"Issues". "Folllow the Leader". "Life Is Peachy". Toute une époque.
Période de transition, pour ma part, où KoRn et ses pairs vont me servir de viaduc pour passer de la berge du Black Metal vers celle du Grind et du HardCore. Je n’ai d’ailleurs jamais vraiment compris mon attirance pour le Néo, style à l’époque éloigné de mes prédilections musicales. Il faut croire que l’influence de la grande sœur d’une copine de l’époque, fan de KoRn, a été prépondérante (à moins que j’aie vu dans ces potentiels concerts en commun un simple moyen de me rapprocher d’elle, je ne saurais dire, mes souvenirs me font défaut).

1999. L’époque où je me baladais en baggy, le baladeur CD dans la poche ventrale de ma salopette 17 fois trop grande, les cheveux (gras) au vent, des Van’s aux pieds. Et un sweat XL ‘Goeland’, et un sac eastpack aux trois quart vide sur le dos. Oui quand j’avais 17 ans, j’étais un peu con, un peu influençable, et un peu victime des modes. Des résidus tenaces de l’adolescence en gros.

Quand "Issues" est sorti, j’étais déjà en train de flirter avec le Grind. Et il fut, si je me souviens bien, le tout dernier album de ‘Néo’ que j’ai acheté. Qu’importe, bien que marqué au fer blanc par "Follow The Leader", le meilleur album du groupe après l’éponyme, bien que convaincu par cette fusion imparable de Metal basique et jumpy, et d’influences rap, je vais tout de même me jeter sur "Issues" dès sa sortie.
Pour ne l’écouter qu’une seule fois, déçu de ne pas y retrouver la fusion ultra énergique et agressive du précédent.

La nuit porte conseil, c’est bien connu. Même s’il m’en faudra plusieurs, pour daigner réécouter avec plus de recul l’album, je vais finalement adhérer totalement à cette évolution sensible, poussant jusqu’à retourner les voir en concert sur leur tournée européenne qui a suivi. Ou peut être était-ce encore l’aura attractive de la fameuse grande sœur de la copine.

"Issues" illustre en effet une évolution musicale flagrante, tout en préservant l’identité typique du groupe. L’influence et les sonorités Hip-Hop telles qu’intégrées sur "Follow The Leader" ont disparu, les featurings également. KoRn s’est recentré sur son NüMetal élémentaire, basique, accrocheur. Presque commercial, diront certains. Il est vrai que si "Issues" reste pêchu et énervé, il s’est tout de même assagi, renforçant les mélodies (notamment sur les refrains). Ce qui n’est pas péjoratif pour autant, car l’album n’en devient que plus efficace.

Grand sujet de discussion, le chant de Jonathan se fait moins frontal, plus réfléchi. Moins impulsif, peut-être aussi. Les fameux ‘pleurements’ et geignements ont disparu, ce qui n’est pas plus mal ; ce type d’expression vocale ne pouvant qu’être viscérale et sincère, sous peine d’aboutir à un rendu risible. La colère et la fureur incontrôlée se sont totalement estompées, Davis semble avoir terminé sa thérapie par l’expulsion sonore.
Et peut (enfin ?) se concentrer pour la première fois sur son chant. Jonathan chante, désormais, et le fait de façon beaucoup plus pro et carrée, perdant en impulsivité. Il ponctue donc quelques hurlements typiques de nombreux passages chantés ou ‘semi-hurlés’. Gardant toujours son style particulier, agrémenté de chuchotements ou d’un débit parfois haché. Avec une certaine efficacité, il faut bien le reconnaître.

Lourde et efficace, la musique du groupe reste globalement tributaire de l’identité du groupe, renouant avec une certaine forme de simplicité. Simplicité dans la façon de structurer ses titres, colorée d’une réelle musicalité. Là où les précédents albums (et surtout l’éponyme) étaient relativement originaux dans leur approche, on a l’impression qu’"Issues" ne contient que des chansons, et semble avoir été conçu comme tel. Ce n’est cependant pas un écueil, juste un aspect révélateur de l’évolution du groupe.
Moins d’impulsivité structurelle, moins d’innovation stylistique. Pas facile néanmoins de réussir à évoluer, après 3 albums monstrueux qui vont marquer durablement la scène NüMetal.
"Issues" est sans doute (à l’époque) l’album le plus basique mais également le plus efficace de toute la discographie du groupe ; bon nombre de fans réclamaient à l’époque un retour "aux sources", ce à quoi KoRn répondit partiellement. En laissant tomber le côté Hip-Hop et en se recentrant sur du "pur" Metal – si tant est que ça le soit.

Car en dépit des demandes des fans et d’un retour à un côté frontal basique, KoRn reste KoRn. Et même si Silvera est sans doute moins mis en avant que sur les albums précédents, son jeu particulier, mixant le métal au hip-hop, demeure présent. Les rythmes sont toujours lourds, légèrement dynamisés, mais aérés.
L’autre personnage du groupe, l’armoire à glace Fieldy, est lui indéboulonnable. Son style particulier est resté le même, et le bassiste tatoué slappe toujours avec sa façon à lui, claquant ses cordes de façon assez brutale, portant une partie de l’identité musicale du groupe.

La section rythmique reste solide, et préserve ainsi la singularité du groupe. Qui balance avec "Issues" son album le plus basique et efficace, le plus mélodique, taillé pour la scène, débordant de hits. Mais délaissant une bonne partie de ce qui faisait son identité et son originalité.
‘Issues’ a dû être pas mal apprécié par les fans cependant, puisqu’il s’est vendu à plus de 11 millions d’exemplaires dans le monde.

Même en prenant en compte le côté basique ou redondant du Néo Metal, même en étant objectif, même en constatant le pourcentage élevé de déchet qu’a produit ce style, le Néo n’en demeure pas moins un style musical qui a marqué une époque. Et qui a surtout enfanté de sacrés albums, toute appréciation personnelle mise de côté.
Mais toute médaille à ses revers ; et KORN va ensuite peu à peu sombrer dans une sorte de léthargie artistique, et mettra de nombreuses années à s’en relever...


Rédigé par : ..::Ju::.. | 1999 | Nb de lectures : 2370