Les hasards de la vie nous font parfois découvrir, oublier et retrouver des choses (ou des gens) d'une drôle de façon... Dans le cas présent mon chat qui se balade et qui fout en l'air une pile de CD: "Rha ptain merde mon digibook d'Ayreon... Tiens kessecé ça... rho The Tea Party !!!". Et une mémoire retrouvée une. L'exercice est ardu mais du coup impossible de ne pas chroniquer cet album, surtout que s'il y a bien un groupe qui n'a pas eu l'exposition et le succès qu'il méritait en Europe, c'est bien ce trio canadien.

Ma découverte de The Tea Party relève du pur coup de bol. Un samedi de l'année 1995, je fais le truc qui n'arrive jamais, je zappe sur arte. Et je tombe sur un clip. Avec l'expérience et le recul, en l'espace de quelques secondes les références auraient fusé:
- Tiens ils passent The Unforgiven de Metallica sur arte maintenant?... Ah non...
- J'aurais jamais cru que Page/Plant donneraient une suite à Kashmir, en plus ils ont écouté Tool...
- WTF? Jim Morrison est vivant et il a reformé The Doors!!!


C'était le clip de Fire in the Head le morceau d'ouverture de The Edges of Twilight, le 3ème album de The Tea Party. Et comme j'étais jeune, j'ai simplement trouvé ça énorme et je l'ai acheté. Mais je n'ai pas su apprécier l'album à sa juste valeur à cette époque et j'ai fini par oublier. J'en fais donc la chronique aujourd'hui, je leur dois bien ça. En effet hormis à la sortie de cet opus, la presse française est passée totalement au travers de ce fantastique groupe, les taxant trop facilement d'ersatz des références citées dans le paragraphe précédent.

Le drame de The Tea Party? Son chanteur Jeff Martin ressemble physiquement et vocalement à Jim Morrison. Vraiment. Mais de là à dire qu'il l'a fait exprès, faudrait pas pousser mémé dans les orties, ça serait très vilain. Plus sérieusement ce trio de multi-instrumentistes formé en 1990 n'a connu aucun changement de line-up en 7 albums et 15 ans d'existence. De plus ils n'ont jamais retourné leur veste et continué sur une voie qu'ils n'ont visiblement pas choisi mais qui s'est imposée à eux. Naturellement. Une vocation.

Je disais que la presse française et plus largement européenne était passée à côté de The Tea Party, mais ça n'a pas empêché les Canadiens, signés chez EMI, de méchamment cartonner ailleurs avec ce 3ème album (+ de 270 000 ventes, double-platine au Canada, platine en Australie, etc) et quand on écoute The Edges of Twilight on comprend pourquoi: production énorme, une énergie démente, un sens de la musique hors du commun, une instrumentation et des arrangements impeccables, un feeling qui déborde de partout.

Définir leur style n'est pas facile, surtout lorsqu'on n'est pas expert dans ce créneau, mais pour faire simple je dirais que The Tea Party pratique du Rock n' World. Un big rock synthétisant les différentes familles originelles, rock, blues, folk, psyché, prog, auxquelles ils incorporent des influences world issues du Maghreb, du Moyen-Orient, et plus encore. Le tout avec talent, naturel, une grosse production bien moderne et une envie d'expérimenter qui se remarquera par l'apport de l'electro dans leurs sorties futures.

Je serais bien en peine de mettre en avant une faiblesse ou un temps fort vu l'homogénéité de l'album. Chaque titre a sa propre structure, un haut niveau de composition, et s'intègre parfaitement à l'ensemble. Ce n'est pas précisé dans les crédits, mais le trio composé de Jeff Martin, Stuart Chatwood (le bassiste) et Jeff Burrows (le batteur) maîtrise un nombre impressionnant d'instruments électriques, acoustiques, classiques et plus exotiques, dont il use toujours à bon escient. En effet leur bagage technique reste au service des compositions. A noter un featuring aux spoken words du britannique Roy Harper, connu pour être l'inventeur du folk psychédélique et proche collaborateur de Pink Floyd (période Syd Barrett) et Led Zeppelin.

Le groupe sait ménager ses effets et nous surprend constamment par sa créativité et la diversité de ses compositions. On peut ainsi passer de courtes compo folk comme l'instrumental The Badger (à l'atmosphère irlandaise) ou Shadows of the Mountainside, à de grosses baffes rock n' world comme The Bazaar. Des titres aux influences blues sont aussi de la partie comme les excellents Turn the Lamp Down Low et Drawing Down the Moon. 2 titres se distinguent quand même du lot: la sublime ballade Correspondences, mélancolique et langoureuse, avec son refrain mémorable, et surtout Sister Awake, une composition à tiroirs qui nous flanque immanquablement une grosse montée d'adré par une attaque inattendue de percus en plein milieu du morceau.

Il est temps de conclure. Franchement que vous faut-il de plus? Vous avez aimé voir Page/Plant jouer avec l'orchestre du Caire et vous avez suivi les tribulations de Robert Plant en solo jusque dans ses featurings avec l'Afro Celt Sound System? Vous aimez les 70's, le big rock, le gros son, bref la bonne musique? Alors n'attendez plus. Surtout que The Tea Party s'est reformé y a quelques mois (après un split en 2005) et aurait un nouvel album en prépa. C'est le moment idéal pour s'y (re)mettre.




Rédigé par : forlorn | 1995 | Nb de lectures : 2363