Nicolas Cudorge (chant) et Jonathan Jouenne (guitare) - ERESIS par GARDIAN666 - 4266 lectures
Eresis est un prometteur groupe français de metal progressif, qui a récemment publié un premier album intitulé "Shedding Madness", largement plébiscité en ces pages.

L'occasion donc d'en savoir plus sur ce jeune combo, aussi intéressant pour sa musique que pour ses textes, qui nous parle de son parcours, ses influences, l'avenir prometteur également, bref tout ce qu'il faut savoir sur Eresis !




Pour commencer cette interview, une question classique mais indispensable, pouvez-vous nous présenter Eresis et son (jeune) parcours ?

Jon : Eresis a été créé en 2008, autour de Fred (basse) et moi-même (guitare). Après avoir joué dans plusieurs groupes de metal, allant du heavy au death, j'officiais dans un groupe de reprise pop/rock. Je cherchais à retrouver l'énergie propre au metal et je voulais composer mes propres morceaux, tout en gardant une approche musicale ouverte. J'ai auditionné pour plusieurs groupes et c'est par l'intermédiaire de l'un d'entre eux que je suis rentré en contact avec Fred, qui cherchait également à monter un nouveau projet musical à l'époque. Nos premières répétitions ont eu lieu chez Fred, on peut dire qu'Eresis est né dans la chambre de Fred (rires) !!

Nico (chant) : En mars 2009, j'intègre le groupe par le biais de Fred qui m'a enseigné le solfège à l'époque où j'étudiais le chant lyrique. Il m'avait parlé de ses projets musicaux, mais ma prof s'opposait à ce que je chante du metal. Plus tard, en 2009, je souhaitais commencer une nouvelle expérience et Eresis venait de se séparer de leur chanteuse. Après une audition nous étions 4. La semaine suivante, Rémi (claviers) venait faire son premier essai; l'alchimie a vite pris et nous étions 5.


Vous avez donc récemment sorti votre premier album « Shedding Madness », un album particulièrement long et dense. Comment s'est déroulé sa conception ? Avez vous connu des difficultés ou au contraire des moments plus favorables pour le composer ? J'ai lu sur votre bio que l'enregistrement a commencé fin 2011 et vous a donc occupé durant une bonne partie de 2012...

Jon : Oui nous avons étalé l'enregistrement de Shedding Madness sur plusieurs mois, pour différentes raisons. Tout d'abord, enregistrer un album coûte cher en auto-production. Le home-studio permet aujourd'hui de faciliter l'enregistrement, mais il demande du temps, des connaissances et du matériel. Être ingénieur du son c'est un métier à part entière, et l'oreille et les compétences d'Andrew Guillotin nous ont été précieuses. D'autre part, tous nos morceaux n'étaient pas encore totalement finalisés et Nicolas, notre chanteur, était parti étudier à Lille, ce qui rendait plus difficile la définition d'un emploi du temps commun !

Nico : Ce qui est à la fois intéressant et angoissant sur une telle durée, c'est que nous continuions de progresser pendant la phase de création de l'album. La problématique majeure est donc d'assurer une continuité, une cohérence dans notre musique tout en gardant un niveau d'exigence élevé. A ce niveau, il faut saluer le travail d'Andrew qui, en dépit des nombreux groupes avec lesquels il a travaillé entre chaque prise, a réussi à rester cohérent sur la production et le mastering.


C'est Andrew Guillotin qui a donc enregistré, mixé et masterisé cet album et comme je le disais dans ma chronique, il a fait un excellent travail ; vous avez décidé de travailler avec lui parce que vous connaissiez déjà ses 'travaux' ou peut-être même le connaissez-vous personnellement ?

Jon : Nous avions déjà travaillé avec lui pour notre première démo, un EP 3 titres. Nous savions qu'il ferait du très bon travail dans une ambiance détendue ! Il n'est pas toujours à l'heure le matin, mais le soir il ne compte pas ses heures (rires) !

Nico : Andrew est non seulement très compétent mais il est aussi de très bon conseil. Il ne s'impose pas, propose, soulève des lièvres et nous laisse la décision en dernier ressort. Sur un plan humain, il est assez magique et l'enregistrement bien que fatiguant a été une expérience formidable.


