Jo - JO ATARAXIE par PAMALACH - 4104 lectures
Humilité et sincérité... tels sont les maîtres mots de cette interview passionnante qu'a bien voulue nous accorder Jo. Avec un soin tout particulier, il prend le temps de nous expliquer sa conception du chant dans ce Doom si particulier dont ATARXIE est l'auteur.


Salut et merci de répondre aux questions de Vs ! Vers quel âge as-tu commencé à t'intéresser à la musique ?
Salut. J'ai commencé à réellement m'intéresser à la musique au moment où je me suis intéressé au métal, c'est à dire vers 12/13 ans. Je dois avouer qu'avant ça, la musique n'était pas quelque chose de très important pour moi. Cela restait un « fond sonore » pouvant être agréable par moments. Je me rappelle juste que j'aimais bien certains morceaux de Queen et des Doors que ma sœur aînée écoutait. C'est donc en regardant un peu par hasard certaines chaînes musicales que j'ai eu mes premières claques musicales à savoir Faith No More, Metallica, Sepultura, Type O Negative ou Paradise Lost. Suite à ces découvertes, je me suis intéressé davantage à la scène et je me suis mis à la basse. En parallèle, j'ai rapidement intégré un groupe du nom de « Blackened » avec d'autres potes de collège. On jouait uniquement des reprises des groupes précités. Par la suite, mes goûts ont rapidement évolué vers des styles plus extrêmes comme le thrash, death, doom, dark et black (ex : Slayer, Morbid Angel, Entombed, Bethlehem, Thergothon, Burzum ou Cathedral). Voulant apporter ma pierre à l'édifice dans un style plus extrême, j'ai ensuite fondé « Reign of Evil » (inspiration quand tu nous tiens ah ! ah !) avec des potes de lycée dans lequel je tenais le poste de bassiste.


Comment es-tu devenu chanteur ?
J'ai commencé à être chanteur un peu par la force des choses. Après avoir viré notre chanteur dans Reign Of Evil, nous n'avons pas trouvé d'autre candidat dans la région de Rouen. Vers la fin des années 90, le black et le death étaient 2 styles marginaux et les groupes se comptaient sur les doigts d'une main sur Rouen. Les gens étaient davantage branchés heavy, thrash, power metal voire néo métal. N'étant jamais mieux servi que par soi-même, j'ai fait un essai au micro et l'essai s'est avéré concluant.


Dans ATARAXIE tu growles et cries. As-tu fais un travail particulier pour grogner de cette façon ?
Pour maîtriser mes vocaux, il a fallu surtout répéter régulièrement pour structurer inconsciemment mon travail. Il faut savoir que je ne m'entraîne jamais en dehors des répètes. Avec le recul, j'ai à peu près suivi le plan de travail suivant : 1) Connaître mes capacités vocales afin de les exploiter au maximum et les moduler 2) Gérer mon souffle pour maximiser au mieux le rendu dans chaque registre vocale 3) Maîtriser le placement rythmique 4) Articuler au mieux les textes 5) Apprendre à maîtriser ça dans n'importe quelle condition de concert (chaleur excessive, sans retour sur scène, fumée, stress….).


La plupart des jeunes musiciens se demandent souvent quels sont les pièges à éviter pour ne pas se faire mal quand on hurle. As-tu des recettes particulières en ce qui te concerne ?
Je pense qu'il ne faut déjà pas aller au-delà de ses limites d'où l'importance de bien évaluer ses propres limites vocales. En effet, chaque chanteur a son propre registre vocal et cela ne sert à rien d'essayer de chanter comme King Diamond. Il est donc inutile de vouloir imiter, mais bien plus important de délimiter son registre. Après, il y a des petits trucs pour maintenir ses cordes vocales dans de bonnes conditions en concerts/répètes/studio. En ce qui me concerne, je bois beaucoup d'eau. Je ne peux pas te dire exactement l'influence de l'eau les cordes vocales. Néanmoins, j'ai comme l'impression que l'hydratation continue de la gorge permet minimiser le forçage. Il m'arrive ainsi de boire jusqu'à 4L d'eau lors d'une journée entière de prises voix en studio.


Comment ressens-tu le chant quand tu growles ? Certains musiciens ont pu dire qu'ils sentaient une impression de chaleur dans le ventre et que leurs cris résonnaient parfois jusque dans leur parois nasale. Comment le ressens-tu en ce qui te concerne ?
Mes impressions à moi ne relèvent en tout cas pas de l'expérience thermique. Quand je « growle », je me focalise uniquement sur ma respiration et mon débit d'air. C'est vraiment l'air inspiré qui me donne cette capacité de moduler mon grain pendant un temps donné (plus ou moins long). Il est donc important d'entretenir un minimum sa forme physique et d'éviter de fumer tout simplement.


