IN THE WOODS... - Omnio (Misanthropy) - 07/09/2003 @ 16h59
Deux années sont passées depuis « HEart of the Ages », et un bon génie est venu frapper à la porte des frères Botteri, leur commandant de virer les vocaux extrêmes et de laisser libre cours à leurs aspirations refoulées d’artistes. Résultat, un des plus grands moments que nous ait offert la musique en cette fin de XXème siècle - un disque qui fut le premier à bouleverser profondément mes perceptions et mes attentes : auparavant j’appréciais les albums qui m’offraient des mélodies sympathiques, de l’ambition sonore et du caractère, à partir d’« Omnio » je vivrais la musique qui converse directement avec mon esprit sans se laisser décortiquer par la case oreilles. Non, plus jamais je ne me laisserai prendre à acheter un album sur lequel j’aurais « craqué » au stand d’écoute d’un Virgin, plus jamais je ne me fierai aveuglément aux louanges serviles et intéressées des « gros » magazines envers les groupes à image. On ne m’y reprendra plus à prendre une chronique de Fred Pichot au sérieux (arf…). C’en est fini des albums « carton » consommés en deux écoutes, désormais le superficiel combinard m’afflige et l’opportunisme ciblé me dégoûte. « Omnio » m’a ouvert les yeux et ça ne m’a pas pris une éternité pour réaliser et fléchir devant le magnétisme compresseur d’In the Woods…

Les sens chavirent dès les prémices de « 299796 km/s » (la vitesse de la lumière pour ceux qui ont tapé un bac littéraire) avec ce violon en pleurs qui semble si vulnérable et égaré qu’on a envie de plonger dans la hi-fi pour aller le réconforter. Lorsque les guitares entrent en jeu c’est pour présenter un visage résolument sobre dont la légitimité ne prête à aucune discussion. La musique est créative et moderne, c’est le moins que l’on puisse dire, pourtant elle se dépare de tout escarpement « psychédélico-progressif » comme le premier album aurait pu le laisser anticiper. Je n’ose trop parler de mélodies, plutôt de discours évolutif des guitares qui expriment une vision du monde à travers des lunettes noires. Leur jeu fait d’augustes entrelacs et de parallèles intimidantes impose le respect et traduit par-delà son pessimisme plus que de façade une beauté telle qu’on ne saurait interrompre une écoute quasi religieuse sans un sévère pincement au cœur. Le duo de voix masculines et féminines devient rapidement une institution pour ce qui est du convoyage des émotions, d’autant qu’elles se complètent à ravir (proche d’un jeune David Bowie pour l’un, authentique contralto évitant soigneusement d’en faire des tonnes pour l’autre). C’est ainsi que le choc a déjà porté lorsque cette première vague metal s’arrête pour faire une haie d’honneur à une longue litanie guidée par un violon décidément au bord du spleen neurasthénique. Le texte sur la crise intérieure alors déclamé d’une voix volontairement vacillante a de quoi achever de foutre le cafard et nul doute que si le morceau s’arrêtait là le taux de suicide aurait grimpé en flèche du côté de Kristiansand aux alentours de Mai 97… Par bonheur la section metal remet les gaz pour un enchaînement de séquences modérément longues mais toujours aussi austères et tourmentées où le chant atteint des sommets jusqu’à l’emballage final qui laisse le souffle coupé avec la conviction que l’on a affaire à quelque chose de très spécial et de forcément génial, sans encore bien cerner ce qu’il y a à aimer dans un tel labyrinthe de glace.

Le reste de l’album ne fait que confirmer cet enchantement désenchanté, certaines fois de façon plus rentre-dedans (« I am your Flesh ») ou faussement absente (« Kairos! » et ses vocaux tendres qui s’évaporent en volutes de néant). « Weeping Willow » la magnifique (ces paroles, mes aïeux…) et le légendaire triptyque de fin constituent le plat de résistance de l’album en ne cessant de jouer à cache-cache entre ombre et lumière, entre ce jeu constamment envoûtant, intemporel et raffiné et cet abîme de détresse infinie devant lequel on se retrouve planté lorsque la dernière mesure, superbe, s’est envolée. « Omnio » est de la race quasiment éteinte des albums qui vous placent devant un choix draconien. Soit vous l’ignorez gentiment et vous ne vous en porterez peut-être pas plus mal, soit vous succombez et alors il faudra tôt ou tard refondre, ne serait-ce que légèrement, votre éthique de consommateur, genre vous poser de nouvelles questions lorsque vous voudrez acheter tel ou tel album…
Is this the Omnio I’ve been searching for ?…

(chronique reproduite avec l’aimable autorisation de http://www.lesgrimoiresdeparacelse.fr.st )




