Et la bizarrerie du moment nous vient d’It… d’Ita… d’Italie (oui, n’ayons pas peur). Et ceci pour trois raisons principalement.
- Déjà, le nom du groupe concerné. Le logo est déjà difficile à lire. Premier indice, il se lit de droite à gauche. Deuxième indice, c’est un langage très ancien. Ce trio italien existant depuis 2012 a en effet choisi une présentation en Etrusque, langage qui existait en 700 avant J.-C. (pour Jean-Charles) et a été précurseur du Latin. Le nom du groupe, difficile à prononcer soit dit en passant, s’écrit donc THACLTHI (ou T H A C L T H I ou même plus justement TH A C L TH I) et sa première sortie se nomme …Érát Ánté Ocúlos.
- Première « sortie » car …Érát Ánté Ocúlos est présenté comme un EP. Il est même initialement sorti en cassette, pardon en Tape (avec un grand T). 4 pistes, dont : une intro, deux morceaux et une reprise ; on peut donc bien parler d’EP… sauf qu’il fait 54 minutes avec des pistes de respectivement 7, 15, 22 et 10 minutes. Donc bon, ça fait long pour un EP, mais admettons.
- Enfin, le style pratiqué est pour le moins original et difficile à appréhender. Sur la toile on peut croiser une juste étiquette « Black/Death/Doom » mais pour être plus précis, disons que THACLTHI fait une sorte de mélange entre du Black rituel, du Death atmosphérique et du Doom crasseux. D’ailleurs, leur reprise de "The Trip Was Infra Green" de UNHOLY, groupe de Death/Doom finlandais, est fidèle à l’originale ce qui peut peut-être donner une petite idée du son pratiqué par THACLTHI pour ceux connaissant la formation finlandaise sus-citée. Mais comme THACLTHI est une bizarrerie, la réalité sera plus complexe que ça…

…Érát Ánté Ocúlos débute donc par une intro ambiante de sept minutes. Ça peut paraître long et chiant comme intro, mais c’est une parfaite plongée dans l’ambiance mystique de cet EP. "Hinthiál" donne dans du Ritual Ambiant légèrement dronesque qui n’aurait pas dépareillé sur n’importe quelle sortie du genre (style du label Aural Hypnox) ou dans un disque de FYRNASK ou NEGURA BUNGET pour citer des choses plus connues du public VSien. Il faut adhérer à ce type d’ambiant mais ce que propose THACLTHI est très prenant, envoûtant et incantatoire, presque shamanique. Mais dès que le Metal prend ses droits, le choc est rude. "E Tú Vivrái Nél Térroré! L’Áldiqúá" démarre de manière totalement apocalyptique avec une batterie déglinguée et des sonorités étranges. L’on découvre ensuite les riffs gluants et le chant écorché, sorte de Martin Van Drunen ou de John Tardy qui essaierait de chanter sur un disque de BETHLEHEM. Le son est très caverneux, les riffs death/doom particulièrement râpeux, et l’ambiance mystique est assurée avec quelques mélodies de gratte et grâce à un fond d’ambiance inquiétant. L’ensemble est déroutant, c’est le moins qu’on puisse dire, et THACLTHI semble jouer dans la cour des groupes de Death/Black apocalyptiques style Profound Lore, mais en ayant choisi le mysticisme et une atmosphère rituelle plutôt que le chaos et la brutalité.

En 15 minutes, le développement de "E Tú Vivrái Nél Térroré! L’Áldiqúá" est du genre lent, les vocalises se répètent et les riffs death/doom archi-crasseux s’étalent sans réussir à devenir véritablement lancinants ou hypnotiques, ce sont surtout les quelques incursions de sonorités étranges de guitare et surtout l’excellent jeu de batterie qui retiennent l’attention. Mais l’ensemble est intéressant de par l’atmosphère putride et noire qu’il dégage, ce qui est le plus important finalement. Cependant THACLTHI a de la ressource et va montrer son meilleur visage avec "Ixáxáár", pavé de 22 minutes. Les riffs, bien que toujours présentés en mélasse qui colle aux murs, sont bien plus construits et accrocheurs, et il faut dire que le jeu de batterie très percussif fait également la différence. "Ixáxáár" se présente donc comme un monolithe avec des progressions assez bluffantes, faites de mélodies plus lumineuses discrètes mais remarquables, de chants plus variés (des chœurs font leur apparition), et d’un long break central qui permet de mettre en valeur l’aspect atmosphérique et rituel de THACLTHI, avec une grande réussite (et des mélodies semi-acoustiques dignes de NOCTE OBDUCTA). Le death/doom dépouillé et apocalyptique reprend ses droits sur la dernière partie du morceau légèrement plus salvatrice, mais dans l’ensemble "Ixáxáár" est un véritable tour de force, cohérent et prenant de bout en bout malgré sa durée rébarbative au premier abord, prouvant que THACLTHI a les moyens de faire quelque chose de grand et que …Érát Ánté Ocúlos est un EP en forme de révélation.

La reprise d’UNHOLY subtilement rebaptisée "Thé Trip Wás Infrá Gréén" pour aller avec l’identité visuelle du groupe est le morceau plus classique de …Érát Ánté Ocúlos, il faut dire que THACLTHI n’a semble-t-il pas voulu trahir l’original de 1993, lui apportant juste des sons d’orgue bien morbides et sa patte sonore. Le meilleur est de toute manière sur les 3 compositions originales précédentes, et quelles compositions… Il y a encore des choses à améliorer et le genre pratiqué n’est pas facile d’accès (rien qu’au niveau du son terreux et étouffé), mais THACLTHI se pose avec …Érát Ánté Ocúlos comme un groupe original avec son death/doom rituel et atmosphérique. "Ixáxáár" est la pépite de ce vrai/faux EP pas encore captivant à 100% mais qui montre un groupe étrange et singulier qui ne demande qu’à étaler ses talents sur un premier « full-length ». Une découverte intéressante et une quasi-révélation signée par Avantgarde qui recommence à avoir du nez.




Rédigé par : ZeSnake | 7.5/10 | Nb de lectures : 11970