La grande époque. La révélation. 1997 : le début du règne du sextet allemand.
Second album, mais véritable point de départ d’une carrière incroyable. Grande époque, où tout était encore permis, où le politiquement correct n’avait pas contaminé la planète Metal, où le second degré était encore drôle, où les groupes pouvaient encore jouer avec les limites de la censure, où la liberté artistique stupéfiait et passionnait.

"Sehnsucht", album exceptionnel regorgeant de tubes, est sorti le 22 août 1997. Et est considéré, par bien des fans comme le meilleur album du gang (avec "Mutter").
La recette, basique, va devenir marque de fabrique et symbole d’une identité forte, portant à un niveau de reconnaissance internationale la ‘Neue Deutsche Härte’ ; cette entité musicale se distinguant par un chant à voix basse et grave (souvent en allemand), des guitares très Metal, une batterie souvent martiale et des claviers très présents.
Pourtant, "Sehnsucht" ne fut pas le créateur de cette vague Indus Metal Allemand, contrairement à ce que bon nombre de personnes pensent. Sans rien enlever au talent des 6 Allemands, il faut être réaliste, et ne pas oublier que c’est OOMPH! (aidé par l’influence de DIE KRUPPS) qui s’est révélé pionnier du genre, Rammstein se contentant de le populariser.

A sa sortie, "Sehnsucht" va être un immense succès ; bien aidé, il est vrai, par la tournée européenne en partie à guichet fermé que le groupe effectuera en tête d’affiche.
La renommée et le succès de RAMMSTEIN vont également être accrus, notamment outre-Atlantique, par l’apparition du groupe sur le « The Family Values Tour », tournée festive entre potes montée par KORN. Outre sa prestation enflammée, Rammstein sera également présent sur le CD compilation issu de ce mini festival itinérant, ce qui constituera pour eux une publicité indéniable chez nos amis ricains et permettra à bon nombre de metalleux de découvrir ce groupe allemand original.

En Europe, sans réseaux sociaux, sans micro-bloging et sans 3G, RAMMSTEIN va réussir à faire parler de lui à une vitesse incroyable, ressemblant ce que les médias nomment aujourd’hui un buzz ; sa réputation scénique, sulfureuse, provocatrice et portée sur les effets pyrotechniques, va les précéder, et va permettre de faire circuler le nom de RAMMSTEIN à une vitesse surprenante pour l’époque. Car, en 1997, les termes et les modes de fonctionnement étaient différents.

Internet n’était alors qu’un outil encore réservée aux informaticiens et étudiants, et le grand public délaissait difficilement son bon vieux minitel pour cette technologie balbutiante. 1997, époque associée aux premiers fournisseurs d’accès, qui usaient et abusaient des CD publicitaires de forfait internet limités, et décomptées à la seconde.
Fonctionnement archaïque, qui nécessitait alors un modem 56k, des nerfs d’aciers (pour supporter les 30 secondes d’affichages d’une simple page html), un chronomètre (pour mesurer, à la seconde près, le temps réel de connexion) et un sens habile du ‘CTRL+C / CTRL+V’, afin de lire, seulement une fois déconnecté, le contenu des mails et des pages visités. Alors autant dire que dans ce contexte, les teasers, écoutes intégrales d’album ou clips vidéos étaient de pures utopies.

C’est donc armé de mon sampler ‘Hard Rock’ issu du mag du même nom que je me procurais, dans une FNAC parisienne, mon exemplaire de "Sehnsucht".
Et ce fut, bien évidemment, la révélation absolue pour mes petites oreilles. Radicalement éloigné du Black Metal dans lequel je baignais alors, "Sehnsucht" représentait le summum de l’efficacité. 11 titres absolument irrésistibles, des tubes en puissance, relativement basiques et immédiatement mémorisables. Mais 11 titres quasiment parfaits, dont l’association rythmique martiale, les riffs mémorables, les claviers indispensables et le chant tellement particulier, vont permettre à cet opus d’entrer au panthéon des albums incontournables de la planète Metal.

Propulsés par le tube ‘Du Hast’, "Sehnsucht" a rapidement imposé sa vision musicale, simple mais dynamique, portée par un souhait irrésistible de faire bouger les foules et de faire remuer les têtes en rythme. Usant du couplet/refrain, RAMMSTEIN ne s’encombre pas de structures à rallonges. Les titres n’en sont que plus facilement mémorisables, bien aidés par les refrains imparables.

Si les prestations scéniques du sextet, volontairement choquantes et provocantes, vont alimenter le phénomène de réputation sulfureuse, si les effets pyrotechniques et les concerts explosifs ont toujours fait partie intégrante de l’identité "RAMMSTEIN", le groupe va également bénéficier d’une autre forme de publicité... Pas foncièrement souhaitée.
Peu de temps après la sortie de "Sehnsucht", RAMMSTEIN va passer une grande partie de son temps à devoir se justifier quant à une réputation de groupe Nazi – sans oublier les multiples étiquettes de groupe zoophile, pédophile ou homosexuel.
Le groupe en jouera, dans un premier temps, lui qui affectionne tellement le second degré et l’ironie, mais devra rapidement redevenir sérieux pour clarifier des accusations graves et bien évidemment totalement fausses.

Issues de personnes incapables de traduire des textes en allemand, et d’en saisir l’humour et le second degré, ces accusations vont, dans un premier temps, nuire (forcément) au groupe. Mais ces reproches repris en chœur vont finalement et fatalement servir de publicité inopinée au groupe, pour propager le nom de RAMMSTEIN aux 4 coins de l’Europe. Le groupe n’avait guère besoin de cela pour se faire connaitre, mais ces critiques vont participer à accélérer sensiblement l’ascension populaire du groupe.
Comme vous, j’ai évidemment connu des personnes de mon entourage qui, croyant naïvement ces ragots, attirées par le mélange sulfureux d’un groupe « nazi, se faisant des sodomies sur scène au milieu d’explosions et de feux d’artifices », vont se précipiter voir le groupe sur scène, plus pour le côté sensationnel que par attirance musicale...
Fort heureusement, cette agitation va retomber peu à peu, et à partir des tournées "Mutter" ce ne sont bien que les fans qui se retrouveront en concert.

Pour ma part, c’est avec "Sehnsucht" que va débuter mon histoire d’amour avec RAMMSTEIN. Ne délaissant le groupe que sur le décevant "Rosenrot". Et c’est également par l’intermédiaire des prestations scéniques mémorables, que je vais poursuivre ma relation passionnée avec ce groupe fascinant. RAMMSTEIN est, à mes yeux, l’incarnation de l’humour dans toute sa splendeur, et surtout la mise en œuvre d’un second degré corrosif et grinçant. Mais irrémédiablement talentueux.




Rédigé par : ..::Ju::.. | 1997 | Nb de lectures : 3010