T'est-il déjà arrivé de te retrouver aphone ?
Oui mais pas en temps normal de concert/répètes/studio en tout cas. Les seules fois, c'est après avoir assuré certains concerts avec un début d'angine/pharyngite/trachéite en gros. Faire du chant « forcé » avec une gorge pas saine est juste suicidaire pour ses cordes vocales. Néanmoins, ça peut arriver des fois de « tenter le coup » histoire d'éviter une annulation sèche. Dans la plupart des cas, on va dans le mur.


La musique extrême commence à avoir quelques années de bouteilles et on a pu constater que certains vieux chanteurs de death ou de thrash s'étaient détruits la voix à force de hurler et que certains avaient eu de gros problèmes par la suite. Est-ce que tu penses parfois à cet aspect moins fun de la musique ?
Comme je l'ai dit précédemment, il faut apprendre à connaître ces capacités vocales afin de ne pas s'abîmer les cordes vocales. Si tu joues régulièrement en forçant trop dessus, il n'est pas étonnant d'avoir de réels problèmes un jour ou l'autre. Le corps humain possède ses limites comme n'importe quel autre instrument au final. Il a également cette capacité à encaisser des « agressions » pendant un certain temps sans t'avertir drastiquement mais sûrement : perte de voix, douleurs, infections. C'est un peu comme les acouphènes. Tu peux aller pendant 10 ans dans des concerts sans protections auditives te retrouver le lendemain avec des sifflements du niveau sonore d'une tondeuse. Faut donc être raisonnable et écouter ces petits signaux d'alerte. De plus, je pense qu'il n'est pas raisonnable d'enchaîner des tournées à un rythme « industriel » quand tu évolues dans un certain registre. Je me rappelle que le Jonas Renkse de Katatonia avait dû se mettre au chant « pop » après la tournée de « Dance of december souls ». Il s'était rendu compte qu'il ne pouvait juste pas assurer dans le registre torturé autant de dates à la suite.


Est-ce qu'il t'arrive de chanter en chant clair ?
Si tu savais hé hé hé ! Comme je l'ai dit précédemment, je ne chante jamais en « chant forcée » en dehors de mes activités musicales. Je chante donc exclusivement en chant clair quand cela m'arrive comme tout le monde. Etant en plus gros fan d'heavy et doom épique en général, il m'arrive très fréquemment de chanter dans ma voiture au volant. Cependant, même si je sais chanter juste, je ne prétends pas posséder un timbre suffisamment intéressant pour l'utiliser dans un groupe. Savoir chanter juste est une chose, avoir un timbre intéressant en est une autre.


Quel est le chanteur ou la chanteuse metal qui te scotche au mur ? Et si tu peux nous dire si il y a une chanteuse ou un chanteur hors métal qui te colle au plafond ?
Plein de chanteurs m'impressionnent de par leur registre, créativité ou longévité: King Diamond, Bobby Liebling (Pentagram), Ozzy, Eric Wagner (ex Trouble), Scott Reagers (ex Saint Vitus), Dio (RIP), Robert Lowe (Solitude Aeturnus/Candlemass), Phil Lynott (RIP), Eric Adams (Manowar), Chris Reifer (Autopsy), Rainer Landfermann (ex Bethlehem), Thomas Eriksson (Griftegard). Pour ce qui est des chanteuses, on va dire Runhild Gammelsæter de Thorr's Hammer (US) car elle descendait sacrément dans les graves et Amber Valentine de Jucifer car elle n'y va pas de main morte en concert et ils font des grosses tournées.


Le placement rythmique est particulièrement important dans le chant. Tu dois particulièrement le ressentir au vu de la musique très lente que tu pratiques. Comment appréhendes-tu le rythme ?
Comme j'ai l'habitude de poser ma voix sur des riffs très lents et assez monotones, il est en effet important de bosser particulièrement cet aspect. Le rythme est en plus d'autant plus difficile à apprécier lorsqu'il est très très très lent ! Il est bien plus facile de comprendre des rythmes très rapides. On bat le temps facilement sur du grind mais pas du doom extrême he he! C'est donc tout un travail lorsque tu écris un texte. Il faut trouver le nombre de syllabes exactes pour donner de la dynamique. Faire varier le chant est aussi un autre moyen de rendre l'ensemble « plus vivant ».


Qu'est-ce qui t'inspire pour écrire les lyrics ?
Beaucoup de choses à la fois : les pires côtés de la nature humaine, l'existentialisme en littérature/philosophie, les religions, l'extrémisme, les sciences en règle générale, le cinéma… Néanmoins, l'homme reste au centre de mes paroles. Je ne suis pas un rêveur donc je me fous autant des elfes que des nains de jardin !