Rédigé par : Uriel | 1997 | Nb de lectures : 3143


Auteur
Commentaire
botteri
Invité
Posté le: 14/08/2003 à 20h13 - (529)
Etant le premier du site à parapher cette oeuvre, je me dois d'etre à la hauteur.
Commençons par la fin (comme d'un clin d'oeil à cet album qui présente l'univers dans sa quadridimensionnalité spaciale et donc dans sa temporalité relative) : "omnio" est l'une des plus grandes oeuvres dans l'histoire de la musique contemporaine.
Chaque titre scintille de son excellence comme à son firmament, chaque seconde martelle le coeur d'un diapason féroce et lancinant comme pour arracher nos sensibilités de la Chair.
Et alors que l'on croit l'éternité proche, le monde nous semble alors se mourrir de sa beauté : il a enfanté de son meurtrier.
Chaque instrument pleure sa misère comme pour nous rappeler que toute quintessence a sa finitude.
Je ne trahirais pas l'oeuvre en décrivant son contenu (uriel l'ayant d'ailleurs plutot bien décrit)mais au fond de la foret se trouve un arbre où profondeur et subtilité en constituent le tronc, et où émotion et grandeur culminent au sommet.

"Omnio" demeurera à jamais tel une étoile, tout proche de la fugacité, à deux doigts de l'éternité.

langoustator
Invité
Posté le: 12/09/2003 à 23h01 - (550)
Tout est dit dans la kro.

YOUPIMATIN
Invité
Posté le: 15/09/2003 à 17h07 - (551)
Tout n'est pas dit dans la chro.
En effet, cet album a été mixé en "Dolby Surround" aussi, pour ceux qui ont cette fonction sur leur chaîne pourront découvrir des arrangements en plus (Voix féminine, orgue) qui apportent une dimension supplémentaire à cet album fabuleux.

garm
Invité
Posté le: 20/01/2004 à 22h17 - (704)
Sublime
un album dont on ne décroche pas facilement
20/20

pour l'artwork par contre 02/20 (mais bon ce n'est qu'un detail, omnio reste grand)

garm
Invité
Posté le: 20/01/2004 à 22h17 - (705)
Sublime
un album dont on ne décroche pas facilement
20/20

pour l'artwork par contre 02/20 (mais bon ce n'est qu'un detail, omnio reste grand)

gissé
Invité
Posté le: 24/06/2008 à 14h19 - (26121)
j'ai 3 albums d'eux : "heart of ages", "omnio" et "three times seven on a pilgrimage" et ce sont pour ma part 3 albums grandioses tout autant différents les uns que les autres

opethmaniac
Invité
Posté le: 26/01/2009 à 19h59 - (26444)
Peux pas résister à l'envie de laisser ma trace ici : ce disque est un pur joyau, comme on n'en fait malheureusement plus...Tout est parfait, impossible d'imaginer n'écouter qu'un seul morceau de ce disque tant tout dedans est cohérent et superbement maitrisé..la combinaison des chants, les lignes mélodiques, les morceaux rentre dedans, les morceaux plus soft, la totale en somme est unique et jouissive..Moyennement accroché au premier, je n'attendais pas forcèment grand chose quand je me suis procuré ce 2nd LP, acheté en meme temps que le Still Life d'Opeth, en 99...Et pourtant ! La suite ne m'a pas autant emballé meme si encore largement au dessus du lot...Toujours est-il que cet "Omnio" fait partie de mon "Top 5-Disks" et que je l'écouterai toujours en m'extasiant dessus...
25/20

Kairos
IP:86.220.178.50
Invité
Posté le: 01/06/2013 à 00h34 - (29428)
Le décès récent d'Oddvar A:M a été pour moi l'occasion de réécouter les albums d'In The Woods.
A mon sens, Omnio est bel et bien la clé de voute de leur discographie. si chaque album est un petit chef d'oeuvre, il y a toujours dans chacun un aspect ou un détail qui m’empêche d'y mettre la note maximale. Mais pas Omnio!
Omnio est parfait de la première à la dernière mesure. tout est cohérent, tout est à sa place.
Avec Omnio, je n'ai jamais l'impression d'entendre un patchwork de riffs, de solos, de breaks comme souvent dans beaucoup d'albums. Au contraire, la musique d'Omnio me parait couler de source tellement rien n'est forcé, aucune transition ou arrangement de manque de justesse.
et puis au delà de ces considérations, il y a surtout le coeur et l'émotion, dont l'album déborde, exprimés autant par les instruments que par le chant.

j'ai découvert cet album il y a 10 ans, je me replonge régulièrement dedans, et il est certain qu'il m'accompagnera encore longtemps tellement il m'a marqué.

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