en avril 1997. Raffolant des productions suédoises (Gothenburg), grecques (Holy records) ou encore françaises (Misanthrope, Kalisia, Carcariass), la description du label francilien ne pouvait que me tenter: petit bijou de death progressif et atmosphérique. Alors certes, la méfiance est légitime. Les plus expérimentés n'hésiteront pas à rappeler les travers de la VPC (étiquettes à rallonge fantaisistes, commentaires élogieux immérités...). Cependant il arrive que le catalogue soit dans le vrai et dans le cas de Garden of Shadows c'est plutôt la bonne pioche. Le visuel de cette Demo K7 représente une éclipse solaire et la photo de groupe témoigne de la jeunesse de ses membres. Mon livret ne comprend les paroles que de 2 des 4 morceaux. Choix volontaire ou erreur de conception? Je l'ignore. Côté prod, les Américains ont fait appel à un nouveau venu: Mike Bossier (Deceased, Horror of Horrors, October 31) pour un résultat plutôt honorable.

Comme annoncé, Garden of Shadows pratique un death épique aux structures progressives, leurs compos dépassant allègrement les 7 minutes. Commençons la revue d'effectif avec les points à améliorer. Faute de préposé à la basse, c'est Brian Rabinovitz, guitariste et leader du groupe qui s'y colle, pour un résultat anecdotique. Rien de pénalisant, cependant le style pratiqué s'accommode plutôt bien de la participation d'un Moreac ou De Farfalla si vous voyez ce que je veux dire. Quant aux claviers de Scott, si le rendu est parfois kitsch, les intentions sont bonnes. Un écueil qui se règle avec un peu d'expérience. De son côté, Chad le préposé au micro est un partisan de l'ultra-guttural parfois entrecoupé de hurlements black. A noter un mixage en retrait intentionnel à la Tomi Koivusaari. Passons maintenant à leurs points forts. Ex-Sadistic Torment (avec des membres de Dying Fetus), le batteur Brett O'Connor met son aisance technique et sa puissance au service des nombreux changements de rythme. L'atout majeur de Garden of Shadows? L'excellence de ses parties de guitares délivrées par un tandem complémentaire et inspiré: Brian et Mary (Biovore). Riffs, cavalcades, leads et harmonies, acoustique... le tableau est relativement complet. L'absence de solo, qui n'est pas une fin en soi, ne se fait aucunement sentir.


Scott / Brian Rabinovitz / Chad / Mary / Brett O'Connor

Heart of the Corona débute avec une courte intro: Solar Pulse. Cet instrumental minimaliste aux claviers installe un parfum de mystère qui se dissipe dès les premières mesures du morceau-titre. Effectivement à l'image des TS visibles ci-dessus, Garden of Shadows revendique ses influences européennes. Riche et complexe, leur style alterne accélérations et phrasés mélodiques tout en ménageant son lot de surprises, comme le break acoustique interrompu avec fougue par Brett O'Connor. Si beaucoup de choses nous traversent l'esprit, à l'écoute du formidable Lovely Cold on est fixé. L'enchainement mélodie crépusculaire/gros riff est mortel, rappelant le meilleur du roster Holy records de l'époque, quelque part entre 1666 Theatre Bizarre et Athenian Echoes. Passé l'entame mélancolique, Company in Solitude se montre plus homogène. Très speed c'est la compo qui se rapproche le plus du black metal. Autre point d'orgue de cet enregistrement: Apollian Realm. Ce morceau se démarque par son recours à l'acoustique, un claviériste plus à son avantage et l'intervention inattendue de la guitariste Mary avec un chant clair angélique à la Liv Kristine Espenæs (Theatre of Tragedy). Avec une telle carte de visite, Garden of Shadows ne pouvait que convaincre. Le contraire aurait été désespérant.