Trouves-tu frustrant que les fans de metal francophone se concentrent assez peu sur les paroles ?
Oui et non car la musique reste de la musique avant tout et non de la littérature. Si un groupe écrit des bonnes paroles, c'est bien évidemment un atout. Néanmoins, ce n'est pas pour moi le nerf de la guerre. En ce qui me concerne, je suis davantage frustré par le fait que les gens attachent trop d'importance à l'image et au bruit autour de certains groupes. Je me demande même parfois si des gens n'aiment pas des groupes avant même des les avoir écoutés. Bref, je peux comprendre tout à fait que des personnes peuvent ne pas s'intéresser à certaines paroles car la musique « parle finalement d'elle-même » ou certains thèmes les rebutent totalement. Je suis par exemple fan de Trouble sans pour autant adhérer à leur message « chrétien ». Lorsque je lis des paroles, je suis davantage sensible au développement des thèmes abordés et c'est pour cela que j'aime les paroles de Trouble au final. J'adore également Grand Belial's Key dans le black car leur satyre judéo-chrétienne s'inspire de réelles connaissances sur le sujet.


Quel est le chanteur qui écrit les lyrics que tu préfères ?
Les chanteurs ne sont pas les seuls à écrire des paroles dans les groupes ! J'aime beaucoup les paroles de Solstice (le groupe d'epic doom), Grand Belial's Key ou Candlemass écrites par des guitaristes ou bassistes. Pour en revenir aux chanteurs, j'adore aussi les paroles de King Diamond car il y a toujours tout un concept derrière. Les paroles de Lee Dorrian (Cathedral), Damon Good (Mournful Congregation) ou Bobby Liebling sont super bien écrites dans un style très « doom ».


Peux-tu nous donner ton avis sur ces différents hurleurs ?
- Rob Halford ? : Une légende vivante du métal ! Je suis un gros fan de la première période heavy du groupe mais beaucoup moins de la période speed. Ce gars a maintenant atteint un âge où il lui est difficile de refaire ses voix haut perchées. Il me fait un peu penser à Eric Wagner dans un style différent. Au dernier concert de Trouble auquel j'avais assisté à Paris, il était tout simplement incapable de monter dans les aigus comme avant.

- Chris Barnes ?: Même si je réécoute les albums de Cannibal Corpse avec plaisir, il ne m'a jamais impressionné vocalement parlant. Un chanteur de base de death.

- Lee Dorian ? : Une légende vivante du doom au même titre que Scott Reagers (Saint Vitus). Son timbre est tout simplement unique et reconnaissable ! Bref, même si Cathedral a eu une période à vide « doom pieds nus » (entre « the ethereal mirror » et « caravan beyond redemption »), ils sont revenus par la suite et très grands avec « Endtyme » pour s'épuiser de nouveau sur le dernier en date. Triste que ce groupe a prévu de splitter.

- John Bush ? : Très mauvaise bière cette bière belge appelée « Bush » ! Pour évoquer le chanteur, je n'ai jamais été fan d'Anthrax car j'ai toujours rangé ce groupe dans la catégorie « thrash rigolo ». Bref, quand je veux écouter du thrash, je préfère m'écouter un vieux Sodom, Voivod ou Sabbat(JAP).

- Jeff Walker ? : Texas Ranger ! Je n'ai jamais été un grand fan de Carcass non plus. Je n'aime pas le grind donc les débuts me passent un peu au-dessus de la tête comme ceux de Napalm Death. Quant au reste, je trouve ça trop « soft » pour du death. Je préfère nettement le death plus sombre ou sale. Cependant, je reconnais par contre que ce type avait un chant original pour le style.

- Chuck Schuldiner ? : Pour être honnête, je n'ai jamais été un fan de Death. « Scream Bloody Gore » et « Leprosy » sont des albums sympas mais ils ne contiennent rien de transcendant à mon sens. Les albums d'après m'emmerdent autant que les albums de Cynic, Atheist etc… Par contre, je reconnais qu'il s'agit d'un groupe de « death clinique de référence » pour les fans d'astiqueurs de manche !


Le mot de la fin est pour toi !
Merci à toi pour cette interview qui sort de l'ordinaire ! J'en profite pour faire un peu de pub pour mes prochaines sorties à venir : 2nd album de Funeralium « Deceived Idealism » sur Ostra Records (version vinyle) et le tout premier Void Paradigm sur Totalrust Records (version CD). Et n'hésitez pas à venir aux prochaines dates DOOM : Ataraxie/The Wounded Kings/Cult Of Occult (Les Combustibles, Paris, 1er mars), Ataraxie/Anhédone (Emporium Galorium, Rouen, 4 février), Funeralium/Cauchemar/Children Of Doom etc… au Doom Over Paris (Klub, Paris, 13 mai), Ataraxie/Solstice/Procession etc…au Dublin Doomday (Dublin, 29 septembre).

Special Dedicace à Skay !


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