La pochette de l'album, aux couleurs superbes, est l’œuvre de Hicham Haddaji, membre du Strychneen Studio et déjà auteur de nombreuses covers d'albums ; comment a pu se faire cette collaboration ? Vous souhaitiez proposer une représentation visuelle de la "Reine des étoiles" ?

Jon : Là aussi, nous avions déjà travaillé avec lui pour l'artwork de notre premier EP. Je pense que c'est Andrew qui nous l'avait conseillé, c'est un peu la mafia ces gens-là ! Plus sérieusement, nous avons bien sûr été enchanté par le travail magnifique d'Hicham, qui est très talentueux et prolifique ! Nous souhaitions effectivement représenter cette fameuse Reine des étoiles -Eresis en sumérien- venant à la rencontre de la Terre, car nos textes sont très portés vers la mythologie et l'ésotérique. J'aime cette proportion écrasante entre un ciel immense et cette fine ligne de terre en-dessous. Au départ, la cité représentée ressemblait davantage à Manhattan, mais nous l'avons modifié pour Paris, lieu de nos répétitions ! Nous devrions peut-être rétablir l'ancienne version pour l'export aux Etats-Unis ?




J'ai donc découvert Eresis avec « Shedding Madness » et il me paraît impossible de ne pas accorder un certain nombre d'écoutes à votre album, de par sa diversité, sa richesse dans les sons, etc. ; Je suppose que c'était là votre souhait de faire un album qui 'sorte' du lot, montrant que vous avez déjà une identité forte et un son bien à vous...

Nico : Au sein du groupe il y a régulièrement eu des débats autours de « l'efficacité ». Est-ce que tel morceau est efficace? Est-ce que ce n'est pas trop inaccessible? (dans la perspective de la scène surtout et du partage avec le public) Finalement ces débats ce sont raréfiés et ont disparu pour ne laisser place qu'à la musique. Notre exigence vis-à-vis de nous même a été notre seul curseur. Je pense pouvoir parler au nom du groupe en disant qu'aujourd'hui nous tirons une certaine fierté d'avoir un son qui nous est propre. Ce n'est pas tant par la volonté de se différencier que par la nécessité de créer une musique qui à chaque instant nous correspond à tous les 5, que nous avons abouti à "Shedding Madness".


Vos morceaux sont globalement longs, avec de multiples breaks et ambiances : est-ce que vous vous êtes fixés des 'limites' pour ce qui est de la composition ou vous ne souhaitiez au contraire pas trop vous restreindre ?

Jon : Pas de limites ! D'ailleurs nous travaillons actuellement sur une grande suite de plus de 25 minutes. Donc la longueur n'est pas un problème, au contraire ! Notre prochain challenge pourrait être de réaliser un titre de 3 minutes ? Nous recherchions de la richesse musicale, aussi bien pour le plaisir de l'auditeur que pour le notre. Nous avons le défaut de nous ennuyer assez rapidement sur une partie si elle ne connaît pas de variations... j'aime les morceaux qui surprennent et qui offrent un peu d'inattendu à l'auditeur !

Nico : Un autre élément déterminant dans la longueur des morceaux est que chaque titre raconte une histoire. Musique et narration sont en phases. Nous souhaitions poser les briques de notre univers à la fois ésotérique, allégorique, mystique et il vrai que de longues compositions permettent d'élaborer autours de nos thèmes.




Et si au niveau instrumental Eresis est un groupe passionnant et très créatif, je dois dire que Nicolas Cudorge a aussi réalisé une prestation vocale remarquable sur « Shedding Madness », ce qui constitue un véritable plus à l'écoute de l'album : est-ce qu'il a suivi des cours de chant ou bien il pratique 'en solo' sa voix ?

