Le relatif silence médiatique de ces dernières années pouvait laisser croire que MALEFICENTIA avait disparu, mais le troisième album des Franciliens, dans les bacs depuis la fin d'année dernière, prouve que qu'ils sont loin d'avoir raccroché. "Revelation From The Ancestral Whisper" est une belle réussite et c'est avec ce troisième album réalisé de bout en bout par le groupe que MALEFICENTIA compte bien refaire parler de lui et, pourquoi pas, attirer l'attention d'un label...

VS : Salut à toi ! Quand on m’a parlé d’un nouvel album, j’avoue n’avoir pas fait tout de suite le lien avec le groupe qui avait sorti « Under The Banner… » il y a un peu plus de cinq ans.
Je pensais, à tort bien sûr, que le groupe s'était séparé… Que s'est-il passé au cours de cette période qui sépare les deux derniers albums ?
Daevhorn : Il s'est passé beaucoup de chose durant ces cinq ans. Après une série de concerts pour promouvoir « Under the Banner of Suffering » nous avons complètement remanié notre line-up suite au départ d'Ashragon et de Svarog. J'ai décidé d'occuper le poste de guitariste et nous avons recruté Ayperos (de SPECTRUM OF OBLIVION) pour la basse. En même temps, nous nous sommes séparés de notre label (Melancholia Records) qui avait plus ou moins fait faillite. Ensuite, nous avons tranquillement écrit sept morceaux afin de constituer notre troisième album que nous avons finalement enregistré et produit.

« Revelations… » est disponible depuis quelques mois, en autoprod cette fois ; quels sont les premiers retours que vous avez ?
Les quelques chroniques que nous avons pu lire sont pour l'instant plutôt satisfaisantes, voire élogieuses. Le public et les fans ont l'air d'être enthousiastes.

Pour l’album précédent, vous bénéficiiez du soutien de Melancholia Records pour la promotion. Qu’en est-il maintenant ? Assurez-vous seuls la promo et la distribution de l’album ou bossez-vous avec des structures externes ?
A l'heure actuelle, nous sommes bel et bien obligés d'assurer la promo et la distribution de l'album nous-mêmes. Nous aimerions bien évidemment travailler avec un label ou un distributeur mais du côté label, c'est le silence total, et du côté distributeur, nous n'avons pas encore su trouver de solution satisfaisante.

On le sait, très peu d’albums sont à l’heure actuelle financés par les labels, et il faut pour les groupes trouver les financements ailleurs. Qu’en est-il pour vous ?
Comment alimentez-vous la caisse de MALEFICENTIA ? Par vos jobs respectifs ? Par les concerts ? Aides municipales ?
La caisse de MALEFICENTIA est initialement alimentée par nos métiers respectifs. L'argent que nous avons gagné avec les quelques albums vendus pour l'instant a été immédiatement réinvesti pour la promotion. Les concerts sont un bon moyen de promotion mais avant tout un des buts de la vie de musicien. Par contre, pour un groupe de métal extrême tel que nous, le concert ne rapporte quasiment rien. Ou même pire car il arrive que nous ne soyons que très peu (voire pas du tout) défrayés et que nous devions finalement mettre de notre poche pour pouvoir jouer. Pour les aides municipales, je suis mort de rire. De toute façon, nous ne sommes pas des mendiants.

Sur un marché du disque surchargé en sorties, pensez-vous que vous avez toujours une place dans l’esprit de vos fans, ou tout est-il à refaire ? On sait que les concerts sont un bon moyen de faire de la promo, mais cinq ans c’est long…?
Nous n'avons pas une horde de fans mais il semblerait que nos quelques fans ne nous aient jamais oublié. En témoignent les courriers que nous avons reçus au long de ces cinq ans traduisant leur impatience d'écouter un nouvel album de MALEFICENTIA. Je les remercie pour leur soutien et j'espère vraiment qu'ils vont apprécier cette galette. De plus, nous n'avons pas cessé d'exister pendant cinq ans. Nous n'avons jamais arrêté les concerts.

Je n’ai pas de souvenir précis de l’album précédent, sinon celui d’écouter un black plutôt banal.
Par contre, j'ai immédiatement été conquis par « Revelations… », qui capte d'emblée l'attention de l'auditeur avec des riffs accrocheurs, des nappes de synthé efficaces qui instaurent une ambiance sans être pompeuses (ce qui est trop souvent le cas à mon avis), une bonne prod qui ne néglige aucun instrument et des vocaux eux aussi diablement efficaces ! Avez-vous particulièrement travaillé tous ces éléments ou est-ce le résultat de l'évolution/perfectionnement naturel(le) du groupe?
Il s'agit vraiment de l'évolution naturelle du groupe. Les multiples changements de line-up doivent également y être pour quelque chose. Cependant, sur « Under the Banner of Suffering », je n'étais pas vraiment satisfait de ma prestation vocale et je savais que je pouvais vraiment faire beaucoup mieux. Je pense honnêtement que c'est chose faite avec « Revelation from the Ancestral Whisper ». J'ai pas mal bossé, surtout la voix death, et je suis vraiment content du résultat. Pour ce qui est de l'évolution entre les deux albums, ce n'est quand même pas le jour et la nuit. « Revelation… » est certes plus efficace. Je dirais aussi qu'il est plus froid, plus mélodique et moins grandiloquent.
(ndr : Effectivement, après avoir pu depuis l'interview mettre la main sur un exemplaire d'"Under The Banner", je dois admettre que mon appréciation de l'époque était dure par rapport aux qualités de l'album...)