Si la Demo Heart of the Corona semble s'être bien vendue, elle a surtout séduit une petite structure, X-Rated (Nightsky Bequest, Witch-Hunt), qui propose en février 1998 de la represser au format CD. Un procédé rappelant les Demos Series d'Adipocere. Entre temps Garden of Shadows a testé un nouveau membre, le bassiste Owen Davis. Un nouveau titre est composé pour l'occasion: Shards of the Sphere. Mais l'enregistrement se passe mal et le groupe décide de changer de studio. Ces péripéties achèvent de décourager le claviériste Scott qui fait ses valises, suivi de près par le dernier arrivé, Owen Davis, qui rejoint Rain Fell Within. Heart of the Corona version CD sort en décembre 1998 et présente 6 morceaux (en comptant l'intro) pour 39 minutes de musique.
Je n'ai découvert cet inédit que bien des années plus tard grâce à youtube. Après une entame spatiale façon The Gallery, il dévoile un groupe plus efficace que jamais avec des parties de guitares dignes de Sotiris époque Esoptron et des claviers mieux intégrés, Scott utilisant pour la première et dernière fois le piano. Formidable, vraiment. Si Garden of Shadows était né en Europe, son destin aurait sans nul doute été différent.

La suite de leur histoire?
- l'intégration d'une vieille connaissance à la basse: Sean Beasley (Dying Fetus, ex-Biovore, ex-Sadistic Torment)
- la récupération des claviers en studio par Brian Rabinovitz
- la signature en mars 1999 chez Wicked World, une filière d'Earache
- leur venue en Europe à l'occasion du Brutal Assault Open Air (festival organisé en République Tchèque)
- la sortie en avril 2000 de leur 2ème album Oracle Moon, chroniqué à l'époque par VsGreg ICI
- un split dans l'indifférence générale peu de temps après




Rédigé par : forlorn | 1997 | Nb de lectures : 2275


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Commentaire
Moshimosher
Membre enregistré
Posté le: 24/04/2016 à 19h47 - (31939)
Effectivement, pas mal du tout... et on sent bien les influences misanthropiques (en tout cas à certains moments)...

Sagal
Membre enregistré
Posté le: 28/04/2016 à 01h21 - (31940)
@ Moshimosher: Oui, c'est vrai pour les influences. On les aurait devinées sans le T-shirt :-)
Un groupe qui aurait tout à fait eu sa place dans l'écurie Holy des 90's.
Et c'est amusant de voir que Sean Beasley est passé dans ce groupe.
Ils peuvent toujours se reformer un jour, quand on voit des groupes qui ont splitté il y a 20-25 ans se reformer ces temps-ci...
Agréable à écouter en tout cas même si certains éléments (claviers...) n'ont pas très bien vieilli.

Strat
Membre enregistré
Posté le: 09/05/2016 à 10h09 - (31941)
Un album qui sent bon la fin des années 90 avec des mélodies comme je les aimes !
Je me rappelle des noms "fantaisiste" utilisés dans la VPC pour promouvoir un album mais je me rappelle également de cette pochette sans jamais avoir eu l'occasion d'y jeter une oreille.

Un album de plus à écouter de temps en temps afin de bien m’imprégner, décidément je n’arrêterais jamais de découvrir de nouvelles formations grâce aux chroniques Remembers de Forlorn !



forlorn
Membre enregistré
Posté le: 10/05/2016 à 23h05 - (31943)
@ Sagal: Les Américains auraient effectivement eu leur place dans le roster Holy, d'autant plus que les groupes grecs se faisaient la malle début 2000. Avec un peu plus d'expérience et de moyens, Garden of Shadows aurait pu faire un bon palliatif.

Sinon une reformation n'aurait d'intérêt qu'à la condition de sortir du nouveau matériel. Le hic c'est que hormis Sean Beasley (qui n'est pas un membre fondateur/historique), les autres ont arrêté la musique. Peu probable donc.

@ Strat: Garden of Shadows n'ayant bénéficié d'aucune promo en Europe avant la sortie de leur 2ème album chez Earache (en 2000), je doute que tu ais eu l'occasion de croiser le visuel de Heart of the Corona. Pour rappel j'ai acheté la Demo K7 à l'aveugle.

Est-ce que par hasard tu ne le confondrais pas avec un autre, par exemple Eclipse, le 2ème album de Legenda (1998 - Holy records)?

Strat
Membre enregistré
Posté le: 11/05/2016 à 14h22 - (31944)
Bien vu ! De "loin" les pochettes se ressemblent, si on peut dire ça !
J'ai pu écouter le second album en passant, sympathique mais pas assez "novateur", dommage, il y avait comme une étincelle qui commençait à naitre.

Youpimatin
Membre enregistré
Posté le: 23/05/2016 à 13h12 - (31947)
Merci pour la découverte. Pile poil le genre de Death de la deuxième partie des 90's : aventureux, développé, mélodique
Bref un bon plongeon dans le passé



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