Nico : Tout d'abord, un grand merci, ça fait chaud au cœur. J'ai toujours aimé chanter. J'ai fait partie de quelques projets musicaux mais aucun avec la dimension d'Eresis. En 2007, fan d'opéra et de chant lyrique que j'ai toujours été, j'ai entamé un travail vocal. J'ai intégré le cours de chant lyrique d'Elizabeth Gonçalves, une jeune cantatrice très douée pour le chant et pour la musique plus largement. J'ai pris des cours pendant 2 ans où j'ai étudié principalement la méthode Blivet et de nombreuses autres techniques. Toutefois, j'ai toujours été quelqu'un de très en colère intérieurement et même si le spectre des émotions balayées par le registre lyrique est très large, on en est pas moins limité aux indications de chant du compositeur. Alors peu à peu j'ai voulu m'exprimer par le biais d'un chant plus en phase avec ce qui bouillonnait en moi. J'écoute du metal depuis mon adolescence et même si je n'écoute pas que ça, c'est la musique qui me correspond le mieux. La suite des événements étaient logiques... Pour le reste des techniques que j'emploie (guttural, growl, voix à grain, voix théâtrale, ) c'est une pratique solo, enfin solo à moitié puisque l'énergie du groupe et de la musique fait beaucoup pour atteindre un certain timbre, une certaine émotion. C'est un chant qui ne se prend pas au sérieux mais qui est sincère en support de la narration. Je ne cherche pas à faire l'unanimité ou à plaire mais à raconter une histoire avec la musique d'où les nombreux changements de registre plus ou moins impromptus ou harmonieux... J'ai une véritable admiration pour Mike Patton de ce point de vue, ce mec est un conteur d'histoire génial et sa voix...


Le clavier tient aussi un rôle très important au sein de l'album ; il me semble que c'est à ce poste que vous avez recruté en dernier, Rémi Bardenet, un homme d'ailleurs très talentueux qui en plus des claviers, s'est occupé de parties de guitare acoustique et fait les 'backings vocals' ; en fait, « Shedding Madness » ne pouvait pas voir le jour sans claviériste ?

Jon : Effectivement cet album n'aurait jamais été aussi réussi sans l'apport de Rémi, aussi bien en terme d'instruments enregistrés qu'en terme de composition et d'arrangements ! Il faut souligner en particulier "Tales of the green fairy" et "The Aynans" qui sont principalement de lui. Rémi et Nicolas sont arrivés de manière quasi-concomitante dans le groupe, une bien belle fournée !


Je suis obligé de poser cet question très classique, mais pour Eresis elle me semble primordiale : quelles sont les influences du groupe (outre certainement Dream Theater, Mr. Bungle, etc.) ? Chacun des membres doit en avoir des différentes ? Et est-ce que consciemment ou pas, la musique de Eresis est nourri par vos influences ou des artistes que vous écoutez actuellement ?

Jon : Personnellement j'écoute aussi bien du Cannibal Corpse, que du Dimmu Borgir, Led Zeppelin, Metallica, Maiden, Behemoth, Vanden Plas, Symphony X, Muse, Gary Moore, les Beatles... mais je pense que Dream Theater et Opeth sont deux groupes qui recueilleraient l'approbation générale au sein du groupe ! Il y a bien sûr de ces influences dans notre musique, mais -me semble-t-il- elles ont été assez bien digérées. Et cela s'explique par le processus de composition qui ne repose pas sur une personne, mais principalement sur trois membres en ce qui concerne la musique : Fred, Rémi et moi-même. Ensuite, tout cela est encore longuement modifié à la sauce Eresis en répétition, ce mélange d'intervention tendant à éviter une influence trop présente et permettant de créer une musique originale !

Nico : Tout a été dit mais côté influences vocales je dirais: Mike Patton, Lisa Gerrard, Jeff et Tim Buckley, Michael Akerfledt, Robb Flynn, Spiros Antoniou,Christian Decamps, Ice-T, Robert Plant et Ronnie James Dio même si ces 2 là relèvent plus de l'admiration que de l'influence à proprement parler.


D'un point de vue textuel, Eresis aborde des sujets ésotériques et mystiques (mais pas que), comme la relation hommes/divinité, la réincarnation ; ces choix se sont imposés naturellement ? Y ' a t' il des œuvres en particulier qui vous inspirent pour traiter ces sujets ?