J’ai trouvé des références à DISSECTION et DAWN dans l’album, principalement dans l’approche mélodique des riffs, et d’autres à LIMBONIC ART pour le côté brutal de l’orientation sympho.
Ces groupes font-ils partie de vos influences?
DISSECTION est indéniablement une référence commune à tous les membres du groupe. DAWN et LIMBONIC ART sont aussi des groupes que j'écoute mais je ne suis pas sûr que mes acolytes les écoutent également. Les similitudes avec DISSECTION et DAWN viennent de l'accent mis sur les mélodies (surtout aux guitares) plutôt que sur l'harmonie. Quant à LIMBONIC ART, je vois un peu moins les ressemblances. Peut-être une ambiance très froide. Ceci dit, ils vont beaucoup plus loin que nous dans le sympho...

En parlant d’influences justement, quels sont les groupes qui vous ont donné envie de vous lancer dans la musique? Et plus généralement, qu’est-ce qui vous a donné envie de faire de la musique ?
Pour moi, le groupe qui m'a donné envie de faire de la musique est sans aucun doute IRON MAIDEN. Puis des groupes comme BATHORY, EMPEROR, DISSECTION et LORD BELIAL ont suscité mon intérêt pour le black metal. Je ne sais pas ce qui m'a poussé vers la musique. J'ai plutôt l'impression d'y être venu tout naturellement, comme s'il s'agissait d'une évidence pour moi.

Vous avez soigné le livret, qui en plus d’un artwork réussi, comporte des volets au design très pro. Cependant, pourquoi ne pas avoir mis les paroles des chansons alors qu’il devait y avoir la place sur les 14 pages disponibles ?
Pour ce qui est de l'artwork, il est du ressort d'un infographiste indépendant à qui nous avions donné carte blanche. Toutes ces éloges lui reviennent donc de droit. Le choix de ne mettre que des extraits au lieu du texte complet traduit la volonté de garder une aura de mystère. De plus, je trouve que l'esthétique visuelle ne s'en porte que mieux. De toute façon, les personnes curieuses parviendront toujours à se procurer les textes.

Puisqu’on n’a pas les paroles et qu’il est plutôt ardu de comprendre ce que tu hurles, quelle est donc cette « Revelation From The Ancestral Whisper » ?
Il ne s'agit pas d'un album conceptuel. Les textes n'ont aucun liens entre eux même si une ambiance générale se dégage de l'album. Le titre éponyme met en scène le célèbre inquisiteur dominicain Jacques Sprenger. La révélation est celle de toutes les entités païennes sur lesquelles il a passé sa vie à jeter le discrédit. Cette révélation étant trop puissante pour un esprit si étroit, elle cause la pure et simple destruction de l'âme de l'intéressé.

Cela fait maintenant plus de dix ans que MALEFICENTIA existe, avez-vous perçu des changements majeurs dans la scène black française depuis vos débuts ?
On a l'impression en entendant les albums qui sortent que les groupes français n'ont plus maintenant à avoir aucun complexe par rapport aux groupes étrangers ; mais vous qui vivez les choses de l'intérieur, sentez-vous la même chose ?
Je n'ai jamais pensé que les groupes français étaient en deçà des groupes étrangers que ce soit dans l'excellence ou la médiocrité. La particularité de la scène française est sans aucun doute sa diversité. Cependant, je n'ai aucune idée de l'impact du métal français à l'étranger. La principale évolution de la scène est plus liée aux différentes modes.

Le black metal est légèrement moins à la mode qu’il y a quelques années, est-ce plus dur de trouver des concerts ?
Non, je n'ai pas l'impression qu'il est plus difficile de trouver des concerts. Le black metal trouvera toujours son fidèle public. Je pense juste que l'amateur moyen de black metal est plus exigeant qu'avant et c'est tant mieux.

Vous avez déjà dû vous trouver sur des affiches hétéroclites ; comment abordez-vous un concert quand vous vous trouvez au beau milieu d’une affiche qui n’a rien de black ?
Lorsqu'il s'agit d'une affiche essentiellement métal extrême, cela se passe souvent très bien, on voit quand même qu'il y a un public plutôt death et un autre plutôt black...
Pour, les affiches vraiment hétéroclites, c'est l'horreur. Je ne vois vraiment pas l'intérêt de tels concerts. Ce désir de vouloir tout mélanger me dépasse. Même en tant qu'auditeur, si je viens voir jouer un groupe de Death, je risque de ne pas être ravi d'entendre du rock ou du néo en première partie. Heureusement que ce type de programmation reste relativement rare. Elles ont tendance à imposer tout et n'importe quoi à l'auditeur, ne lui laissant pas le choix de ce qu'il va écouter.

Avant de finir, une dernière question concernant « Revelation… » : c’est le groupe en entier qui est crédité pour la composition, alors comment cela se passe-t-il concrètement ?
Travaillez-vous par Internet, au cours de réunions ? Dis-nous tout…
Nous travaillons en répétition. Tout le matériau de base est imaginé par Aragoth (guitare). Ensuite, le travail consiste à travailler tous les arrangements et les structures et là, tout le groupe est mis à contribution. Chacun apporte ses idées qui sont testées et expérimentées. Il faut ensuite rendre le tout cohérent. Après, il ne me reste plus qu'à écrire un texte tout en travaillant le placement des voix.

Merci pour tes réponses ! Nous en arrivons à l’espace de libre expression, au sein duquel tu as carte blanche.
C'est le moment de faire passer tes petites annonces, d'envoyer des bisous à tes fans, de faire partager tes photos de vacances, bref je te laisse le clavier !
Je n'ai pas grand-chose à déclarer. J'en profite juste pour signaler que MALEFICENTIA recherche toujours un label pour l'aider à distribuer son album ainsi que les suivants. Je te remercie pour ton interview.