Nico : Disons qu'il y a une thématique mystique globale qui gravite autour la mythologie de l'ancienne Mésopotamie. Comme de nombreuses croyances, on y retrouve la création de l'homme par une ou plusieurs divinités et comme dans d'autres croyances, il existe au sein des dieux une divergence d'opinion quant aux destinées humaines, la liberté, l'asservissement... Cette trame de fond générique est un terreau fertile pour aborder notre époque par la prisme de la métaphore, nous essayons sans trop de trivialité, on l'espère, de porter un regard analytique et critique sur le dualisme de la psyché humaine (volonté de puissance vs aspiration au bien, amour vs haine, combat vs résignation). Mais je digresse. En tant que fondateurs du groupe Jon et Fred avaient un intérêt commun sur ces thèmes mystiques, de fait lorsque les autres sont arrivés le choix d'accepter cet univers a été offert à chacun. Nous avons chacun un regard sur ces thématiques qui est différent. Ce qui nous relie c'est la validation narrative lorsque les brouillons des textes émergent. Est-ce que oui ou non le texte colle à notre univers, est-ce que le message sous-jacent nous interpelle ? Nous souhaitons un consensus maximum dans notre processus créatif.


Vous avez déjà donné quelques concerts, est-ce qu'une tournée est prévue pour défendre sur scène comme il se doit « Shedding Madness » ?

Nico : Pour le moment le line-up est un peu instable. Rémi et moi avons fait des choix de vie qui nous ont éloigné géographiquement du groupe pour le moment. La musique suit son cours et chacun d'entre nous souhaite qu'Eresis puisse retrouver un line-up stable pour venir défendre l'album sur scène. Pour ce qui est de tourner, la politique du groupe a toujours été de faire un maximum de scène. Seul hic, nous avons tous de nombreux engagements, personnels, professionnels, au sein d'autres formations musicales...et trouver des dates devient vite fastidieux si un membre au moins ne s'y consacre pas de manière intense. Par ailleurs, même si nous sommes ouverts à des concerts en dehors de Paris, notre expérience s'est limitée pour le moment à l’Île de France, le manque de salles, les prix de location élevés et la pression concurrentielle si intense, qu'il est très compliqué, sans mettre la main à la poche, de pouvoir jouer. La scène a été à la fois un moment formidable dans la rencontre avec le public mais en même temps un moment assez frustrant car, pour les raisons évoquées précédemment, nous n'avons joué que dans le cadre de tremplins musicaux ou des plateaux avec d'autres groupes ce qui ne nous a jamais permis de faire des concerts de plus 45 minutes (dans le meilleur des cas), frustrant donc car nous n'avions pas la possibilité de développer tout notre répertoire. Donc si un tourneur est intéressé par notre musique et qu'il lit ces lignes, toute proposition sera étudiée.



 
Avez-vous déjà contacté des labels pour accroître votre visibilité ? N'étant pas musicien, je ne sais pas trop si aujourd'hui pour un jeune groupe, pratiquant en plus un 'style' pas forcément très commun, c'est quelque chose de prioritaire ? Ou bien faire beaucoup par vous même vous convient peut être mieux ?

Jon : Nous avons signé un contrat avec Brennus Music pour ce qui concerne la distribution numérique, notre musique sera bientôt accessible sur de très nombreuses plateformes de téléchargement. Pour la distribution physique, nous sommes présents dans les bacs de quelques Cultura d’Île de France, mais elle se fait principalement auprès des musiciens ! Nous avons contacté des labels pour être distribué physiquement d'une manière plus large, car promouvoir et distribuer un disque demande beaucoup de temps et d'investissement. D'ailleurs si le Qatar veut bien nous subventionner nous sommes prêt à leur faire une chanson sur le PSG !


Pour finir, je vous laisse le mot de la fin, si vous avez un mot à ajouter, un message à faire passer, c'est tribune libre !

Nico : Un grand merci à tous ceux qui nous suivent et nous témoignent leur sympathie et leur soutien. Nous invitons tous vos lecteurs à venir nous découvrir, merci pour la chronique et cette interview.

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